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De la guerre à la guerre: l’absence de volonté de stopper la montée en puissance du nazisme

14 novembre 2021

L’histoire et une discipline en évolution comme toutes les disciplines scientifiques ainsi qu’en témoignent ces notes de lecture d’un ouvrage d’historien relatif à la genèse de la seconde guerre mondiale.

Ainsi que le montre l’historien britannique Jonathan Haslam, les germes de la seconde guerre mondiale étaient présents avant la fin de la première et peuvent être datés de la révolution communiste en Russie.

Haslam rappelle qu’avant même la fin de la première guerre mondiale, les «alliés» avaient attaqué militairement la Russie soviétique et il donne notamment l’exemple du débarquement de soldats anglais à Mourmansk en juillet 1918 qui, prétextant la prise en tenaille des forces allemandes visaient en réalité les forces communistes.

Comme on le sait, la résistance militaire à la révolution communiste dura jusqu’en 1922 avec par moments un soutien direct des troupes britanniques, françaises, belges etc.

C’est cette étape de l’histoire de la république soviétique qui fut déterminante pour Haslam puisqu’elle a amené les autorités de Moscou à se rapprocher de la république de Weimar qui était, comme il le dit, l’autre paria du continent européen.

Un autre aspect qui a joué un rôle important a été l’hostilité du Komintern à toute alliance entre communistes allemands et socio-démocrates. Or une telle alliance aurait pu empêcher l’arrivée au pouvoir d’Hitler.

Enfin, ce point est bien connu généralement, l’hostilité des dirigeants français ou britanniques à l’égard du communisme était bien plus forte que celle qu’ils éprouvaient à l’égard du régime nazi quand ils ne trouvaient pas ce dernier tout à fait fréquentable.

La leçon à tirer de ce travail est qu’il ne faut pas seulement s’intéresser aux processus politiques mais aussi aux intentions qui orientent l’action politique, intentions qui demandent à être explicitées par l’historient aussi bien dans leur définition originale que dans leurs évolutions et leurs effets imprévus et/ou imprévisibles.

Comment la peur du communisme a conduit à l’ascension d’Hitler, du nazisme et à la Seconde Guerre mondiale

Le livre de Jonathan Haslam est un correctif mais aussi une critique de la pratique de l’histoire des relations internationales.

Par Rudrangshu Mukherjee, The Wire (Inde) 5 novembre 2021 traduit de l’anglais par Djazaïri

En 1848, dans l’inoubliable première ligne du Manifeste communiste, Karl Marx écrivait : « Un spectre hante l’Europe – le spectre du communisme.»  Ce même spectre était revenu hanter l’Europe dans la période de l’entre-deux guerres.

Le livre merveilleux de Jonathan Haslam, «Le spectre de la guerre» – fruit de recherches minutieuses dans diverses archives à travers le monde et analytiquement provocateur – étudie comment le triomphe de la révolution bolchevique en Russie et la propagation de l’idée d’une révolution internationale par Lénine et Trotsky ont eu un impact impact profond sur les décideurs politiques dans les chancelleries européennes. Sans une compréhension de cette dimension, toute analyse de la façon dont les puissances occidentales considéraient l’ascension vers le pouvoir d’Hitler et le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale serait, selon Haslam, incomplète et appauvrie.

Le livre de Haslam est à un certain niveau un correctif, mais à d’autres niveaux, il fournit également de nombreux faits et idées originaux, et il fait également une critique de la manière dont l’histoire des relations internationales est pratiquée.

Le récit rompt avec le cadre chronologique conventionnel consistant à placer la Seconde Guerre mondiale dans le contexte de ce qui s’est passé dans les années 1930. Il commence au lendemain de la Première Guerre mondiale et de la révolution en Russie. Cette dernière était inextricablement liée au sort de la Russie tsariste au cours de la grande guerre.

La Première Guerre mondiale a bouleversé le système des relations internationales tel qu’il existait jusqu’au déclenchement du conflit. Le triomphe des bolchéviques a ajouté une nouvelle dimension. Le mouvement communiste avait toujours propagé l’idée que la révolution communiste serait mondiale – « Travailleurs de tous les pays,s unissez-vous!» était son cri de ralliement. La direction bolchevique qui suivait cette ligne idéologique était attachée à l’idée que la révolution en Russie ne serait pas et ne pourrait pas être un phénomène historique isolé. Ce serait le premier pas vers des révolutions qui balayeraient le capitalisme et toutes ses manifestations – empire et colonies – partout dans le monde.

De plus, les bolchéviques croyaient que le succès dans la durée de la révolution en Russie reposait sur la révolution en Allemagne qu’ils croyaient imminente. Une révolution mondiale était donc intrinsèque à l’idéologie du communisme et faisait donc partie intégrante de la politique et de la propagande bolcheviques. Ils créèrent le Komintern comme instrument pour faire avancer l’agenda d’une révolution mondiale.

Les décideurs politiques et les faiseurs d’opinion en Europe avaient compris le danger posé par la révolution en Russie presque dès ses débuts. Dès 1919, le Times de Londres lançait un appel aux puissances occidentales pour qu’elles affrontent le « danger de l’impérialisme bolcheviste ». Il y eut, cependant, des actions plus concrètes pour contrecarrer l’avancée de la révolution.

Haslam écrit : « Des troupes britanniques débarquèrent à Mourmansk, un port libre de glace sur la mer de Barents, fin juillet [1918]. En apparence, ces forces avaient été envoyées pour repousser les Allemands. Mais leur objectif réel devint vite évident. Au lieu de marcher vers l’ouest jusqu’aux positions allemandes en Finlande, elles marchèrent vers le sud pour attaquer les soldats de la révolution à Petrograd  [aujourd’hui Saint Petersbourg, NdT ]. Ce fut le premier acte de la guerre d’intervention alliée qui commençait, une guerre non déclarée qui pendant 18 mois fut justifiée par les alliés avec des arguments de plus en plus invraisemblables et contradictoires. Cette guerre a englouti le régime révolutionnaire et a servi de base à la répression impitoyable exercée par Lénine et Trotsky contre les forces de la contre-révolution, au démantèlement des conseils ouvriers, à de sévères restrictions des libertés et au déclenchement de la Terreur rouge.

Au cœur de l’Europe, le projet d’une révolution internationale n’avançait pas. En Allemagne, les tentatives d’insurrection  échouèrent ; les forces de gauche étaient divisées entre les communistes et les sociaux-démocrates ; et ce qui était pire, comme le révèle Haslam, le gouvernement bolchevique négociait secrètement avec celui de Weimar sur le commerce et le réarmement de la Russie. (Pour des raisons de realpolitik , le régime d’idéologie bolchevique   était prêt à ignorer le fait que le gouvernement de Weimar avait réprimé l’insurrection spartakiste et le soulèvement de Munich en utilisant les pires éléments des corps francs qui avaient assassiné des dirigeants communistes comme Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht.)

Les deux parias de l’Europe – l’Allemagne et la Russie – s’étaient ainsi rapprochés. En Italie, la révolution avait échoué et  conduit à la montée en puissance de Mussolini et du fascisme. L’Europe chancelait au bord de l’incertitude et de l’inattendu. L’approche communément admise dans les cercles de pouvoir à Washington, Londres et Paris était que le bolchevisme devait être contenu et qu’on ne pouvait pas permettre un effondrement de l’Allemagne. L’étroite coopération militaire entre Moscou et Berlin était censée être secrète mais des rumeurs à son sujet circulaient. Ces rumeurs rendaient les Britanniques soucieux de reconquérir les sympathies allemandes « presque à n’importe quel prix ».

L’état d’esprit dominant a été résumé ainsi par Alexander Cadogan, sous-secrétaire permanent au ministère des Affaires étrangères : « Certains oublient les années, disons 1920-26, où le seul danger était le ‘bolchevisme’. Dans ces circonstances, l’inattendu incarné par Adolf Hitler était apparu comme une force puissante.

Hitler et le Nazisme

Alors que la perspective d’une révolution européenne s’éloignait, les bolcheviks tournèrent leur attention vers l’Asie, ce qui signifiait s’intéresser aux colonies de l’Empire britannique. Trotsky avait affirmé que « la route vers Paris et Londres passe par l’Afghanistan, le Pendjab et le Bengale». L’Inde était devenue le terrain principal de l’activité révolutionnaire menée sous les auspices du Komintern qui, comme Lénine le soutenait avec candeur, était distinct du gouvernement russe. Toute l’étendue de l’implication du Komintern dans les révolutions à l’Est a été révélée aux Britanniques d’une manière extraordinaire.

En avril 1927, avec la connivence du corps diplomatique, les troupes de Chang Tso-lin, le seigneur de la guerre du nord, effectuèrent un raid contre l’ambassade soviétique à Pékin. Ce faisant, ellse découvrirent quantité de preuves de l’implication de Moscou, y compris financière, dans l’incitation à la révolution dans les colonies britanniques. Ceci, combiné à la grève générale de 1926,  donna à l’anticommunisme en Grande-Bretagne « une force vitale qui lui était propre ».

Harold Nicolson l’a clairement expliqué dans un document ministériel : « … le problème russe est pour le moment asiatique plutôt qu’européen… elle [la Russie] est suspendue comme un nuage d’orage à l’horizon oriental de l’Europe – imminente, impondérable… elle est en fait la plus menaçante de nos incertitudes.»

La méfiance à l’égard de l’Union soviétique au sein de l’establishment britannique était viscérale.

Au sein de l’Union soviétique, après la mort de Lénine en 1924, le pouvoir politique s’est concentré entre les mains de Staline qui, contrairement à Lénine et Trotsky, était convaincu que la construction du socialisme dans un seul pays était non seulement possible, mais devait également être la priorité absolue de l’Union soviétique.  Il élimina toute opposition au sein du parti et s’engagea dans une politique de collectivisation forcée de l’agriculture et de plans quinquennaux d’industrialisation.

Staline, Lénine et Trotsky

Cela ne veut pas dire que Staline avait supprimé le Komintern. Haslam note que la victoire du Parti travailliste (en coalition avec le Parti libéral) aux élections législatives britanniques de mai 1929 avait été en partie rendue possible par une subvention soviétique secrète. Staline avait également rendu impossible toute alliance entre le Parti communiste allemand et les sociaux-démocrates en qualifiant ces derniers de « socio-fascistes ». La division de la gauche eut des conséquences inquiétantes. L’influence et les positions électorales de la gauche diminuèrent, ce qui a permis à un régime autoritaire sous Heinrich Bruning de gouverner par décret d’urgence, ouvrant ainsi la voie à l’accession d’Hitler au pouvoir et à ce qui s’ensuivit.

Les décideurs politiques britanniques se trouvèrent confrontés à un paradoxe. D’un côté, il y avait la Russie soviétique, « un pays aux capacités militaires offensives manifestement faibles » et de l’autre l’Allemagne nazie, « un État armé jusqu’aux dents et à la rhétorique belliqueuse ». Les décideurs politiques choisirent cette dernière de préférence à l’Union soviétique dont la puissante idéologie menaçait tout ce que les classes dirigeantes de Grande-Bretagne considéraient comme précieux et « civilisé ».

