Archive for the ‘Moshe Dayan’ Category

Sionisme et apartheid: la presse espagnole enfonce le clou

26 mars 2010
L’Espagne, comme d’autres pays à vrai dire, a été accusée de connaître un regain d’antisémitisme. Et il faut dire que cette accusation n’est pas exactement passée comme une lettre à la poste et qu’elle a suscité une réaction de la presse espagnole.
Je l’avais déjà noté dans un précédent post où je vous proposais un article du journal El Pais. Cette fois, c’est La Vanguardia, le grand quotidien hispanophone de Barcelone qui s’y met en publiant un long article qui porte sur l’apartheid dans l’entité sioniste. Cet article est le fait d’un spécialiste puisque rédigé par un guide touristique qui exerce en Afrique du Sud et a donc quelque compétence pour comparer la situation de l’Afrique du Sud du temps de l’apartheid et ce que subissent actuellement les Palestiniens. La vanguardia n’est pourtant pas un journal particulièrement pro palestinien!
L’article donne des indications précises sur les relations entre l’entité sioniste et le régime d’apartheid sud africain. Il met notamment en relief le rôle de l’institution communautaire juive, partie prenante du régime d’apartheid et fer de lance de la mise en relation de l’Afrique du Sud avec l’entité sioniste. Il souligne aussi le rôle de personnalités juives, dont le chanteur Johnny Clegg est une des figures les plus connues, dans la lutte contre l’apartheid. Ces Juifs, nombreux au demeurant, n’étaient par contre pas intégrés dans le système communautariste juif d’Afrique du Sud. Ils n’agissaient pas en tant en qualité de Juifs mais en tant que militants de gauche ou tout simplement antiracistes.
On peut lire que John Vorster, futur premier ministre Sud Africain, interné par les Britanniques pendant la seconde guerre mondiale pour cause de sympathies pour le nazisme, n’en sera pas moins couvert d’éloges par des dignitaires du régime sioniste comme Moshe Dayan ou Yitzhak Rabin.
Et que Shimon Peres (prix Nobel de la paix!), chargé en tant que ministre de la défense de la coopération militaire avec Pretoria, ne regrette rien puisque, dit-il, « Il faut oublier le passé, » « Le passé ne m’intéresse pas. »
Shimon Peres est un de ceux qui somment pourtant le monde entier d’entretenir la mémoire de l’holocauste…
Apartheid en Israël
Quiconque a vécu dans l’Afrique du Sud de l’apartheid et voyage aujourd’hui en Israël observera des choses désagréablement familières.
par Jaume Saladrigas au Cap, La vanguardia (Esp) 23 mars 2010 traduit de l’espagnol par Djazaïri

Il est courant de lire des articles sur le malaise que ressentent les politiques Israéliens devant l’actuel climat d’antisémitisme qui, selon eux, s’est installé en Espagne. Par antisémitisme, certains entendent les opinions opposées ou qui interrogent les actions de l’actuelle administration israélienne. L’Etat hébreu est celui de l’apartheid, entend-on souvent. Pourquoi les autorités israéliennes s’indignent-elles chaque fois que quelqu’un en vient à faire des comparaisons avec l’ancien système d’apartheid en Afrique su Sud? Et dites-moi en quoi est-il antisémite de dire quelque chose de ce genre?Dans les années 1950, DF Malan, premier ministre d’Afrique du Sud, créa un système de lois qui rappelaient celles de Nuremberg, à l’époque d’Hitler: la loi sur l’état civil qui classait la population en fonction de la race. Des lois qui interdisaient les relations sexuelles ou matrimoniales entre personnes de races différentes. Des lois qui excluaient les noirs du monde du travail blanc.

Les origines de l’antisémitisme des Afrikaners remonte à une décennie avant 1948,année qui vit le Parti Nationaliste remporter pour la première fois des élections législatives. DF Malan avait déclaré son opposition à l’acceptation par l’Afrique du Sud de réfugiés Juifs supplémentaires venant d’Allemagne. A cette fin, il proposa des lois anti-immigration. Dans un discours au parlement, il défendit ainsi sa position: « On m’accuse souvent de discrimination envers les Juifs pour le simple fait d’être Juifs. Je vous dis en toute sincérité que c’est le cas; je les discrimine parce qu’ils sont Juifs. »