Hitler et le nazisme n’étaient pas très agréables mais plus acceptables parce que les classes dirigeantes britanniques croyaient partager avec Hitler certaines croyances fondamentales. Du moins, il était moins menaçant. Selon les mots de Haslam, « … au lieu de s’inquiéter du fascisme, l’élite britannique s’inquiétait davantage de ce qui ne le remplacerait probablement pas – le communisme – si le fascisme était déstabilisé et renversé ». Qu’étaient les classes dirigeantes de Grande-Bretagne ? « Les chevaliers du royaume », les appelle Haslam, scolarisés dans de prestigieuses  écoles privées et dans les facultés d’Oxford et de Cambridge

L’un de ces chevaliers – Nevile Henderson, ambassadeur à Berlin – avait fait remarquer que « la Grande-Bretagne ne devrait pas être considérée comme une démocratie mais comme une aristocratie ». Il en était. Si la bataille de Waterloo, comme l’avait déclaré de manière inoubliable Wellington, a été gagnée sur les terrains de jeu d’Eton, les mêmes terrains de jeu ont rendu possible le succès d’Hitler et l’holocauste qui a suivi.

Un motif sous-jacent de cette préférence était l’hypothèse qu’Hitler était un leader raisonnable avec des objectifs et des ambitions limités qui pourraient être contenus en temps voulu par des concessions territoriales. En revanche, les aspirations du communisme étaient mondiales. Robert Hadlow, alors premier secrétaire à l’ambassade à Vienne, avait affirmé avec une grande clarté qu’affaiblir Hitler aurait pour résultat  une Allemagne communiste « dirigée par des hommes totalement déraisonnables – ce que n’est pas Hitler selon moi. Je préfère aider Hitler que risquer une alternative pire à sa place. L’évaluation formulée par Hadlow était partagée par des membres influents de l’élite britannique, des hommes qui dînaient et se divertissaient dans leurs maisons de campagne et leurs clubs urbains et se faisaient servir du champagne par des valets en livrée.

Du côté soviétique, les réactions à la montée et au succès d’Hitler étaient . Staline  restait silencieux sans s’exprimer publiquement ». Il y avait des voix influentes au sein du Komintern qui soutenaient que la montée au pouvoir d’Hitler était « un phénomène passager ». Ce genre d’opinion était quelque peu prévisibles puisque la politique du Kominter, en érigeant des barrières entre les communistes et les sociaux-démocrates, avait facilité l’ascension d’Hitler ; et de plus, admettre que le gouvernement nazi avait un long avenir serait une reconnaissance directe que toute l’analyse concernant le capitalisme en crise était erronée.

Une conséquence immédiate de l’arrivée au pouvoir d’Hitler fut l’élimination du mouvement communiste et d’innombrables communistes en Allemagne. De ces circonstances est née l’idée du Front populaire. Mais pour ceux qui étaient opposés à l’Union soviétique et craignaient sa force militaire et industrielle croissante et ses intentions idéologiques, le Front populaire ne fit que renforcer leur perception d’une menace communiste.

Georgi Dimitrov, l’un des principaux idéologues du Front populaire, indiquait clairement que « le but de notre lutte contre le fascisme n’est pas le rétablissement de la démocratie bourgeoise mais la conquête du pouvoir soviétique ». Pour les « chevaliers du royaume », le Front populaire représentait l’opposition au fascisme et une menace pour le capitalisme et la démocratie bourgeoise. On ne pouvait pas faire confiance à l’Union soviétique, mais on pouvait l’accorder à Hitler car il était supposé être un homme raisonnable qui, plus important encore, était opposé au communisme.

C’est ce contexte qui détermina la politique d’apaisement que Neville Chamberlain a défendue et pour laquelle il a ensuite été cloué au pilori. En réalité, Chamberlain suivait une politique qui était étayée par des convictions partagées par des sections importantes et influentes de l’intelligentsia et de la classe dirigeante en Grande-Bretagne. La nouvelle du pacte nazi-soviétique signé en août 1939 ne fit qu’intensifier l’anti-bolchevisme des «pacificateurs» – selon les termes de Haslam, le pacte  «a agi comme un accélérateur pour les pacificateurs purs et durs »

Arthur Rucker, fidèle secrétaire particulier de Chamberlain, a déclaré à son collègue John Colville : « Le communisme est maintenant le grand danger, plus grand encore que l’Allemagne nazie. De telles évaluations se sont trouvées justifiées lorsque la Russie s’est emparée de l’est de la Pologne. Face à deux systèmes maléfiques, Chamberlain et ses semblables ont choisi ce qu’ils considéraient comme le moindre mal. Ce à quoi ils n’avaient pas pensé, c’est qu’Hitler était « trop impatient pour attendre ce que les Britanniques avaient à offrir ». Le 1er septembre 1939, les chars et les troupes allemands pénétrèrent en Pologne. Deux jours plus tard, lorsque l’Allemagne ne répondit pas à un ultimatum de la Grande-Bretagne, cette dernière déclara la guerre à l’Allemagne. L’illusion douillette de l’apaisement s’était transformée en une danse de la mort.

À travers son analyse, Haslam met en évidence certaines caractéristiques de la compréhension des relations internationales qu’il juge inadéquates. L’une d’elles est la propension des historiens diplomatiques « à accorder plus d’attention au processus qu’à l’objectif, recherché en supposant que le motif est connu et immuable car tout suit inexorablement son cours géopolitique habituel». Ce mode d’analyse est associé à AJP Taylor qui, dans ses deux livres remarquables et très influents, The Struggle for Mastery in Europe et The Origins of the Second World War, a soutenu que les résultats finaux dans les relations internationales sont le fruit d’un enchaînement incontrôlable d’événements.

Haslam montre que dans l’entre-deux-guerres, les hommes d’État ont fait des choix délibérés et ces choix ont été informés par certaines perceptions/hypothèses qui à leur tour étaient fondées sur des préjugés idéologiques et des intérêts de classe. Haslam introduit ainsi l’importance des idées qui « explicitent les finalités du pouvoir ». Les finalités du pouvoir dans la période analysée par Haslam étaient « divergentes et contestées ».

Ainsi, il estime que la politique étrangère de l’entre-deux-guerres ne peut s’expliquer selon les principes traditionnels puisque « les politiciens et les diplomates en sont venus à craindre davantage le pouvoir insidieux des idées que les composantes mesurables des capacités militaires». Ils préféraient donc l’Allemagne nazie à la Russie soviétique.

Le travail universitaire et savant  de Haslam fait immédiatement penser au roman Les restes du jour de Kazuo Ishiguro qui a recréé l’ambiance sociétale et intellectuelle qui a produit le phénomène d’apaisement. Toute l’histoire est racontée par la voix d’un majordome qui surprend et enregistre les conversations qui se déroulent dans les somptueuses salles à manger et les salles de réception des maisons de campagne appartenant à des aristocrates anglais. Les artistes créatifs ont souvent une meilleure connaissance de l’histoire que les historiens qui fouillent dans des dossiers poussiéreux et attendent l’accès à des archives fermées.

Il n’y a pas eu de meilleure représentation de la société russe à tous les niveaux – la cour tsariste, la vie de la noblesse, les souffrances et les fêtes des serfs et des paysans et du champ de bataille empestant la poudre des armes à feu et les cadavres – que Guerre et Paix . En Inde, la nature multiforme du mouvement national a été saisie de manière poignante dans The Home and the World de Tagore .

Rudrangshu Mukherjee est professeur d’histoire et président de l’université Ashoka.

Le nazi qui avait voulu se convertir au judaïsme

23 décembre 2018

Les médias anglophones mainstream parlent bien de cette histoire d’un couple anglais qui a baptisé son fils Adolf en référence à Hitler et vient d’être condamné à de la prison ferme pour adhésion à un parti d’extrême droite illégal.

La presse française en parle aussi tout comme un journal francophone du Sionistan.

Mais ce journal sioniste d’expression française comme les autres grands médias anglophones tait un aspect de la biographie d’un des condamnés, à savoir Adam Thomas, le père du petit Adolf.

C’est en effet par la presse communautariste qu’on apprend que ce dernier a essayé de se convertir au judaïsme et même qu’il a une excellente connaissance de la Torah.

La démarche d’Adam Thomas n’étonnera que ceux qui ignorent ce qu’a fait l’entité sioniste de la religion juive. On sera par contre circonspect sur ce qui a motivé son exclusion de l’école religieuse qu’il fréquentait à Jérusalem. Adam Thomas était un simple agent de gardiennage, un profil peu favorable à l’aboutissement d’un processus de conversion.

Le néo-Nazi qui avait essayé de se convertir au judaïsme incarcéré pour son adhésion à la National Action

Par Ben Welch, The Jewish Chronicle (UK) 18 décembre 2018 traduit de l’anglais par Djazaïri

Le mois dernier, la Jewish Chronicle avait révélé qu’Adam Thomas avait passé plusieurs mois en Israël à l’époque où il essayait de se convertir au judaïsme, avant de rejoindre une organisation antisémite.

Un couple qui a baptisé leur bébé Adolf en référence à Hitler a été emprisonné après avoir été reconnu coupable d’appartenance à un parti néonazi illégal.

Adam Thomas, 22 ans, et Claudia Patatas, 38 ans, de Waltham Gardens à Banbury dans l’Oxfordshire, étaient parmi les six personnes condamnées par le tribunal de Birmingham pour appartenance à la National Action.

Mardi matin, Thomas a été condamné à six années et demi de prison et Patatas  cinq années

Les jurés ont pu entendre qu’ils avaient donné à leur bébé le prénom Adolf par « admiration » pour le dictateur nazi et qu’ils avaient décoré leur domicile avec des croix gammées et de l’iconographie du Ku Klux Klan.

Adam Thomas, 22, and Claudia Patatas, 38, holding a swastika flag whilst holding their baby

Adam Thomas, Claudia Patatas et le petit Adolf

Des photographies retrouvées dans leurs appareils électroniques montraient Thomas portant son jeune fils au domicile avec la robe à capuche du Ku Klux Klan.

Le mois dernier, la JC a révélé que Thomas avait séjourné plusieurs mois en Israël à l’époque où il essayait de se convertir au judaïsme, fréquentant même une yeshiva (école religieuse juive) à Jérusalem avant d’en être exclu.

Un porte-parole de la yeshiva Machon Meir avait dit à l’époque : « Nous confirmerons qu’il a essayé d’étudier au Département des Conversions de Machon Meir.

« Mais nous avions senti au bout d’un moment qu’il était vraiment bizarre. Ce n’était pas tout de suite évident. Il connaissait très bien la Torah, il avait un caractère doux et même assez agréable.

« Il avait une mémoire extraordinaire et était passionné par la connaissance de la Torah. Il avait aussi un côté sombre et une tendance à l’extrémisme. Quand ce côté est apparu, nous savions qu’il n’était pas digne des études de giur [conversion]. »

Machon Meir a confirmé que Thomas s’était inscrit sous le nom de « Avi Thomas », tandis que ses condisciples disaient qu’il se faisait appeler « Avi ben Abraham. »

Thomas et Patatas, qui est d’origine portugaise, ont été jugés en même temps que d’autres néo-nazis, Darren Fletcher, Daniel Bogunovic, Joel Wilmore et Nathan Pryke.

Dans une conversation avec un autre membre de la National Action, Patatas avait dit que « tous les Juifs doivent être mis à mort, » tandis que Thomas avait dit une fois à sa compagne qu’il « considérait qu’on ne pouvait pas tolérer les non blancs. »

En condamnant Patats, le juge Melbourne Inman a déclaré: « vous êtes aussi extrémiste que Thomas dans vos idées comme dans vos actions.

« Vous avez agi ensemble dans tout ce que vous avez pensé, dit et fait, en choisissant le prénom de votre fils et avec les photos troublantes de votre fils entouré de symboles du nazisme et du Ku Klux Klan. »

Le juge a dit de la National Action : « Ses buts et objectifs sont la mise à bas de la démocratie dans ce pays par de graves actes de violence et le meurtre, et l’imposition d’un Etat de type nazi qui éradiquerait des pans entiers de la société par cette violence et des tueries de masse.

« L’éradication de ceux que vous considérez comme inférieurs simplement à cause de leur couleur de peau ou de leur religion. »

Quoi, Hitler n’a pas fini le boulot? T’as pas honte Salomon de dire ça?

26 août 2014

Très récemment, plusieurs centaines de survivants et de descendants de survivants des camps de concentration de la seconde guerre mondiale ont acheté un espace d’écriture dans un grand journal américain pour faire part de leur condamnation des crimes commis par le régime sioniste à Gaza et pour appeler au boycott de l’entité sioniste .

Cet appel est passé relativement inaperçu en France (on ne se demandera pas pourquoi) mais a eu un écho significatif aux Etats Unis et auprès des communautés juives dans le monde, entité sioniste comprise.

En témoigne la réaction furieuse d’internautes « juifs » dont le webzine +972 nous livre quelques exemples,

On observera que ces réactions renvoient à un certain nombre de caractéristiques de la déportation des Juifs pendant la seconde guerre mondiale qui sont régulièrement occultées dans le discours destiné au grand public.

On peut relever par exemple la référence d’Itzik Levy aux « kapos » qui étaient les auxiliaires juifs des gardiens de prison allemands, sans qui ces derniers n’auraient jamais pu gérer ces immenses structures pénitentiaires. Il va sans dire que les « kapos » n’étaient pas toujours tendres, tant s’en faut, avec les détenus.

Brassard de kapo

Brassard de kapo

De son côté Yafa Ashraf nous rappelle la traditionnelle hostilité entre les Juifs ashkénazes et les autres qu’on regroupe généralement sous le vocable « séfarades » là où on devrait distinguer séfarades (espagnols) et mizrahim (orientaux).

Asher Salomon qui nous dit que le Fuhrer n’a pas fini le boulot est finalement d’accord avec Meir Dahan : pour eux ces Juifs (ou pseudo juifs) auraient dû tous périr dans les camps. Ce sont en effet des traîtres « gauchistes » ou « collaborateurs » du nazisme.

C’est pour ça qu’ils vivent à l’étranger, écrit Itzik Levy.

Une remarque qui n’est pas sans rappeler la démarche des sionistes à l’égard des Juifs parqués dans les camps de concentration dont la libération ne leur importait qu’à la condition que ces Juifs partent ensuite renforcer le peuplement juif de la Palestine.

Ce choix était énoncé clairement dès 1938 par David Ben Gourion, celui qu’on présente généralement comme le « père fondateur » de l’entité sioniste :

« Si je savais qu’il était possible de sauver tous les enfants d’Allemagne en les installant en Angleterre, ou juste la moitié en les installant en Eretz Israel, je choisirais cette deuxième solution. Car nous devons prendre en compte non seulement la vie de ces enfants, mais aussi l’histoire tout entière du peuple juif [33] Ibid., pp. 38-39. [33] ».

Sur Facebook, des Israéliens souhaitent la mort à des survvants de l’holocauste qui sont contre [l’opération] Bordure de Protection

par Ami Kaufman, +972 (Palestine occupée) 25 août 2014 traduit de l’anglais par Djazaïri

Non, ce n’est pas The Onion [équivalent américain du Gorafi].

Il y a quelques jours, quelques 300 survivants de l’holocauste [survivants et descendants de survivants en réalité) ont placé un encart payant dans le New York Times pour condamner le massacre à Gaza. Mon collègue de Local Call, John Brown, a sélectionné quelques réactions postées sur Facebook par des Israéliens en réponse à cet encart.

J’ai fait quelques traductions [de l’hébreu] des morceaux choisis par John :

David Cohen: Ce ne sont pas des survivants de l’holocauste, ce sont probablement des collaborateurs avec les Nazis.

Shmulik Halphon: Il est prié de retourner à Auschwitz.

Itzik Levy: Ce sont des survivants qui étaient des kapos [auxiliaires juifs des Allemands dans les camps de concentration]. Des traitres gauchistes. C’est pour ça qu’ils vivent à l’étranger et pas dans l’Etat juif.

Vitali Guttman: Suffit, ils devraient déjà être morts. Ils nont survécu à l’holocauste seulement pour faire un autre holocauste à Israël dans l’opinion publique ?

Meir Dahan: Pas étonnant si Hitler a assassiné 6 millions de Juifs à cause de gens comme vous , vous n’êtes même pas juifs, vous êtes dégoûtants, une honte pour l’humanité et vos rejetons sont comme vous, des ordures.

Asher Solomon: C’est une honte, Hitler n’a pas fini le boulot.

Katy Morali: Des survivants de l’holocauste qui pensent ainsi sont priés d’aller mourir dans les chambres à gaz.

Yafa Ashraf: Nullards d’Ashkénazes, c’est vous les Nazis.

john

+972 est sur Facebook

Le sionisme et le régime nazi: un texte important de Klaus Polkehn enfin disponible en français

27 janvier 2013

J’ignore pourquoi les articles de Klaus Polkehn sur le sionisme n’ont jamais été traduits intégralement en français.

Cette lacune est maintenant en partie réparée puisque, après l’article sur les relations entre le mouvement sioniste et l’impérialisme, notamment allemand, dont je vous ai déjà livré la traduction, je vous propose un autre article qui tombe à point nommé en ce jour où les sionistes redoublent de condamnations morales, en attendant parfois des mesures plus pratiques, contre ceux qui selon eux ne prendraient pas assez au sérieux ce qu’ils appellent «holocauste» ou « shoah.»

Ne pas prendre au sérieux cet «holocauste,» c’est par exemple contester le chiffre officiel de 6 millions de Juifs tués pendant la deuxième guerre mondiale ou nier l’existence des chambres à gaz.

Mais c’est aussi situer le malheur des Juifs à l’époque dans une histoire commune des malheurs qui ont accablé et continuent à accabler l’humanité. C’et précisément l’erreur commise par le député Anglais David Ward qui provoque un tollé chez les sionistes parce que, adepte convaincu de la religion de l’holocauste, il pense être autorisé, au nom de principes universels, à critiquer les Juifs qui spolient et martyrisent le peuple palestinien. Les Juifs en question sont bien entendu les sionistes et personne d’autre.

Mais il est interdit de critiquer l’entité sioniste parce que c’est le plus souvent une expression voilée d’antisémitisme et que comparer peu ou prou ses agissements à ceux du nazisme relève du sacrilège.

Pourtant, s’il est des gens qui devraient faire profil bas quand on parle du nazisme, ce sont bel et bien les sionistes ainsi qu’on peut le constater en lisant le texte qui suit de Klaus Polkehn. Ce dernier présente de manière détaillée la somme des relations connues entre la clique sioniste et le régime nazi dès l’arrivée au pouvoir d’Hitler, une clique sioniste qui aurait dû être jugée à Nuremberg avec le reste de la bande.

Et contrairement aux apparences, la politique prosioniste des puissances européennes, de l’Allemagne tout particulièrement, loin de s’inscrire en rupture avec celle du fascisme hitlérien, se situe en fait dans une étonnante continuité. Une continuité dont la perception est cependant rendue très difficile par tout le brouillard émotionnel entretenu sur la première moitié du 20ème siècle et une guerre qu’on a voulue inanalysable par l’opinion publique.

Angela Merkel et Benjamin Netanyahou

Angela Merkel et Benjamin Netanyahou

L’article sur lequel j’ai basé ma traduction est en anglais (l’article original de Klaus Polkehn est écrit en allemand). Je n’ai pas reproduit l’important appareil de notes de l’auteur qui renvoie aux documents sur lesquels il s’est appuyé. Vous trouverez toutes ces références dans l’article en anglais disponible en format pdf  (lien ci-dessous)

TheSecretContacts-ZionismAndNaziGermany1933-1941–journal-of-palestine-studies–polkehn-klaus-vol-5-no-3-4-1976-pp-54-82_text (1).

Les contacts secrets : le sionisme et l’Allemagne nazie, 1933 – 1941

Par Klaus Polkehn, Journal of Palestine Studies – 1976 traduit de l’anglais par Djazaïri

L’antisémitisme devint une politique officielle du gouvernement allemand quand Hitler fut nommé chancelier du Reich allemand le 30 janvier 1933.  Le printemps 1933 avait aussi vu  le commencement d’une période de discrète coopération entre le sionisme et le régime fasciste allemand afin d’accroître le flux de capitaux et d’émigrants Juifs vers la Palestine. Les autorités sionistes avaient longtemps réussi à maintenir  cette coopération secrète, et ce n’est que vers le début des années 1960 que des critiques se sont exprimées ici ou là. La réaction sioniste a généralement consisté en des déclarations selon lesquelles leurs brefs contacts avec l’Allemagne nazie avaient été entrepris à seule fin de sauver des vies juives. Mais ces contacts étaient d’autant plus remarquables qu’ils avaient eu lieu à une époque où de nombreux juifs et organisations juives exigeaient un boycott de l’Allemagne nazie.

A l’occasion de la 16ème convention du Parti Communiste Israélien, un document proposé au début de la conférence affirmait  que «après la prise de pouvoir par Hitler en Allemagne, alors que toutes les forces antifascistes dans le monde ainsi que la grande majorité des organisations juives avaient proclamé un boycott contre l’Allemagne nazie, des contacts et une collaboration existaient entre les dirigeants sionistes et le gouvernement hitlérien.»  Le document citait les propos tenus par le dirigeant sioniste Eliezer Livneh (qui était le rédacteur en chef de l’organe de la Haganah pendant la deuxième guerre mondiale) lors d’un symposium organisé par le journal israélien Maariv en 1966, qui expliquait «que pour les dirigeants sionistes, secourir les juifs n’était pas un but en soi, mais seulement un moyen» (c’est-à-dire pour établir un Etat juif en Palestine). S’interroger sur la réaction du mouvement sioniste face au fascisme allemand qui, pendant ses douze années au pouvoir, a assassiné des millions de juifs relève du tabou aux yeux des leaders sionistes. Ce n’est que rarement qu’on peut tomber sur des preuves authentiques ou des documents au sujet de ces questions. Cette enquête rassemble des informations recueillies jusqu’à tout récemment sur certains aspects importants de la coopération entre les fascistes et les sionistes. La nature des choses veut que cette enquête ne présente pas une image complète. Cela ne sera possible que quand les archives (surtout celles qui sont en Israël) dans lesquelles les documents concernant ces évènements sont enfermés à double tour seront accessibles aux chercheurs universitaires.

L’avènement d’Hitler 

Pour les dirigeants sionistes, l’arrivée d’Hitler au pouvoir était grosse de la possibilité d’un afflux d’immigrants en Palestine. Auparavant, la majorité des juifs allemands, qui se considéraient eux-mêmes comme allemands, n’avaient guère de sympathie pour l’entreprise sioniste. Les statistiques allemandes, compilées avant la prise du pouvoir par les fascistes, classait la minorité juive uniquement en tant que «confession religieuse» et ce sont les législateurs fascistes qui introduiront la notion de «race» en tant que caractéristique et incluront de la sorte même les descendants assimilés issus de la communauté juive dans la catégorie [raciale, NdT] juive.

Selon les statistiques, 503 000 juifs vivaient en Allemagne en 1933, constituant ainsi 0.76 % de la population totale. 31 % de tous les juifs allemands résidaient dans la capitale Berlin où ils représentaient 4,3 % de la population de la ville. Les statistiques allemandes indiquent aussi que la proportion de juifs dans la population de l’Allemagne avait diminué entre 1871 et 1933, passant de 1,05 % à 0.76 %.