La présence de communautés juives en Afrique du Sud est antérieure aux événements de la seconde guerre mondiale. Au 19ème siècle, arrivèrent des familles entières ou ce qui restait de familles décimées qui fuyaient les pogroms en Lituanie et en Lettonie. Avec Staline, les persécutions contre les Juifs s’accentuèrent, ce qui provoqua une deuxième vague de réfugiés vers l’Afrique du Sud. Avec la découverte en 1860 des riches gisements de diamants de Kimberly et l’enrichissement notable de certains membres de la communauté juive, l’antisémitisme s’accrut. Les préjugés, les clichés: « le Juif est avare » étaient déjà à l’époque très répandus. La guerre anglo-boer à la fin du 19ème siècle servit aussi d’argument à des politiciens mal intentionnés. Ces derniers ne tardèrent pas à accuser les Juifs de s’enrichir aux dépens des perdants [les Boers]. Hendrik Verwoerd, rédacteur en chef de l’influent journal Die Transvaler et fondateur du mouvement Apartheid, soutenait que les Juifs en Afrique du Sud et dans le monde poursuivaient le même objectif: contrôler l’ensemble de l’économie. Les outils de communication (presse et radio) entre les mains de l’appareil du parti Nationaliste ne rataient aucune occasion de lancer une campagne antisémite. Il faut se souvenir que les Afrikaners s’étaient montrés favorables à la cause d’Hitler randis que les Sudafricains d’origine anglaise – dont étaient isus presque tous les membres du gouvernement – soutenaient le camp allié.
Don Krausz, survivant de l’holocauste (sa famille a eu moins de chance) et président de l’association des survivants de l’holocauste en Afrique du Sud, le rappelle bien: « Les Afrikaners, et en particulier les adhérents ou sympathisants du Parti Nationaliste, nous haïssaient. La presse afrikaans était un calque du journal hitlérien « Der Stürmer ». Les Juifs vivaient dans une anxiété constante sous la menace des Afrikaners. A Potschefstroom, d’où est ma femme, les milices des Chemises Grises jetaient des pierres sur les magasins juifs. Ou pire encore, ils y mettaient le feu ou les faisaient exploser. Ces gens là seront au pouvoir en 1948. Peu de ministres n’avaient pas la nostalgie du IIIème Reich et du nazisme. »

Après la guerre, le Parti nationaliste remporta les élections de 1948 et lança un vaste processus de transformation politique. Peu importaient les différends avec les anglophones (représentés par le Parti de l’Unité et le Parti Progressiste; l’opposition). Ensemble, il s’agit maintenant de construire une société nouvelle. L’apartheid est l’affaire de tous. La même année, le parlement, avec l’appui de tous les partis, opposition comprise, approuvait un nouveau système de lois pour l’Afrique du Sud. Un Ordre Nouveau: l’apartheid. La communauté juive d’Afrique du Sud n’avait rien à craindre. Le train de nouvelles lois ségrégationnistes ne touchait pas aux Juifs. Il s’agissait de créer un Etat dans lequel il serait possible de construire deux sociétés distinctes et différentes entre elles: les blancs d’un côté, les noirs et le reste des communautés non blanches de l’autre (à l’époque l’Afrique du Sud avait un déficit important en matière de population d’origine européenne). Et eux, les Juifs, étaient blancs.

Que s’était-il passé? Qu’est-ce qui avait changé entre les Afrikaners et la communauté juive? En 1961, le Parti nationaliste obtint l’approbation majoritaire au parlement d’un nouveau statut et de la décision de proclamer la république. Ce changement avait contrarié le Royaume Uni qui n’y pouvait cependant pas grand chose. Sauf exercer une pression maximum pour expulser l’Afrique du Sud du Commonwealth britannique, ce qui se produisit effectivement. Les blancs d’Afrique du Sud – qu’ils soient Boers ou d’origine anglo-saxonne – et Israël s’étaient toujours vues comme deux nations authentiquement démocratiques et soucieuses de défendre les valeurs occidentales dans un environnement le plus souvent hostile. En conséquence elles exigeaient le respect mutuel.

L’Afrique du Sud percevait sa destinée somme quelque chose de très proche de celle d’Israël. « Les Israéliens sont une minorité qui vit entourée de 200 millions de fanatiques musulmans qui, en outre, reçoivent l’appui de pays communistes. Un îlot de gens civilisés entourés de 200 millions d’Arabes barbares et sauvages. Quant aux Afrikaners, 5 millions de personnes au milieu de centaines de millions de noirs aidés par les communistes, » avait déclaré en une occasion John Vorster dont les propos seront répétés des années plus tard par le premier ministre PW Botha.

Pendant la deuxième guerre mondiale, le futur premier ministre d’Afrique du Sud, John Vorster, fut interné dans un camp de concentration allié. Vorster était un admirateur fervent des nazis, chose qui ne cadrait pas bien avec un pays comme l’Union Sud Africaine qui était en guerre aux côtés des alliés. Trois décennies plus tard, en 1976, il se rendait à Jérusalem. en qualité de premier ministre cette fois. Le gouvernement de  Yitzhak Rabin, Menahem Begin et le légendaire général Moshe Dayan ne tarissaient pas d’éloges à l’égard de leur hôte.