Ces juifs allemands étaient dans leur écrasante majorité non sionistes ou antisionistes et, avant 1937, l’Union Sioniste pour l’Allemagne (Zionistische Vereinigung für Deutschland, ZVFD) avait beaucoup de mal à se faire entendre.

Parmi les juifs recensés en Allemagne en 1925, il n’y en avait par exemple que 8739 (pas même 2 %) susceptibles de voter dans les conventions sionistes (c’est-à-dire en qualité d’adhérents d’organisations sionistes). Aux élections régionales de la communauté juive tenues en Prusse en février 1925, seulement 26 des 124 personnes élues appartenaient à des organisations sionistes. Un rapport  de Keren Hayesod présenté à la 24ème session de la ZVFD en juillet 1932 constatait : «dans le processus d’évaluation du travail de Keren Hayesod en Allemagne, on ne doit pas oublier qu’n Allemagne, nous devons tenir compte non seulement de l’indifférence de larges cercles juifs mais aussi de leur hostilité.»

Par conséquent, à l’époque de l’avènement au pouvoir d’Hitler, les sionistes étaient pour l’essentiel une petite minorité insignifiante et peu influente et d’étaient les organisations non sionistes qui jouaient un rôle dominant parmi les juifs.  A leur tête se trouvait la Centralverein deutscher Staatsbürger jüdischen Glaubens (CVn ou Union Centrale des Citoyens Allemands de Confession Juive), fondée en 1893 qui, ainsi que son nom le laisse entendre, considérait les juifs allemands comme des allemands et considérait que son premier devoir était de combattre l’antisémitisme.

En accord avec cette position fondamentale, la CVn avait aussi nettement affirmé son rejet du sionisme. C’est ainsi qu’une résolution adoptée par la principale instance de la CVn le 10 avril 1921 se concluait par ces mots : « si le travail de colonisation en Palestine n’était qu’une affaire d’aide et d’assistance, alors, du point de vue de la Centralverein, il n’y aurait rien à redire à la promotion de ce travail. Cependant, la colonisation en Palestine est d’abord l’objet d’une politique nationale juive et sa promotion et son soutien doivent donc être rejetés.» En conséquence, c’était la CVn qui, pendant les années précédant l’arrivée d’Hitler au pouvoir, se tenait à l’avant-garde des partis et organisations progressistes dans leur lutte contre l’antisémitisme. Au sujet de cette attitude, l’écrivain juif Werner E. Mosse remarquait : «Alors que les dirigeants de la CV considéraient comme de leur devoir de représenter les intérêts des juifs allemands dans l’action et le combat politiques, le sionisme prenait position pour … une non participation des juifs à la vie publique allemande. Il rejetait par principe toute participation à la lutte menée par la CVn.»

L’attitude des sionistes à l’égard de la menace d’une domination fasciste totale en Allemagne était déterminée par certains présupposés idéologiques communs : les fascistes tout comme les sionistes croyaient aux pseudo théories raciales, et les uns comme les autres partageaient la croyance dans des généralisations mystiques comme le caractère national» (volkstum) et la «race,» les uns et les autres étaient chauvins et penchaient pours «l’exclusivisme racial.» C’est ainsi que l’officiel sioniste Gerhart Holdheim écrivait en 1930 dans une livraison du Süddeutsche Monatshefte consacrée à la question juive (une publication dans laquelle, entre autres, des antisémites notoires faisaient connaître leurs opinions) : « Le programme sioniste conçoit la communauté juive comme étant homogène et indivisible, sur une base nationale. Le critère qui définit la communauté juive n’est pas al confession ou la religion, mais un sentiment global d’appartenance à une communauté raciale que réunissent des liens de sang et historiques et qui est déterminée à préserver son individualité nationale.» C’état le même langage, la même phraséologie que celle utilisée par les fascistes. Il va de soi que les fascistes allemands voyaient d’un bon œil les conceptions sionistes, tel Alfred Rosenberg, le principal idéologue du parti nazi qui écrivait :

«le sionisme doit être soutenu vigoureusement de sorte à ce qu’un certain nombre de juifs allemands partent chaque année en Palestine ou que, du moins, on leur fasse quitter le pays.» Considérant une déclaration de ce genre, Hans Lamm écrira plus tard : «…il est incontestable que dans les premières étapes de leur politique juive, les nationaux socialistes pensaient qu’il convenait d’adopter une attitude pro sioniste.»

De manière très perspicace, la CVn avait remarqué que la reconnaissance par les sionistes de «certains postulats des nationalistes allemands » avait donné des munitions aux antisémites et, dans une déclaration de politique générale émise par la CVn il était même question du sionisme comme ayant mis au mouvement [juif] un «coup de poignard dans le dos» dans la lutte contre le fascisme.

Mais les sionistes pensaient que seul Hitler pouvait pousser les juifs allemands antisionistes dans le bras du sionisme. Robert Welsch, qui était alors rédacteur en chef du journal sioniste allemand Jüdische Rundschau déclarait le 8 janvier 1933 (trois semaines après l’arrivée d’Hitler au pouvoir) lors d’ une réunion du comité local de la ZVFD : «Le caractère antilibéral du nationalisme allemand [i.e. les tendances réactionnaires de la bourgeoisie allemande – K.P.] s’accordaient avec la position antilibérale du sionisme et nous nous trouvons maintenant devant une chance de trouver, non une base pour une compréhension [mutuelle, NdT] mais pour la discussion.»

L’appel à Hitler le 30 janvier pour prendre la tête du gouvernement fut suivi par une mainmise sur toutes les positions d’autorité par le parti national Socialiste, ce qui signifiait que des antisémites déclarés étaient désormais au pouvoir. Les juifs allemands regardaient ces évènements avec appréhension parce que dans le programme du parti nazi figuraient le retrait de la citoyenneté aux juifs (Point 5) la révocation des Juifs exerçant dans la fonction publique (Point 6) ainsi que l’expulsion de tous les Juifs qui avaient immigré en Allemagne après le 2 août 1914 (Point 8).

Seuls les sionistes voyaient des avantages à cette tournure des évènements (L’historien britannique Christopher Sykes, qui n’était certes pas antisioniste, est de l’opinion «que les dirigeants sionistes étaient déterminés dès le tout début du désastre nazi à retirer un avantage politique de la tragédie.»

La première expression publique de cela fut l’œuvre du Dr Joachim Prinz, un rabbin berlinois qui était un sioniste convaincu et qui immédiatement après le 30 janvier 1933 décrivit la prise de pouvoir par Hitler comme étant le «début du retour des juifs à leur judaïsme.»

Evoquant le terrorisme fasciste contre les juifs allemands, Prinz écrivait : « Nous n’avons plus nulle part où nous cacher. Au lieu de l’assimilation, nous souhaitons la reconnaissance de la nation juive et de la race juive.» Ce point de vue n’était pas du tout celui d’un individu isolé. On pouvait lire le 13 juin 1933 dans l’organe officiel de la ZVFD, le Jüdische Rundschau:

Le sionisme reconnaît l’existence d’une question juive et veut la résoudre d’une manière généreuse et constructive. A cette fin, il veut s’attirer le soutien de tous les peuples ; ceux qui ont de la sympathie pour les juifs tout comme ceux qui leur sont hostiles, dans la mesure où, du point de vue sioniste, ce n’est pas une question sentimentale mais un véritable problème à traiter à la solution duquel tous les peuples sont intéressés.

En recourant à cette argumentation, le sionisme adoptait la même ligne politique que les fascistes.

Le 21 juin 1933, les sionistes firent une déclaration officielle sur leur politique à l’égard de la prise de pouvoir par les fascistes : «La déclaration de l’Union Sioniste pour l’Allemagne en Référence à la Position des Juifs dans la Nouvelle Allemagne.»  Dans une partie de ce long document, il était souligné que «Notre avis est qu’un des principes du nouvel état allemand d’exaltation nationale rendrait possible une solution satisfaisante.» Dans son document, la ZVFD, jetait un regard sur l’histoire de la situation des juifs en Allemagne, en se servant d’un vocabulaire fasciste comme les «liens du sang et de la race» et, exactement comme Hitler, postulait une «âme spécifique» pour les juifs. Les sionistes affirmaient ainsi : «Pour le juif aussi, l’origine, la religion, la destinée commune et la conscience de soi doivent avoir une signification décisive dans sa façon de vivre. Ce qui nécessite de surmonter l’individualisme égoïste qui s’est répandu à l’époque libérale, et devrait être réalisé à travers l’acquisition d’un sentiment commun d’unité et en assumant avec joie notre responsabilité.»

Après cette admission et cette reprise des thèses fascistes, suivait une reconnaissance ouverte de l’Etat fasciste : «Sur le sol du nouvel Etat [i.e. l’Allemagne fasciste], qui a établi le principe de la race, nous volons organiser l’ensemble de la structure de notre communauté de la même manière, de sorte que, pour nous aussi, l’aboutissement de la revendication de notre patrie puisse aboutir dans la sphère qui nous est allouée.» En conclusion, les sionistes condamnaient la lutte contre le régime hitlérien  menée par les forces antifascistes  qui avaient appelé au printemps 1933 au boycott économique de l’Allemagne nazie. « La propagande pour le boycott qu’ils sont en train de faire contre l’Allemagne est dans sa nature même contraire au sionisme dès lors que le sionisme ne veut pas combattre mais convaincre et construire.»

Pour saisir toute la portée de cette déclaration du ZVFD, il faut ici aussi se souvenir de ce qui l’a précédée. La persécution des juifs avait déjà commencé et avait déjà atteint un premier point culminant avec un grand pogrom qui avait touché toute l’Allemagne le 1er avril 1933.  Dans les premiers jours de mars 1933, les citoyens juifs allemands avaient été maltraités dans des viles allemandes (par exemple des boutiques juives avaient été pillées à Brunswick le 11 mars et, le 13 mars, des avocats juifs avaient été malmenés devant le palais de justice de Breslau [aujourd’hui Wroclaw en Pologne]. Les autorités fascistes avaient promulgué la loi sur la restauration de la fonction publique [le 7 avril 1933] qui aura pour conséquences, entre autres, la révocation de 2000 chercheurs et professeurs juifs des universités. Le 18ème congrès sioniste, qui s’était réuni à l’été 1933n’y voyait pas de problème : quand, pendant las session du congrès sioniste qui se tenait le 24 août 1933, la situation des juifs en Allemagne allait être débattue, le présidium du congrès a fait en sorte d’empêcher la discussion. Il avait aussi réussi à empêcher l’introduction d’une résolution appelant au boycott des marchandises allemandes, et avait à la place insisté fortement sur la nécessité d’organiser l’émigration des juifs allemands. Les protestations contre les évènements en cours en Allemagne avaient été réduites au plus strict minimum.

Les fascistes récompensèrent les sionistes pour leur «retenue » et permirent au ZVFD de poursuivre ses activités sans entraves. (C’était au moment où tous les partis et organisations démocratiques et antifascistes en Allemagne étaient soumis à une répression des plus  rigoureuses et où leurs cadres et  leurs membres étaient en prison ou en camp de concentration) Dans le même temps, les fascistes mettaient toutes sortes d’obstacles sur le chemin des organisations non sionistes. Ces entraves touchaient en tout premier lieu la CVn parce que, avant 1933 déjà, les fascistes voyaient dans la CVn « leurs principaux opposants juifs, » ainsi qu’il est indiqué dans de nombreux exemples tirés de la presse nazie.

La CVn avait toujours accusé les sionistes de monter peu d’intérêt pour la «lutte [contre le fascisme … et qu’ils [les sionistes] suivaient une politique d’indifférence [devant l’emprise du péril fasciste] parce qu’il ne se sentait pas concerné.»