Israël et l’Afrique du Sud oublièrent leurs divergences idéologiques du passé et inaugurèrent une relation cordiale et très fructueuse. A l’époque Israël et l’Afrique du Sud ont travaillé à des projets en vue de développer des tecnologies militaires de très haut niveau. Israël apportait à l’Afrique du Sud une aide militaire dans le conflit contre l’Angola. L’ennemi à combattre était le communisme.

Dans les années 1970 et 1980, quand la communauté internationale, sous la pression d’organismes comme l’ONU, décida d’imposer des sanctions économiques à Pretoria, PW Botha, le premier ministre du pays, durcit encore plus l’apartheid et en conséquence, l’Afrique du Sud s’enfonça dans une spirale de l’horreur. Les manifestations, les révoltes, les arrestations, les exécutions et les assassinats politiques firent parti du quotidien. Les grandes multinationales étrangères choisirent de quitter l’Afrique du Sud. L’occident tourna le dos à l’Afrique du Sud. Rien de tout cela n’ébranla le gouvernement. Dans le même temps, les passeports sud africains ne permettaient plus de voyager à l’étranger, sauf en Israël, l’ami fidèle.

Alon Liel, ax ambassadeur israélien à Prétoria, a délaré dans une interview que ce fut précisément l’Etat d’Israël qui assuma la responsabilité d’aider l’Afrique du Sud à se doter du potentiel militaire nécessaire (le plus important du continent). L’Afrique du Sud avec ses énormes réserves de trésorerie issues de sa puissante industrie minière, put financer divers programmes de développement technologique en Israël et, en contrepartie, des scientifiques Israéliens apportèrent leur savoir faire à l’Afrique du Sud. C’est ainsi, par exemple, que ces deux pays obtinrent la technologie essentielle pour développer leur arsenal nucléaire. Peu de gens en étaient informés.  Du côté israélien, Shimon Peres et Rabin le savaient (mais ils essayaient de le cacher). Ces deux hommes, avant d’être des politiciens, faisaient partie de l’équipe de techniciens militaires qui travaillait avec le gouvernement de Prétoria.

Antérieurement à la mise en place d’obstacles aux frontières, de checkpoints et autres dispositifs pour contrôler la population palestinienne qui entrait et sortait quotidiennement d’Israël, des spécialistes de la sécurité anti terroriste Sudafricains apportèrent une aide logistique à leurs coreligionnaires Israéliens. La même chose s’est produite avec la construction de ce qui est peut-être le plus important symbole de la répression et de la ségrégation raciale en Israël: le Mur. La gigantesque clôture de béton et d’acier qui serpente autour d’un périmètre qui ne cesse de s’agrandir.

Vers 1986, sous la pression de la situation internationale, des sanctions économiques, des résolutions successives de l’ONU condamnant à chaque fois l’apartheid, Israël décida de prendre ses distances avec le régime de Prétoria. Cette évolution des relations avec l’Afrique du Sud préoccupa les responsables de l’appareil sécuritaire en Israël. « Qui aurait pu penser? Est-ce que nous sommes tous soudain devenus fous? Comment allons-nous faire sans l’assistance militaire de l’Afrique du Sud? Que va devenir notre industrie aéronautique? Nous ne pourrons pas survivre sans son soutien. N’oubliez pas que les Sudafricains, depuis les années 1970 n’ont cessé de nous aider et sont nos meilleurs clients. »

Aujourd’hui, quand on évoque des personnalités juives Sudafricaines, les noms qui nous viennent à l’esprit sont ceux d’Helen Suzman, une éminente militante anti apartheid ou celui de Nadine Gordimer, prix Nobel de littérature. Et peut-être aussi celui de Johnny Clegg, musicien de rock célèbre dans les années 1980. Tous trois s’opposèrent à l’apartheid. Rares sont cependant ceux qui connaissent le nom de Percy Yutar.

Yutar appartenait à l’autre bord. C’était le procureur qui en 1963 a réussi à mettre Nelson mandela derrière les barreaux. Il avait fait valoir des preuves qui incriminaient apparemment Mandela dans un prétendu sabotage et de vouloir conspirer contre l’Etat. Mandela purgea une peine de 27 ans et Percy Yutar fut récompensé par le gouvernement avec le poste de procureur général de l’Etat Libre d’Orange et, peu après, du Transvaal. Pendant des dizaines d’années, la Fédération Sioniste et le Groupe des Députés Juifs d’Afrique du Sud honorèrent des hommes comme Percy Yutar, Juif anti communiste et bon Sudafricain.

Pour Alon Liel, l’image que le monde devait avoir (et continuer à avoir) des Juifs d’Afrique du Sud est le modèle classique des militants contre l’apartheid. Les Juifs déploraient dans leur majorité le racisme mais insuffisamment. C’est que ce système leur apportait deux garanties fondamentales: un bon niveau de vie et une vie sans crainte du communisme. Devant les atrocités endurées au quotidien par les noirs et les autres communautés non blanches, les Juifs liés à l’establishment ont détourné le regard. Les choses iront mieux pour nous, disaient-ils, si nous les laissons telles quelles.

« Il faut oublier le passé, » recommandait Shimon Peres lors d’un entretien avec un correspondant Sudafricain. Shimon Peres parlait en connaissance de cause. Ce n’est pas pour rien qu’il a été ministre de la défense à l’époque de la visite de Vorster à Jérusalem et deux fois premier ministre dans les années 1980, à l’époque précisément où les relations entre l’Etat hébreu et l’Afrique du Sud blanche étaient au mieux .Peres goûte peu le charabia moraliste. « Je ne regarde jamais en arrière. Le passé ne m’intéresse pas. Je ne peux pas le modifier, à quoi bon m’en préoccuper maintenant? » Quand on lui demande comment il est possible que deux nations aux idéologies aussi différentes, antagonistes, aient pu s’apporter un soutien mutuel et s’il a douté à l’occasion, il répond: « Toutes les situations ne correspondent pas forcément à un idéal. Toute décision tient compte de deux alternatives imparfaites. Le mouvement noir en Afrique du Sud encensait Arafat depuis des années, et Arafat était notre ennemi chez nous. A la vérité, nous n’avions pas le choix. Nous n’avons cependant jamais cessé de dénoncer l’apartheid. Nous ne l’avons jamais soutenu. »

Personne en Israël n’a honte du passé. Le sous directeur général du ministère des affaires étrangères, Gideon Meyer, le justifie ainsi: « Notre handicap majeur a toujours été la sécurité. Aucune nation au monde n’est plus menacée que la nôtre. Il en est ainsi depuis ses tout premiers jours, depuis la naissance de l’Etat d’Israël. La géopolitique d’Israël en est le résultat. »

Quiconque a vécu dans l’Afrique du Sud de l’apartheid et se rend aujourd’hui en Israël observera des choses étrangement familières. Il n’existe certes pas en Israël de pancartes où on annonce aux noirs l’interdiction de ceci ou de cela, « blancs seulement », « non européens seulement ». Le fait est que ça revient au même; en Israël comme en Afrique du Sud par le passé, prévaut un climat de ségrégation raciale. Les Israéliens préfèrent cependant ne pas s’en rendre compte.

Les soldats de l’Etat hébreu humilient très souvent les Palestiniens qui se présentent aux checkpoints, les postes frontaliers. Les colons s’amusent à tracer des peintures xénophobes sur les humbles demeures des Palestiniens à Hébron. La police de jérusalem Ouest exerce son autorité de manière routinière, interpelle systématiquement toutes les personnes d’apparence arabe et contrôlent leurs identités. Certaines colonies et communautés juives refusent complètement l’entrée de « leur » zone aux palestiniens. L’argument qui justifie ce refus est l’appartenance à deux mondes culturellement distincts.Le maire d’un de ces hameaux de colons juifs en est venu à proposer que les palestiniens portent un quelconque signe distictif qui les identifie comme tels. Renversement de la notion de ghetto? Possible. Dans les années 1990, des groupes d’extrême droite juifs avaient exigé que les commerçants qui employaient des Palestiniens licencient ces derniers. Ceux qui s’étaient pliés à cette exigence  avaient reçu un autocollant où on lisait « nous n’employons pas d’Arabes. » Dans les matchs de football qui opposent des équipes israéliennes et palestiniennes, les supposrters juifs crient « mort aux Arabes. »

Celui qui a le rare honneur (ou selon le cas, tout le contraire) d’être invité à dîner chez une famille juive de la classe moyenne, il se peut qu’avec le dessert  – peut-être que c’est l’été et que nous soyons sur la terrasse à profiter du parfun que répandent les citronniers du jardin du voisin – la conversation animée porte sur la cause palestinienne. Nos amphitryons disutent, tentent de nous convaincre qu’en réalité les Palestiniens ne « méritent » pas d’avoir leur propre Etat. L’intifada et les attentats suicide justifient mille fois les 37 années d’occupation de leurs terres. Des crimes contre les Palestiniens? Certainement pas. Les criminels sont les Palestiniens.

Ca rappelle beaucoup les discussions sur les noirs qu’il y a vingt ou trente ans, j’avais avec des gens que je connaissais en Afrique du Sud. Les mêmes clichés, les mêmes préjugés, la même étroitesse d’esprit. On fait régulièrement des enquêtes d’opinion en Israël. Les Israéliens sont une majorité pour penser que les Arabes sont des gens « sales », « primitifs »,faisant peu de cas de la vie humaine et d’un naturel violent.Rehavam Ze’evi, ancien ministre du tourisme sous Sharon, avait proposé l’expulsion de tous les Arabes du territoire juif. Dans le plus pur style de l’apartheid. Même la presse juive l’avait traité de raciste. Ze’evi est mort en 2001, victime d’un attentat terroriste.