Le 1er mars 1933, les SA, des paramilitaires fascistes, occupaient le siège central de la CVn pour le fermer. Le 5 mars 1933, la CVn était interdite en Thuringe pour cause de  «complot de haute trahison.» Dans le même temps, l’Etat nazi se tournait contre d’autres organisations juives non sionistes, comme la « Ligue du Reich des Anciens Combattants », par exemple, qui représentait une tendance juive nationaliste allemande. L’ «Union Nationale des Juifs Allemands» était également interdite.

Avec ce soutien fasciste, les dirigeants de l’Union Sioniste pour l’Allemagne purent obtenir pour la première fois une position dominante auprès des juifs allemands. A l’automne 1933, la « Association du Reich des Juifs en Allemagne»  fut fondée et de grandes organisations juives, dont le CV et le ZVFD y participèrent. Le chef de cette organisation était le rabbin Leo Baeck dont la personne reflétait l’attitude ambivalente de l’organisation à l’égard du sionisme ; Baeck était à la fois membre de la principale instance du CV, et président du fonds de colonisation juive «Keren Hayesod» en Allemagne.

L’organisation nouvellement créée offrait aux dirigeants sionistes une plateforme plus large pour leurs activités.

L’Association du Reich n’avait pas été, comme on l’a parfois prétendu, créée sur instruction des autorités fascistes.  Ball-Kaduri écrit :

«Il s’est avéré que la création de l’Association du Reich se fit sans aucune interférence de l’Etat ; une fois le processus de structuration achevé, l’organisation a simplement été déclarée au ministère de l’intérieur du Reich. – la Gestapo ne s’y était pas du tout intéressée.» C’est seulement le 4 juillet 1939 que l’ordonnance concernant la création obligatoire d’une Union des Juifs du Reich en Allemagne fut promulguée, amenant à changer le nom de l’organisation qui passa de celui de Députation à celui d’Union. Cette ordonnance rendait obligatoire l’adhésion de tous les Juifs à l’Union du Reich. Le paragraphe 2 de cette ordonnance satisfaisait également un des objectifs du sionisme en affirmant : «L’Union du Reich a pour objectif la promotion de l’émigration de tous les Juifs.»

Le parti nazi, à ses échelons les plus élevés, autorisait des activités politiques de divers types. A cet égard, par exemple, la police politique bavaroise notait le 9 juillet 1935 :

Les organisations sionistes collectent depuis un certain temps de l’argent auprès de leurs adhérents et de leurs sympathisants avec l’intention de promouvoir l’émigration, en achetant de la terre en Palestine, et d’obtenir un soutien pour la colonisation en Palestine. Ces collectes n’ont pas besoin d’obtenir une autorisation administrative parce qu’elles se font dans des cercles juifs fermés. De plus, la police de l’Etat n’a pas d’objections contre l’organisation de ces réunions dès lors qu’elles portent sur ce genre de fonds qui ont pour but de promouvoir la résolution en pratique du problème juif.

Après 1933, les fascistes permirent aux sionistes de continuer avec leur propagande. Tandis que tous les journaux en Allemagne étaient placés directement sous supervision du Ministère de la Propagande (les journaux publiés par les communistes, le parti Social-démocrate ou les syndicats et d’autres organisations progressistes étaient interdits) le Jüdische Rundschau pouvait paraître sans entraves.

1936: réunion berlinoise de la Zionistische Vereinigung Deutschland (organisation sioniste en Allemagne - photo musée Yad Vashem)

1936: réunion berlinoise de la ZVFD, l’organisation sioniste en Allemagne (photo musée Yad Vashem)

Winfried Martini, correspondant  à l’époque de la Deutsche Allgemeine Zeitung à Jérusalem et qui, selon son propre témoignage, avait des «liens personnels étroits avec le sionisme » observa plus tard ce « fait paradoxal » que «de toute la presse, c’était la presse juive i.e. sioniste] qui pendant des années conserva une certaine marge de liberté qui avait été complètement retirée à la presse non juive.»  Il ajoutait que dans le Jüdische Rundschau, on pouvait très souvent trouver des opinions critiques à l’égard des nazis sans pour autant que cela se traduise par l’interdiction du journal.

C’est seulement à partir de fin 1933 que cela conduisit à une interdiction de la vente de ce journal à des non juifs. Les Juifs devaient, c’est ce que souhaitaient les fascistes, être convertis au sionisme même si cela devait se faire avec une argumentation dirigée contre les fascistes. De la sorte, la diffusion de ce journal sioniste qui était auparavant assez faible connut une rapide augmentation.

Que le journal sioniste ait pu se féliciter d’être dans les bonnes grâces des dirigeants fascistes est compréhensible quand on examine la position de cet organe de presse vis-à-vis du boycott des commerces juifs du 1er avril 1933. Ce pogrom organisé contre des citoyens Juifs en Allemagne, qui avait soulevé l’indignation dans le monde entier et provoqué colère et répulsion chez tous les Allemands honnêtes n’avait pas été condamné franchement par le journal qui l’évaluait plutôt comme une confirmation de la justesse de la position sioniste : «l’erreur fatale de nombreux Juifs [de croire] que quelqu’un peut représenter les intérêts juifs  sous une autre casquette [autre que juive en tant que telle, NdT] est écartée, » écrivait le Jüdische Rundschau en parlant du pogrom : «Le 1er avril 1933 peut être un jour de réveil juif et de renaissance juive.»

La liberté d’action des sionistes incluait aussi l’édition de livres à côté de leur journal. Jusqu’en 1938, plusieurs maisons d’édition (dont entre autres,  Jüdische Verlag à Berlin-Charlottensburg et Schochen-Verlag à Berlin) pouvaient publier sans entraves de la littérature sioniste. C’est ainsi que purent être publiés en toute légalité dans l’Allemagne fasciste des textes de Chaim Weizmann, David Ben Gourion et Arthur Ruppin.

Les premiers jours de la domination nazie en Allemagne virent aussi le début d’une collaboration économique entre les fascistes et les sionistes. En mai 1933, la compagnie sioniste de plantation de citronniers en Palestine,  Hanotea», avait déjà sollicité du ministère de l’économie du Reich la permission de transférer du capital d’Allemagne, ouvrant ainsi la voie à l’accord de transfert (Haavara) qui interviendra plus tard.

La compagnie «Hanotea » achetait les marchandises allemandes dont elle avait besoin, les payant avec des comptes bancaires en Allemagne d’émigrants Juifs. Les émigrants quittaient alors l’Allemagne et recevaient l’équivalent en immobilier de ce qui avait été prélevé sur leurs comptes. Comme l’expérience avec Hanotea semblait avoir été une réussite aux yeux des dirigeants sionistes, des négociations furent entreprises à l’été 1933 entre la partie sioniste et le ministère allemand de l’économie, ce qui aboutit à la signature de ce qu’on a appelé l’accord Haavara.

Les négociations de 1933 sur la Haavara sont un des épisodes de l’histoire du sionisme sur lequel un voile a été jeté, vu qu’elles constituaient un exemple de coopération économique au moment où les forces antifascistes essayaient de prendre la tête d’un boycott de l’Allemagne nazie. En évoquant cette démarche de boycott, Nahum Goldmann qui occupait alors une position importante dans le mouvement sioniste, écrira plus tard :

Cependant, beaucoup d’organisations juives refusèrent d’y participer [au boycott], soit parce que beaucoup de firmes juives étaient en fait des représentantes commerciales d’entreprises allemandes, ou parce que certaines organisations juives, celles des Etats Unis plus précisément, avaient adopté la position selon laquelle in était antipatriotique d’organiser un boycott contre un pays avec lequel son propre pays entretient des relations commerciales normales.»

Cet exposé est sans doute valable pour les raisons évoquées prises une à une, mais il occulte néanmoins la vérité, parce que ceux qui ont rompu le boycott ont d’abord été les sionistes eux-mêmes.

Il y a des versions divergentes sur les circonstances qui ont amené à l’accord Haavara. Selon une version, l’initiative des négociations avec les autorités fascistes serait venue des l’Union Sioniste pour l’Allemagne qui avait intéressé au projet Hoofien, le directeur-général de l’Anglo-Palestine Bank en Palestine. Hoffien, est-il rapporté, s’était rendu à Berlin en 1933 et était entré sur place en négociations avec Oberregieunsgrat Hartenstein du ministère de l’économie du Reich. (raison pour laquelle l’accord Haavara est souvent appelé aussi l’accord Hoofien, une appellation qui réduit la responsabilité de l’ensemble de la chose au seul personnage de Hoofien). Dans la mesure où Hoofien était impliqué (une implication sans doute nécessaire du moment où il était question d’accords concrets sur des questions de transferts qui requéraient l’expertise d’un banquier professionnel), on doit considérer qu’une affaire d’une telle importance ne pouvait pas résulter d’une initiative privée et qu’elle n’aurait pu être mise en œuvre sans l’autorisation des institutions sionistes.  On peut de fait apprendre par d’autres publications que les négociations étaient chapeautées à Berlin par celui qui était alors le chef du département politique de l’Agence Juive : Chaim Arlosoroff.  Finalement, l’accord conclu en 1935 sera approuvé officiellement par le Congrès Sioniste Mondial !

Les mots mêmes de Ball-Kaduri sont que l’accord Haavara avait été conclu « sous la forme d’une lettre adressée à Herr Hoofien par le ministère de l’économie du Reich. Les négociations s’étaient déroulées sereinement car les Nazis avaient encore un «penchant sioniste» à l’époque.

En vertu de l’accord signé à Berlin, deux compagnies furent créées : la compagnie Haavara à Tel Aviv et une compagnie sœur baptisée Paltreu à Berlin. La procédure se déroulait de la manière suivante : l’émigrant Juif payait avec son argent (la somme minimale était d’un millier de livres sterling) sur le compte en Allemagne de la Haavara (à la banque Wassermann Bank de Berlin ou à la banque Warburg de Hambourg). Avec cet argent, les importateurs Juifs pouvaient acheter des marchandises allemandes pour les exporter en Palestine tout virant une somme équivalente en livres palestiniennes dans le compte de la Haavara à l’Anglo-Palestine Bank en Palestine. Quand l’émigrant arrivait, il trouvait dans son compte une somme équivalente à celle qu’il avait versée en Allemagne (c’est là que Ball-Kaduri observe : « après avoir déduit des frais assez élevés »).

En relation avec l’émigration vers la Palestine permis par l’accord Haavara, les sionistes fondèrent la Palestine Shipping Company qui acheta le bateau allemand de transport de passagers «Hohenstein » qu’ils rebaptisèrent «Tel Aviv.»  Le bateau fit son premier voyage vers Haïfa au départ du port allemand de Bremerhaven au début de l’année 1935. Pendant ce voyage, le bateau portait à la poupe son nouveau nom en caractères hébraïques tandis que le swastika flottait sur son mât ; « une combinaison d’absurdité métaphysique » écrira plus tard un des passagers. Le capitaine du navire, Leidig, était un adhérent du parti Nazi !