La liste d’exemples est longue qui démontre de manière claire qu’Israël, actuellement, continue à se prévaloir de pratiques propres à l’apartheid sud africain. « Il y a toujours eu des fanatiques pour exiger un Grand Israël, » explique Krausz, survivant de l’holocauste qui réside à Johannesbourg. « Il y a des types, des tarés, il n’y a pas d’autre mot, qui insistent pour prouver que c’est dans la Bible; cette terre est à nous, par la volonté divine. C’est du fascisme. »

Hirsch Goodman avait décidé d’émigrer en Israël. C’était il y a trente ans, peu après avoir terminé son service militaire (obligatoire en Afrique du Sud). Son fils, après avoir achevé son service dans l’armée israélienne a émigré en Afrique du Sud. « L’armée l’avait envoyé dans les territoires occupés et il dit qu’il n’oubliera jamais ce qu’on l’a obligé à faire, » déclare Goodman qui travaillait comme analyste des systèmes de sécurité à l’université de Tel Aviv. Selon lui, le terme « apartheid » est peut être un peu exagéré. « Si Israël persiste à vouloir se maintenir dans les territoires occupés, sans doute devrons nous accepter ce terme. Nous ne pourrons alors plus parler d’Etat démocratique. Ce qui arrivera alors seront des formes distinctes de développement et la discrimination systématique dans tous les domaines: éducation, santé, légal. Mais on ne peut pas dire aujourd’hui que nous pratiquons l’apartheid alors que 76 % de la population d’Israël désire sincèrement un accord avec le peuple palestinien. Il est vrai que nous discriminons les Arabes, ceux qui sont venus d’Ethiopie et d’autres, mais ce n’est pas pour autant qu’on peut nous coller l’étiquette de racistes. Je déteste qu’on banalise le mot apartheid. C’est quelque chose de trop affreux. »