Le Hohenstein rebaptisé Tel Aviv sera revendu en 1937 au Japon

Le Hohenstein rebaptisé Tel Aviv sera revendu en 1937 au Japon

L’accord Haavara vouait à l’échec la démarche de boycott de l’Etat nazi et maintenait sans disruption pour l’économie fasciste l’accès à ’un large marché à l’export à une époque où le commerce mondial souffrait encore des traces de crise économique internationale de1929.  Ce point avait été souligné dans un mémorandum par Stuckart, le secrétaire d’Etat au ministère de l’intérieur du Reich. Dans ce mémorandum, daté du 17 décembre 1937, il était observé : «Les principaux avantages [de l’accord Haavara] sont les suivants : l’influence du groupe Haavara en Palestine a amené au résultat imprévu et inhabituel mais espéré que, de tous les endroits, la Palestine est le pays dans lequel les biens allemands ne sont pas boycottés par la partie juive…» En même temps, la procédure Haavara a rendu possible une accélération du mouvement d’émigration juive vers la Palestine, amenant au renforcement de la position des sionistes en Palestine. Les immigrants qui viennent d’Allemagne amènent avec eux un plus haut niveau de compétences économiques entre autres choses.

Ce qui résultait aussi de la «sélectivité.» Comme l’accord requérait le versement  par l’émigrant d’un millier de livres sterling au minimum, seuls des membres de la bourgeoisie juive étaient en mesure de profiter de ce dispositif, tandis que les travailleurs d’origine juive étaient lassés à leur destin. Ainsi, l’évaluation suivante de l’accord de Haavara dans le cadre de l’examen de la politique raciale du fascisme peur être considérée comme parfaitement juste : le principe de solidarité qui nécessitait que les Juifs restent unis devant leurs persécuteurs  avait volé en éclats du fait d’intérêts capitalistes. Pecunia non olet. Dans le même temps, les dispositions prises par les entrepreneurs Juifs dans le seul objectif de transférer leurs capitaux de l’Allemagne fasciste vers la Palestine étaient accueillies avec grande considération. On a affirmé que le capital envoyé au Moyen Orient était placé au service des Juifs. En réalité cependant, cet argent servait en Palestine aux mêmes objectifs qu’en Allemagne : le profit de ses détenteurs.

Le même livre affirme que «l’Internationale Sioniste voulait que les émigrants Juifs d’Allemagne arrivent sur le sol de Palestine non comme des sans le sou mais en tant que propriétaires d’un capital qui contribuera à l’édification d’un Etat capitaliste. C’est à partir de ce désir qu’a grandi l’intérêt des sionistes pour s’associer avec des antisémites.»

De fait, avant même la création d’Israël, l’accord de transfert  donna une forte impulsion à l’économie sioniste en Palestine. Des sources sionistes parlent d’une somme de 139,6 millions de Reichsmarks – une somme énorme à l’époque – transférée d’Allemagne en Palestine. Une autre source situe le montant transféré à 8 millions de livres sterling. Ce n’est pas une simple coïncidence si les projets les plus importants en Israël ont été créés ou dirigés par des émigrants partis d’Allemagne. La plus grande fonderie de Palestine et l’industrie du ciment par celui qui fut à une époque directeur de la compagnie des eux et d’électricité de Berlin, le Dr Karl Landau. Le Dr Arnold Barth de Berlin, le Dr Siegfried Sahlheine de Hambourg et Herbert Förder de Breslau furent les premiers organisateurs de la banque Leumi. Fritz Naphtals de Berlin et George Josephthal de Nuremberg  transformèrent en entreprise géante l’insignifiante «Arbeiterbank.» Certains des plus importantes firmes israéliennes furent fondées par Yekutiel er Sam Federmann de Chemnitz ( Karl-Marx-Stadt à l’époque communiste) ; l’entré Yekutiel dans le Who’s Who en Israël (1962) le présente comme un «fondateur de ‘l’Israel Miami Group’ (Dan Hotel) ; le partenaire israélien du cimentier ‘Isasbest’ ; le fondateur et associé de ‘Israel Oil Prospectors Corp, Ltd ‘ qui procéda au premier forage pétrolier ‘Mazal 1’ et présida de nombreuses autres entreprises.

Les accords économiques entre les sionistes et le fascisme allemand avaient l’approbation de toutes les instances du Reich nazi. Le ministère des affaires étrangères avait déjà adopté une attitude pro-sioniste en maintes occasions avant 1933 (il y avait eu des rencontres entre Chaim Weizmann et les secrétaires d’Etat von Schubert et von Bullow).

C’est seulement après le déclenchement de la révolte arabe palestinienne de 1936 que les premières divergences d’opinion s’installèrent dans les diverses institutions fascistes sur l’utilité de poursuivre les transferts dans le cadre de la Haavara. Le ministère des affaires étrangères se rendait maintenant compte que la politique de facto pro-sioniste allait aliéner les Arabes à l’Allemagne hitlérienne – une perspective qui n’était pas dans l’intérêt du Reich Nazi. Döhle, consul général d’Allemagne à Jérusalem, était le porte-voix de ce point de vue et, dans un long mémorandum daté du 22 mars 1937, il observait que « par notre promotion de l’immigration juive… la position qu’avait pu réoccuper l’Allemagne… allait être mise à mal.» En adoptant cette position, Döhle était moins animé par un intérêt pour les Arabesque par une inquiétude pour les intérêts politiques du fascisme allemand. Il ajoutait que l’Allemagne ne devait «pas trop se préoccuper  des sympathies des Arabes à l’égard de l’Allemagne dès lors que ce dont nous avions besoin était moins d’avoir une politique arabe active que d’éviter la promotion voyante accordée à l’édification d’un foyer national juif.»

Döhle craignait   «un revirement de l’humeur des Arabes et que nous soyons accusés de participer activement à la lutte contre eux.»

Les inquiétudes de Döhle étaient partagées par d’autres autorités fascistes. Ainsi, l’Office du Commerce Extérieur de l’Auslandsorganisation du parti nazi (le bureau du parti chargé des affaires internationales) déclarait en toute franchise : «Politiquement, il [l’accord de la Haavara] revient à apporter un soutien efficace à l’établissement d’un foyer national juif avec l’aide du capital allemand.»

Le 17 décembre 1937, il était signalé dans le mémorandum déjà cité de Stuckart, Secrétaire d’Etat au ministère de l’Intérieur, que depuis le début de la révolte arabe en Palestine «les avantages procurés par la procédure [de Haavara] sont devenus plus faibles  tandis que ses inconvénients deviennent de plus en  plus importants.»

Stuckart était d’avis que si la création d’un Etat juif était inévitable, alors «tout ce qui permettrait le développement d’un tel Etat devrait être évité.» Puis Stuckart déclarait clairement : Il est hors de doute que la procédure de la Haavara a apporté la plus forte contribution au développement extrêmement rapide de la Palestine [i.e. des colonies sionistes – K.P.]. Cette procédure n’a pas seulement permis l’apport de très grosses sommes d’argent [d’Allemagne] ; elle a aussi apporté les hommes les plus intelligents parmi tous les immigrants, et a en fin de compte fourni les machines et les équipements industriels nécessaires – aussi d’Allemagne.»

 Les craintes de ces responsables (qui, ainsi que nous le verrons étaient en contradiction avec l’opinion des SS et de la Gestapo) furent finalement communiquées à Hitler. Hitler, ainsi qu’on peut le lire dans un mémorandum du département de la Politique Commerciale du ministère des affaires étrangères en date du 27 janvier 1938, décida que la procédure de la Haavara devait continuer. Cette position d’approbation prise par Hitler vis-à-vis du renforcement de la colonisation sioniste de la Palestine resta inchangée malgré les doléances émanant du ministère des affaires étrangères er l’Auslandorganisation du parti nazi relativement à  la montée de l’hostilité des Palestiniens à l’égard de l’Allemagne.  C’est ainsi que l’Auslandorganisation au ministère des affaires étrangères exigea à nouveau dans un mémorandum daté du 12 novembre 1938 que «une initiative soit entreprise pour une annulation d’un accord de Haavara qui n’a que trop duré.» Jon et David Kimche confirment le fait qu’Hitler «avec une détermination sans ambigüité, avait ordonné la promotion d’une immigration de masse en Palestine,» et qu’Hitler avait en outre formulé la décision fondamentale que «l’émigration juive devait être encore plus encouragée par tous les moyens disponibles. Il est donc indiscutable que l’opinion du Führer était qu’une telle émigration devait être avant tout orientée vers la Palestine.»

Finalement, même Winfried Martini confirme la position pro-sioniste des cercles fascistes les plus importants pendant la révolte arabe de 1936-39. Il écrit que, en tant que correspondant de la Deutsche Allgemeine Zeitung en Palestine, ses articles sur la révolte «étaient assez clairement favorables à la partie juive,» et que cela n’avait soulevé aucune objection de la part des responsables nazis.

Hitler resta donc le garant des transferts Haavara qui ne furent stoppés qu’avec le déclenchement de la deuxième guerre mondiale.

Coopération avec les services de renseignements nazis

Pendant les premiers jours de la domination fasciste sur l’Allemagne, les sionistes avaient un contact direct avec l’appareil de répression fasciste, ce qui se traduisit par une coopération informelle entre la direction sioniste et les organisations de terreur du Reich nazi (la Gestapo, la SS etc.). Dès avant 1933, le dirigeant sioniste Leo Plaut «avait une connexion» avec la police politique et avec un cadre de la police, l’Oberregierungsrat Rudolf Diels (supposé être un camarade de classe de Plaut). Quand Diels fut d’abord nommé chef de la police secrète en 1933, il maintint ses relations avec Plaut. «En fait, Plaut avait même le numéro de la ligne secrète de Diels et pouvait l’appeler à tout moment.» On peut seulement spéculer sur les détails de leurs contacts parce que les documents à ce sujet sont enfermés à double tour aux archives de Yad-Vashem à Jérusalem. On peut cependant supposer que c’est grâce à ces contacts qu’une rencontre avait pu être arrangée entre le premier ministre Prussien Herman Goering (plus tard condamné à mort par le tribunal de Nuremberg pour crimes de guerre) et les chefs des organisations juives allemandes. La réunion eut lieu le 26 mars 1933. Parmi les dirigeants  sionistes présents, se trouvait Kurt Blumenfeld, mais il a gardé le silence sur cet épisode sans ses mémoires.

De tels contacts se faisaient en secret, mais il existe des preuves concernant des préparatifs en vue d’une coopération entre les sionistes et la SS (l’organisation qui chapeautait tout l’appareil policier et du renseignement dans l’Etat fasciste). Peu de temps après la prise du pouvoir par les fascistes, le journal Der Angriff, contrôlé par les chefs propagandistes Nazi, publiait un article sur un voyage en Palestine qui présentait en termes positifs la colonisation sioniste en Palestine. Le reportage, intitulé «Un nazi voyage en Palestine,»  «ne comportait pratiquement aucune critique.»

Médaille commémorative du séjour de leopold von Mildenstein

Médaille commémorative du séjour de Leopold von Mildenstein en Palestine

Le pseudonyme de l’auteur «Lim» dissimulait l’identité du SS Untersturmführer (équivalent du grade de lieutenant dans l’armée) Leopold von Mildenstein. Mildenstein servait dans le SD (le service de sécurité de la SS) qui était à l’origine le service secret interne du parti nazi mais qui, à partir de 1934, cessa d’être simplement la police du parti et un instrument entre les mains du commandement de la police pour se transformer en service secret  intérieur principal de la dictature fasciste.