‘Footnotes in Gaza’ un reportage en bandes dessinées de Joe Sacco

28 décembre 2009
Le dessinateur Maltais, établi aux Etats Unis, Joe Sacco a inventé il y a quelques années une nouvelle façon d’envisager le métier de dessinateur de presse pour le transformer en véritable méthode journalistique. C’est-à-dire que ses dessins ne se contentent pas de restituer de manière synthétique, éventuellement drôle, la caractéristique marquante d’un événement mais deviennent un élément constitutif de la narration des résultats d’enquêtes journalistiques approfondies.
Vous trouverez ici plus d’informations sur la biographie et le parcours professionnel de Joe Sacco. Et là, une interview intéressante de ce journaliste. Le site de Philip Weiss vous propose lui plusieurs planches extraites de ce nouvel ouvrage de Joe Sacco.
Le travail de Sacco a déjà eu un impact substantiel sur la perception du conflit palestino-sioniste aux Etats Unis puisqu’un précédent ouvrage sur la question avait déjà rencontré un grand succès dans ce pays. Son nouveau livre sur Gaza semble destiné à prendre le même chemin et l’article de Patrick Cockburn que je vous propose nous dit pourquoi. Cockburn explique aussi pourquoi un tel travail peut rarement trouver sa place dans les grands médiats alors même qu’il est effectué par des personnes qui collaborent habituellement avec la grande presse.
Mais la principale leçon à retenir, c’est qu’à la hasbara (pédagogie de propagande sioniste), il suffit le plus souvent d’exposer les faits dans leur dimension historique. Exactement ce qu’a fait Joe Sacco.
Important: ce livre a été traduit en français et sera bientôt disponible sous le titre: ‘Gaza 1956, en marge de l’histoire’
‘Ils ont planté la haine dans nos cœurs’
par PATRICK COCKBURN, New York Times (USA) traduit de l’anglais par Djazaïri
Ce livre important et saisissant sur deux massacres longtemps oubliés de Palestiniens à Gaza se signale comme un des rares ouvrages contemporains sue l’affrontement israélo-palestinien  susceptibles de résister à l’épreuve du temps.
Sacco aura des lecteurs pour « Footnotes in Gaza » pendant de nombreuses années en raison du format et du style unique de son récit en bandes dessinées. Il a une place à part comme dessinateur de presse parce que son aptitude à raconter une histoire à travers son art se combine à un journalisme d’investigation de la plus haute qualité.
Dans le cas présent, son thème se rapporte à deux massacres qui se sont produits il y a plus de cinquante ans, qui avaient peu éveillé l’attention internationale et ont été oubliés en dehors des proches immédiats des victimes. Les tueries avaient eu lieu pendant la crise de Suez de 1956, quand l’armée israélienne avait investi la bande de Gaza, peuplée en grande majorité de réfugiés palestiniens. D’après les chiffres de l’ONU, 275 Palestiniens avaient été tués dans la ville de Khan Younes à l’extrême sud de la bande de Gaza le 3 novembre et 111 avaient péri le 12 novembre  à Rafah, à quelques kilomètres de la frontière avec l’Egypte pendant une opération de l’armée israélienne. Israël avait insisté sur le fait que les palestiniens avaient été tués alors que les forces israéliennes rencontraient encore une résistance armée. Les Palestiniens avaient affirmé que toute résistance avait cessé à ce moment là.
Sacco fait l’excellente remarque que ce genre d’épisodes fait partie des véritables éléments constitutifs de l’histoire. Dans cette affaire, les récits des événements ont transpiré lentement et ont été éclipsés par des développements ultérieurs de la crise de Suez. Sacco dont la réputation de dessinateur de presse  a été assise avec « palestine » et « Safe Area Goradze, » les a sauvés de l’oublis parce qu’ils sont « comme ces innombrables tragédies historiques à travers les âges qui ont à peine le statut de notes de pied de page dans le grand mouvement de l’histoire – même s’ils… renferment souvent les germes de la souffrance et de la colère qui modèlent les événements actuels. »
Les gouvernements comme les médiats oublient que les atrocités restent vivantes dans la mémoire de ceux qui ont été les plus directement touchés. Sacco montre Abdel Aziz El-Rantissi – un dirigeant du Hamas (qui sera plus tard tué par un missile israélien) qui avait 9 ans en 1956 et vivait à Khan Younes – en train de décrire comment son oncle a été tué: « J’en ai gardé une plaie qui ne pourra jamais dans mon cœur, » dit-il. « Je vous raconte cette histoire et je suis au bord des larmes… Ils ont planté la haine dans nos cœurs. »
La vivacité et le rythme des dessins de Sacco, combinés à une narration très informée et intelligente, racontent extrêmement bien cette histoire. En fait, ils est difficile d’imaginer comment une autre forme de journalisme aurait pu rendre ces événements aussi intéressants. De nombreux journalistes de la presse écrite ou audiovisuelle comprennent que les racines de la crise actuelle plongent dans des événements obscurs, peu connus. Mais ils reconnaissent aussi que leurs rédacteurs en chef sont plus intéressés par ce qui est nouveau et ont tendance à écarter les détours par l’histoire comme de l’auto-satisfaction journalistique susceptible d’ennuyer et d’embrouiller le public.
En fait, « Footnotes in gaza » prend sa source dans de préjugé éditorial contre l’histoire. Au printemps 2001, Sacco et Chris Hedges (enciennement correspondant à l’étranger pour le New York Times) faisaient un reportage pour Harper’s Magazine sur les Palestiniens de Khan Younes pendant les premiers mois de la seconde Intifada palestinienne. Ils pensaient que les tueries de 1956 participaient à l’explication de la violence survenue près de 50 ans plus tard. C’était peut-être prévisible, mais les paragraphes sur cet ancien massacre fut coupé [avant publication].
Les rédacteurs en chef Américains n’étaient pas les seules personnes à trouver hors de propos leurs recherches historiques. Quand Sacco revint à Gaza en 2002 et en 2003 pour rechercher des survivants et des témoins, alors que les forces israéliennes occupaient encore ce territoire, de jeunes palestiniens ne parvenaient pas à comprendre son intérêt pour ces événements passés alors qu’il y avait tant de violence à l’époque présente.
La recherche tenace par Sacco de témoins oculaires Israéliens et palestiniens ainsi que de documents israéliens et de l’ONU est impressionnante. Il donne des détails sur la vie de ceux qui l’ont aidé, notamment Abed, son traducteur-interprète, et ramène à la vie deux époques de la bande de Gaza, ses villes pleines de réfugiés au début des années 1950 comme elles le sont encore aujourd’hui.
L’atmosphère était emplie de haine. Peu de dirigeants Israéliens on marqué une quelconque empathie pour la tragédie palestinienne. Mais début 1956, Moshe Dayan, le chef d’Etat Major israélien prononça un discours célèbre aux funérailles d’un commandant Israélien tué à la frontière avec Gaza. Qu’est-ce qui, demandait Dayan, expliquait la « terrible haine contre nous » des palestiniens? Puis il répondit à sa propre question: « Depuis huit ans maintenant ils se trouvent dans des camps de réfugiés à Gaza et ont vu comment, sous leurs propres yeux, nous nous sommes appropriés leurs terres et leurs villages, où eux et leurs ancêtres habitaient auparavant. » Il ajouta que les Israéliens devaient être « prêts et en armes, agressifs et durs. »
La signification concrète de ces propos deviendra claire lorsque les troupes israéliennes investiront Gaza six mois après. Les tueries de Khan Younes furent assez sommaires, selon des témoins oculaires et de quelques survivants. On ordonna aux hommes de la ville de s’aligner sur la place principale et on leur tira dessus jusqu’à ce que leurs corps gisent dans une longue rangée. Certains restés à leur domicile furent tués chez eux.
L’épisode de Rafah fut plus compliqué et se déroula dans le courant de la journée, quand des gens furent amenés dans une école pour que les Israéliens puissent déterminer s’ils étaient des guérilleros ou des soldats [de l’armée égyptienne]. Ici il y eut bien plus de survivants qu’à Khan Younes; ces derniers décrivent comment certains ont été abattus sur le trajet vers l’école et d’autres battus à mort avec des bâtons au moment où ils entraient dans la cour. L’armée israélienne avait nommé deux officiers pour mener une enquête sur « lincident de Rafah, » ainsi que le qualifiait un communiqué top secret ‘Le même communiqué disait que 40 à 60 personnes avaient été tuées et 20 blessées). Le chercheur mandaté par Sacco n’a trouvé aucun rapport d’enquête dans les archives de l’armée.
Gaza a changé radicalement depuis l’enquête de Sacco. En 2005, Israël a unilatéralement démantelé les colonies juives et retiré ses soldats tout en maintenant un contrôle strict des frontières de Gaza. En 2007, le Hamas a pris le contrôle de gaza et en 2008 – 2009 l’enclave a été soumise à une attaque israélienne dévastatrice. Dans ce flot déconcertant d’événements, l’enquête de Sacco sur ces massacres vieux d’une cinquantaine d’années est un des guides les plus sûrs pour comprendre la haine avec laquelle Palestiniens et israéliens s’affrontent.