Le SD était aussi devenu  l’organisation de commandement politique et de formation des cadres pour la police fasciste. Le fait que Mildenstein ait pu être l’homme capable d’écrire des articles ouvertement pro-sionistes n’était pas une simple coïncidence puisque, en 1934, le Bureau II du SD s’était étoffé d’un bureau II-112 ou «Judenreferat» (bureau des affaires juives) dont il assurait la direction. Selon Martini, Mildenstein avait été «discrètement conseillé par des officiels sionistes » pendant son séjour en Palestine. Le département dirigé par Mildenstein a eu la charge de la politique juive du nazisme jusqu’en 1938 Cette politique avait été formulée par l’organe officiel de la SS, Das Schwarze Korps, dans les termes suivants : «Le temps n’est peut être pas bien loin qui verra la Palestine recevoir à nouveau les enfants qu’elle avait perdu il y a un millier d’année. Nos vœux ainsi que la bonne volonté de l’Etat les accompagnent ». Il y a eu des tentatives pour décrire la politique pro-sioniste de la SS comme reflétant l’attitude personnelle de Mildenstein  plutôt que l’entente officielle entre sionistes et fascistes. Mais il n’y a pas que la citation extraite du Schwarze Korps pour contredire cette thèse : Mildenstein lui-même, quelques années plus tard, republiera sous forme de livre ses notes de voyage parues dans l’Angriff. Mais cette fois-ci, il transformera sa tendance pro-sioniste initiale en antisémitisme sans fard.

Les dirigeants sionistes qui avaient «discrètement conseillé » le directeur du « Judenferat » au SD pendant son voyage en Palestine poursuivirent leurs contacts avec la SS et le SD. Naturellement, peu de détails sont connus sur ces contacts dont les traces sont des documents hautement classifiés. Un des rares documents  disponibles sur ces relations est un mémorandum du professeur Franz Six daté du 17 juin 1937 qui porte la mention «Affaire secrète pour le commandement. » ce mémorandum contient des informations sur une visite de l’émissaire sioniste Feivel Polkes à Berlin. Polkes était membre de l’état major de l’armée sioniste clandestine, la Haganah, avec le grade de commandant. L’Oberscharführer de la SS Herbert Hagen qui avait succédé à Mildenstein à la direction du Judenferat affirmait que Polkes avait le « commandement de l’ensemble de l’appareil d’auto-défense des Juifs de Palestine.»

En Palestine, Polkes avait été en relation étroite avec le correspondant de la « German News Agency ,» le Dr Reichert qui était actif dans le réseau d’espionnage du SD en Palestine. Ce réseau était dirigé pat Otto von Bodelschwingh, un agent du SD établi comme agent commercial à Haïfa. C’est le Dr Richert qui avait obtenu un visa d’entrée en Allemagne pour Polkes.

Polkes resta à Berlin du 26 février au 2 mars 1937, participant à plusieurs réunions avec des agents du SD représentant le régime nazi, dont deux avec le Hauptscharführer Adolf Eichmann (Eichmann avait alors commencé à travailler au «Judenferat»). Polkes avait alors offert de collaborer avec le gouvernement allemand, disant à Eichmann qu’il était par-dessus tout intéressé à «accélérer l’immigration juive en Palestine, de sorte à ce que les Juifs deviennent majoritaires par rapport aux Arabes dans son pays. A cette fin, il travaillait avec les services secrets anglais et français et ils voulait aussi coopérer avec l’Allemagne d’Hitler.»

Hagen avait noté un peu plus loin dans son rapport sur la visite de Polkes à Berlin : «Il avait aussi signalé sa disponibilité à rendre des services à l’Allemagne sous la forme d’informations, dans tant qu’elles n’entraient pas en conflit avec ses propres objectifs…»

Entre autres choses, il soutiendrait avec vigueur les intérêts allemands au Moyen Orient…» Höhne avait commenté l’offre de Polkes en ces termes : « … derrière ça, il y a clairement la politique d’immigration de la Haganah.»

La SS avait immédiatement récompensé les intentions coopératives de Polkes avec les instructions préconisées par Six. « Une pression est exercée sur l’association des Juifs du Reich en Allemagne afin d’obliger les Juifs qui émigrent d’Allemagne à se rendre seulement en Palestine et dans aucun autre pays. »

C’était exactement ce que voulaient les sionistes mais, ajoutait Six : «Une telle mesure va entièrement dans le sens des intérêts de l’Allemagne et elle est déjà mise en œuvre par la Gestapo.»

Feivel Polkes, le commandant de la Haganah, s’était mis en quatre pour faciliter le développement de la coopération entre sionistes et fascistes ; il avait même lancé une invitation à Eichmann pour une visite en Palestine comme invité de la Haganah.

Six observait :

«Dans le travail de mise en contact, le nom du SS Hauptscharführer Eichmann du Département II-II2  me vient à l’esprit avant tout autre. Il avait eu des discussions avec Polkes pendant le séjour de ce dernier à Berlin et il avait été invité à visiter les colonies juives en Palestine où il serait son guide.»

Le voyage en Palestine entrepris par Hagen et Eichmann n’est qu’un épisode dans l’histoire de la collaboration entre le sionisme et l’Allemagne nazie. Mais c’était un événement à la fois significatif et révélateur qui est devenu l’objet d’une falsification considérable. Au lieu d’admettre le fait que le tristement célèbre assassin de Juifs, Adolf Eichmann, avait à un moment donné été invité en Palestine par la Haganah, les auteurs sionistes ont renversé la faute et affirmé que le but de la visite d’Eichmann était d’entrer en contact avec les rebelles Palestiniens, voire de conspirer avec le mufti de Jérusalem, Hadj Amin Al-Husseini. L’inventeur de cette histoire semble être le sioniste bien connu Simon Wiesenthal qui, en 1947, avait déjà prétendu qu’Eichmann avait implanté un réseau d’agents dans la colonie [allemande] de Sarona en Palestine et avait pris contact avec le Grand Mufti. En 1951, Léon Poliakov avait publié quelque chose de semblable dans Die Welt et Gerald Reitlinger la lui emprunta deux ans plus tard pour son livre « La solution finale » dans lequel Eichmann était supposé avoir été envoyé en Palestine pour prendre contact avec les rebelles Arabes.»

A partir de là, la légende a fleuri, avec l’Américain Quentin Reynolds affirmant même qu’Eichmann avait rendu visite au Grand Mufti. Le biographe d’Eichmann, Commer Clarke, était allé jusqu’à soutenir qu’Eichmann avait emporté avec lui 50 000 dollars d’ «or nazi» pour les offrir aux rebelles Palestiniens.

Quand de tels mythes sont mis en regard avec la réalité des faits, une des raisons pour lesquelles le gouvernement israélien tenait tant à ce que le procès Eichmann ait lieu en Israël et pas ailleurs devient claire ; c’est seulement en Israël que les contacts des sionistes avec les nazis pouvaient être écartés du regard de l’opinion publique. C’est seulement là-bas que la pression sur un Eichmann qui jouait sa vie dans ce procès pouvait être suffisante pour qu’il fasse de fausses déclarations devant la cour. «Il est vrai,» déclara Eichmann pendant son procès, «qu’un des objectifs de mon voyage en Palestine en 1937 était de prendre contact avec le Mufti Al-Husseini.  Mais le rapport sur leur voyage rédigé par Hagen et Eichmann et découvert dans les archives secrètes d’Himmler, le chef de la SS, renvoie une image différente. On peut résumer ainsi la teneur du rapport sur ce voyage : Eichmann et Hagen quittèrent Berlin le 26 septembre, se faisant passer pour des rédacteurs du Berliner Tageblatt et arrivèrent à Haïfa le 2 octobre 1937 à bord du bateau Romania. Comme les autorités britanniques avaient refusé la permission de débarquer aux deus émissaires de la SS (à cause de la révolte arabe), Eichmann et Hagen allèrent en Egypte. Sur place, ils rencontrèrent non pas Hadj Amin Al-Husseini, mais leur vieille connaissance, Feivel Polkes, l’officier de la Haganah.

Le rapport de voyage d’Hagen et Eichmann contient une restitution exacte  des conversations avec Polkes qui eurent lieu les 10 et 11 octobre 1937 au café Groppi du Caire. Polkes avait débord exposé en toute franchise les projets sionistes devant les hommes de la SS (les déclarations de Polkes telles que consignées par Hagen et Eichmann ne sont pas seulement intéressantes quant à la coopération sionisme – fascisme, mais elles sont également importantes comme témoignage sur la politique expansionniste des sionistes) :

«L’Etat sioniste doit être établi par tous les moyens aussi vite que possible afin qu’il attire un flux d’émigrants Juifs vers la Palestine. Quand l’Etat juif sera établi dans le cadre propositions actuelles de la Commission Peel, et dans la ligne des promesses partielles de l’Angleterre, alors les frontières pourraient être repoussées plus loin conformément à sa volonté [de l’Etat juif].»

Polkes avait ensuite fait l’éloge de la terreur antisémite en Allemagne : «les cercles nationalistes juifs ont exprimé leur grande satisfaction devant la politique allemande radicale à l’égard des Juifs, ca cette politique devrait faire augmenter la population juive en Palestine de sorte qu’on puisse envisager une majorité juive devant les Arabes dans un futur prévisible.»

Une fois de plus, Polkes avait souligné la nécessité d’accélérer le départ des Juifs d’Allemagne et avait réitéré sa disponibilité à donner des informations secrètes au SD. Il avait offert immédiatement deux éléments « d’information  de ce genre» ainsi qu’Eichmann le notait dans son rapport de voyage. Le premier était conçu pour susciter l’hostilité du régime fasciste à l’égard du mouvement nationaliste arabe. Eichmann avait noté : «Selon les informations de Polkes, le Congrès Panislamique Mondial en convention à Berlin est en contact direct avec deux leaders Arabes prosoviétiques : l’émir Chakib Arslan et l’émir Adil Arslan. » Le deuxième élément d’information consigné par Eichmann dans son rapport de voyage concernant ce parti qui s’était engagé sans équivoque à l’avant-garde de la lutte contre la terreur fasciste et les indignités antisémites : le Parti Communiste Allemand. «La radio communiste illégale dont la diffusion est particulièrement importante en Allemagne est, selon Polkes, installée dans un camion qui circule le long de la frontière germano-luxembourgeoise pendant les retransmissions.» (Cette information donne un aperçu intéressant que où les dirigeants sionistes voyaient leurs alliés et où ils voyaient leurs opposants !)

Les rencontres entre Eichmann et Polkes ne sont pas des évènements isolés et fortuits. Elles s’inscrivent dans le contexte d’une coopération à long terme entre fascistes et sionistes. Après le voyage d’Hagen et Eichmann, la collaboration avait été cimentée par la «Mossad Aliyah Beth,» qui avait été créée par la Haganah comme organisation pour l’immigration illégale après le coup de frein à l’immigration en Palestine décidé par la Grande Bretagne suite à la Commission Peel. Fin 1937, i.e. quelques mois après le voyage d’Eichmann, des envoyés du Mossad prenaient leurs fonctions dans les locaux de ma Reichsvereinigung [Union des Juifs du Reich] au 10 Meineckestrasse à Berlin-Charlottenburg, avec la permission des autorités fascistes de Berlin. Ces deux envoyés, Pina Ginsburg et Moshe Auerbach avaient fait le voyage de Palestine en Allemagne à cet effet.

Dans leur livre Secret Roads ; Jon et David Kimche ont situé l’arrivée de Ginsburg à Berlin à l’été 1938. Ginsburg s’était présenté lui-même officiellement à la Gestapo en tant qu’émissaire de «L’Union des Colonies Communautaires », déclarant qu’il était en mission spéciale et que sa tâche convergeait avec les intentions du gouvernement nazi, son objectif étant l’organisation de l’émigration des Juifs Allemands en Palestine. C’était seulement avec le soutien des dirigeants nazis que ce projet pouvait se réaliser sur une grande échelle. La Gestapo avait alors discuté avec Ginsburg sur «la manière de promouvoir et d’accroître l’immigration juive en Palestine à l’encontre de la volonté des autorités mandataires britanniques.»