Arthur Ruppin, le "père de la colonisation sioniste" de la Palestine était un vulgaire Nazi!

11 octobre 2009
Je n’avais jamais entendu parler d’Arthur Ruppin. Or, cet Arthur Ruppin est une figure très importante du sionisme et il a eu un rôle décisif dans la colonisation de la Palestine.

Wikipedia vous apprendra un certain nombre de choses à son sujet, mais rien de ce dont je veux vous parler maintenant.

C’est qu’Arthur Ruppin n’était pas seulement un avocat et sociologue. Wikipedia nous parle bien de son activité intellectuelle et académique mais omet de nous dire que Ruppin était d’abord un savant fou comme seuls le nazisme et le sionisme ont pu en engendrer.

En réalité, Arthur Ruppin était tout simplement un nazi Juif dont une bonne part de l’activité de recherche a consisté à démontrer que, à l’origine, les Juifs ne sont pas des Sémites et que la partie de la population juive qui correspond le mieux à ce type non sémite est la poulation des Juifs Ashkénazes d’Europe orientale.

Seul le métissage des Juifs primitifs avec les Sémites en a fait ce qui correspond à la description par les stéréotypes antisémites : des gens cupides et sans enracinement.

Heureusement, les travaux de Ruppin associés à l’eugénique se proposent de rétablir l’authentique race juive qui fait partie se la souche Indo-Allemande !

Et Ruppin était peut-être un savant fou, mais il fut aussi un sioniste efficace qui a influencé bon nombre de personnalités sionistes. Et on le considère comme le « père de l’installation sioniste » en Palestine. Pas moins.

La fabrique de l’Histoire / Revisiter Arthur Ruppin

par Tom Segev, Haaretz (Sionistan) 8 octobre 2009 traduit de l’anglais par Djazaïri

Arthur Ruppin, un avocat et sociologue né en Allemagne, est considéré comme le père de la colonisation nationale sioniste sur le sol d’Israël, qui a commencé en 1908. Entre autres choses, il était impliqué dans la création du kibboutz Degania et dans les premiers développements de Tel Aviv, il figurait parmi les fondateurs de la banque Hapoalim et jusqu’à son décès en 1943, il fut un des grands dirigeants de l’entreprise sioniste. Il fut aussi un des pères de l’éducation hébraïque et de la culture hébraïque en général ; en fait, sa façon de penser influença la vision du monde de Moshe Dayan et d’autres personnalités.

Tout cela est bien connu. Ce qui l’est moins, est la conviction de Ruppin que la réalisation du sionisme exigeait la « pureté raciale » chez les Juifs. Ses conceptions étaient inspirés en partie par les travaux de penseurs antisémites, dont certains des idéologues nazis.

Après l’holocauste, l’historiographie israélienne a tendu à minimiser autant que possible cette information embarrassante – ou même à l’ignorer complètement. Cependant, voici quelques semaines, l’université de Tel Aviv a accepté la thèse de doctorat d’un chercheur nommé Ethan Bloom, qui a découvert, entre autres, que non seulement Ruppin avait été influencé par les théories qui ont engendré le nazisme, mais qu’il avait aussi influé sur leur formulation.

Bloom a découvert que Ruppin avait eu « une influence déterminante » sur la perception par les Allemands des Juifs comme une race. Par exemple, des travaux de Ruppin, dont certains effectués à l’université Hébraïque, proposaient une explication à l’avarice supposée des Juifs : il postulait que les Juifs qui vivaient à l’origine sur la terre d’Israël avant la destruction du premier temple, et s’étaient lancés dans l’agriculture, appartenaient en réalité à des tribus non sémitiques. A un moment sonné, ils commencèrent à se mêler à des tribus sémitiques, ce qui a compromis leur pureté raciale et les a affaiblis. L’élément sémitique commençant à devenir dominant, cela incita les Juifs à abandonner l’agriculture et à développer des instincts commerciaux, une plus grande cupidité et une avidité incontrôlable.

Ruppin pensait que ces défauts pouvaient être corrigés, et la première tâche qu’il exigeait de l’entreprise sioniste était par conséquent d’identifier ce qui restait du groupe de Juifs « originel » ou « authentique » – ceux ayant un lien direct, biologique avec les anciens Israélites racialement purs. Il croyait qu’on les découvrirait parmi les Juifs ashkénazes d’Europe orientale.

A cette époque, les Juifs d’Europe étaient au milieu d’un processus d’assimilation tandis que, selon Ruppin, les Juifs Mizrahim et Séfarades (du Proche Orient et d’Afrique du Nord) subissaient une atrophie biologique, qui jetait le doute sur leur identité en tant que partie de la race juive. Ce ne fut donc qu’après une longue hésitation qu’il autorisa qu’on amène des travailleurs Juifs du Yémen ; il affirmait en outre qu’il n’y avait pas de Juifs noirs.

C’est ainsi, selon Bloom, que la discrimination contre les Mizrahim a pris racine en Israël à l’époque. Contrairement aux idées reçues, affirme-t-il, le phénomène n’est pas né d’une « incompréhension culturelle » mais plutôt d’une planification culturelle basée sur des théories raciales. Selon Bloom, c’était un cas de racisme entre juifs, d’une dimension antisémite dans la culture hébraïque moderne. Certaines des idées de Ruppin s’insèrent dans le discours intellectuel qui prévalait à l’époque, qui vantait la pureté raciale et traitait abondamment d’eugénique, le mouvement visant à améliorer la qualité génétique de l’humanité. La croyance en la théorie que les Ashkénazes étaient le type juif achevé à l’ère moderne permettait à Ruppin d’accepter la théorie raciale allemande et de soustraire la majorité des Juifs à la catégorie des Sémites. En réalité, selon sa conception, les Juifs originels, « sains »qui étaient auteurs des aspects les plus vertueux de la culture juive faisaient partie, en termes raciaux, des Indo-Allemands.

Quelques mois après l’arrivée des nazis au pouvoir en 1933, Ruppin eut une conversation amicale avec Hans Guenther, un des principaux propagateurs de la théorie raciale nazie. La rencontre avait pour but, entre autres choses, de faire avancer les négociations entre le mouvement sioniste et les autorités nazies pour un accord qui permettrait aux Juifs d’Allemagne d’immigrer en Palestine et d’y transférer une partie de leurs biens.

Ruppin apparait, à travers les découvertes de Bloom, comme un individu intellectuellement et psychologiquement complexe qui, des années plus tard, se conduira assez bizarrement. Il photographiait des « types juifs, » mesurait des crânes, comparait des empreintes digitales et pensait qu’il était possible de classer les Juifs Ashkénazes en diverses sous catégories raciales en fonction de la forme de leurs nez. Peu de temps avant sa mort, il terminait une étude comparative sur ce dernier sujet, comparant des personnalités de premier plan du mouvement sioniste – à commencer par Théodore Herzl lui-même, dont Ruppin définissait le nez comme « assyrien-boukharien ». Il définissait le nez d’un juif nommé Jacob Feitlowitz, qui était né en Pologne et avait étudié l’histoire des Juifs Ethiopiens, comme « ashkénazi-négroïde. » Selon Bloom, Ruppin croyait apparemment que l’intérêt de Feitlowitz pour les Ethiopiens témoignait de son attrait pour « sa propre espèce. »

La thèse de doctorat en question est fascinante et parlante. Elle a été rédigée en anglais, sous la supervision d’Itamar Even-Zohar de l’université de Tel Aviv et de l’historien Américain Sander Gilman. Bloom dit ne pas être particulièrement heureux de faire aussi partie de cette histoire. Il s’inquiète des réactions que son travail pourrait provoquer, mais défendra ce qu’il a écrit. De fait, il a déclaré cette semaine : « C’est la vérité.»


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