En attendant, les autorités fascistes avaient commencé à changer ses méthodes de pression sur les Juifs Allemands. Elles ne s’en remettaient plus aux seules organisations sionistes pour s’occuper de l’émigration en Palestine. A Vienne (l’Autriche avait été occupée par l’Allemagne hitlérienne en mars 1938), «l’Office Central pour l’Emigration Juive» était créé et placé sous la responsabilité d’Adolf Eichmann. Ai début de l’été 1938, Eichmann rencontrait à Vienne un autre émissaire du Mossad, Bar-Gilead. Ce dernier demanda la permission d’installer des centres (camps) de formation pour les émigrants afin qu’on puisse les préparer à leur travail en Palestine. Après avoir référé de cette requête à Berlin, Eichmann avait accordé l’autorisation et fourni tout ce qui était nécessaire pour l’installation des camps de formation. Vers la fi 1938, environ un millier de jeunes Juifs avaient été formés dans ces camps.

Dans le même temps, Ginsburg à Berlin avait pu, avec l’aide des autorités nazies, établir des camps semblables. Jon et David Kimche écrivent : «Le Palestinien [Ginsburg] qui était venu à Berlin prêt à tout, n’avait aucun état d’âme à dîner avec le diable et à s’assurer sa part du repas.»

Dans son livre Eichmann à Jérusalem, Hannah Arendt a commenté les informations fournies par les Kimches :

…ces Juifs de Palestine tenaient un langage pas complètement différent de celui d’Eichmann…ils avaient été envoyés en Europe par les colonies communautaires en Palestine, et ils n’étaient pas intéressés par des opérations de secours – ce n’était pas leur job. Ils voulaient sélectionner du «matériel adapté» et leurs principaux ennemis… n’étaient pas ceux qui rendaient la vie impossible dans les pays d’installation ancienne qu’étaient  l’Autriche et l’Allemagne, mais ceux qui empêchaient l’accès à la nouvelle patrie ; cet ennemi était clairement la Grande Bretagne, pas l’Allemagne… ils étaient probablement parmi les premiers Juifs à parler ouvertement d’intérêts mutuels…

La proposition d’une alliance militaire avec Hitler

Tandis que la tendance majoritaire du mouvement sioniste, la tendance du parti «travailliste» (Ben Gourion etc.) et les «sionistes généralistes » (Weizmann et les autres), camouflaient soigneusement leurs contacts avec les fascistes, et s’exprimaient publiquement contre eux, l’aile droite du sionisme, le parti Révisionniste (ancêtre de l’organisation terroriste Irgun Zvai Leumi et plus tard du parti Herut en Israël) avait ouvertement et en maintes occasions avant 1933 exprimé son admiration pour des gens comme Mussolini et Hitler. On peut en trouver un exemple dans un procès tenu à Jérusalem en 1932 quand l’avocat Cohen, un membre du parti Révisionniste, avait déclaré en défense d’auteurs de troubles de l’ordre à l’université : «Oui, nous éprouvons un grand respect pour Hitler. Hitler a sauvé l’Allemagne. Sans lui elle aurait péri il y a quatre ans. Et nous nous serions rangés aux côtés d’Hitler si seulement il avait renoncé à son antisémitisme.»

Vladimir Jabotinsky, chef à l’époque du mouvement révisionniste, qui entretenait de bonnes relations avec le mouvement fasciste en Europe avait aussi été accusé de vouloir des relations étroites avec l’Allemagne hitlérienne.

Il y avait alors une concurrence évidente entre les différentes factions sionistes pour aboutir à une collaboration privilégiée avec les fascistes tout en dénonçant dette même démarche les unes chez les autres (Il faut mentionner ici l’assassinat de Chaim Arlosoroff).

Le journal sioniste Davar de juillet 1933 avait publié un article de David Ben Gourion qui lançait une lourde accusation : «… Juste après l’accession d’Hitler au pouvoir en Allemagne, alors que les persécutions contre les Juifs et les marxistes étaient au plus haut, M. Vladimir Jabotinsky s’était rendu à Berlin et dans un discours public, avait attaqué les communistes présents dans le mouvement sioniste et en Palestine.» S’il en était bien ainsi, alors cela signifiait que Jabotinsky voulait torpiller les négociations sionisto-fascistes afin de pouvoir entrer dans la partie comme partenaire des négociations avec les Nazis.  Jabotinsky s’était néanmoins attaché à réfuter l’accusation de Ben Gourion en soulignant que ce dernier avait pris la parole sur Radio Varsovie le 28 avril 1933 et avait appelé à la mise en place d’un boycott mondial de l’Allemagne, avec l’établissement simultané d’un Etat juif en Palestine, «comme seule réponse adéquate à la menace hitlérienne.»  Il y avait là une allusion transparente aux négociations de Haavara menées par l’aile majoritaire du sionisme. Mais Jabotinsky ne pouvait pas contester le fait que le journal révisionniste Hazil Haam, publié en Palestine, « semblait considérer ce mouvement [le fascisme] avec une sympathie et une compréhension prononcées. Les rédacteurs de ce journal… lui avait-on dit, quoique conscients de l’antisémitisme forcené d’Hitler, voyaient dans le National Socialisme les éléments d’un authentique mouvement de libération nationale.

Pour l’Allemagne fasciste, la collaboration avec la tendance sioniste majoritaire était sans aucun doute plus importante que la coopération avec «l’opposition» révisionniste. Néanmoins, même les Révisionnistes furent autorisés à poursuivre leurs activités politiques en Allemagne. Les membres de l’organisation de jeunesse du mouvement révisionnistes, «Brit Trumpeldor» (à propose de laquelle Schechtman rapporte qu’elle «s’adaptait à certaines caractéristiques du régime nazi») était la seule organisation non fasciste en Allemagne à être autorisée par les nazis à porter un uniforme.

Miliciens du Betar à Berlin en 1936

Miliciens du Betar à Berlin en 1936

Ce furent finalement des membres de l’Irgoun qui, dans leur intention de collaborer avec le fascisme allemand un an et demi après le début de la deuxième guerre mondiale ((à un moment où le massacre des Juifs dans la Pologne occupée avait déjà commence) allèrent jusqu’à faire aux autorités fascistes une offre incroyable de coopération. (L’Irgoun qui s’était séparée de la Haganah avant de la rallier à nouveau en 1948, a fait partie intégrante de l’Etat d’Israël depuis  lors ; son vieux leader Menahem Begin a été premier ministre d’Israël de 1967 à 1970 et est actuellement à la tête du groupe parlementaire du Likoud au parlement israélien).

Quelques mois avant cette offre de coopération de janvier 1941, une scission était intervenue entre la faction de l’Irgoun minoritaire alors qui soutenait la Grande Bretagne en guerre contre l’Allemagne nazie et au groupe de ceux qui, à l’intérieur de l’Irgoun, étaient opposés à une telle politique pro-britannique. Abraham Stern, un membre du comité de l’Irgoun, joua un rôle déterminant dans ce dernier groupe qui avait le soutien, à l’époque, de la majorité des membres de l’Irgoun. C’est par des militants antibritanniques de ce groupe que fut faite  la proposition de collaboration de l’Irgoun [avec le nazisme, NdT].

La nature de cette proposition est consignée dans un document dont le texte intégral est encore secret.  Il est évoqué  dans un rapport de l’attaché naval de l’ambassade d’Allemagne en Turquie – un fonctionnaire qui était chargé de missions secrètes là-bas. Le rapport, qui est toujours enfermé dans des archives en Grande Bretagne parle de contacts que l’attaché avait eu avec des émissaires de «l’Irgoun Zvai Leumi (Organisation Militaire Nationale – OMN).» Un mémorandum daté du 11 janvier 1941 parle des «Lignes Fondamentales de la Proposition» de l’Irgoun «concernant la solution de la question juive en Europe et la participation active de l’OMN aux côtés de l’Allemagne.»

On lit ce qui suit dans cette note :

Il est souvent dit dans les discours et les déclarations des plus importants responsables politiques de l’Allemagne Nationale Socialiste qu’un Ordre Nouveau en Europe a pour condition préalable la solution radicale de la question juive par l’évacuation («Judenreines Europa»)

Evacuer les masses juives d’Europe est une pré condition pour résoudre la question juive ; mais elle ne peut être rendue possible et complète que par l’installation de ces masses dans la patrie du peuple juif, la Palestine, et par l’établissement d’un Etat juif dans ses frontières historiques.

Après avoir confirmé de la sorte la convergence fondamentale des vus du sionisme et du fascisme, les militants de l’Irgoun proposaient une alliance avec leur organisation ainsi que l’indique la suite du document :

Cette manière de résoudre le problème juif et donc d’en faire résulter la libération du peuple juif une fois pour toutes, est l’objectif de l’activité politique et des années de lutte du mouvement juif de libération : l’Organisation Militaire Nationale (Irgun Zvai Leumi) en Palestine.

L’OMN qui est bien au fait des bonnes dispositions du gouvernement  et des autorités du Reich allemand à l’égard de l’action sioniste en Allemagne et à l’égard des plans sionistes d’émigration [il faut signaler à ce sujet la coopération entre fascistes et sionistes entre 1933 et 1939 – K.P.] – est d’opinion que :

1     Une communauté d’intérêts pourrait exister entre l’instauration d’un ordre nouveau en Europe en conformité avec la conception allemande et les véritables aspirations nationales du peuple juif telles qu’elles sont incarnées par l’OMN.

 2. La coopération entre la nouvelle Allemagne et une nation hébraïque renaissante (völkisch –nationalen – Hebräertum) serait possible et

3 L’établissement de l’Etat juif historique sur une base nationale et totalitaire et lié par traité avec le Reich allemand serait dans l’intérêt du maintien et du renforcement de la future position de puissance de l’Allemagne au Proche Orient.

Ce qui était proposé était donc ni plus ni moins que l’établissement d’un Etat fasciste juif en Palestine qui serait l’allié du fascisme allemand !

«Sur la base de ces considérations, l’OMN en Palestine propose de prendre activement par à la guerre au côté de l’Allemagne, dès lors que les aspirations nationales susmentionnées du mouvement de libération sont reconnues par le gouvernement du Reich allemand.»  Après avoir ainsi proposé de participer activement avec le fascisme allemand au combat contre le bloc antihitlérien, les sionistes de l’Irgoun poursuivaient en précisant un peu plus leur proposition dans le document :

Cette offre de l’OMN dont la validité concerne les niveaux politique, militaires et du renseignement, à l’intérieur et aussi, selon certains documents préparatoires, à l’extérieur de la Palestine, était conditionnée par la formation militaire et l’organisation de la main d’œuvre juive en Europe sous la direction et le commandement de l’OMN. Ces unités militaires prendraient part aux combats pour conquérir la Palestine en cas de constitution d’un tel front.

La participation indirecte du mouvement israélien de libération à l’instauration d’un Ordre Nouveau en Europe, déjà dans sa phase préparatoire, serait associée à une solution radicale et positive du problème juif en Europe en conformité avec les aspirations nationales susmentionnées du peuple juif. Ce qui renforcerait  de manière exceptionnelle la base morale de l’Ordre Nouveau aux yeux du monde entier.

La coopération du mouvement israélien de libération serait aussi dans la ligne d’un des récents discours du Chancelier du Reich Allemand dans lequel Hitler soulignait que toutes les combinaisons et toutes les alliances pouvaient être envisagées dans le but d’isoler l’Angleterre et de la vaincre.

Il est inutile de commenter plus avant ce document étonnant. On doit seulement ajouter que ce sont l’antisémitisme et le travail de liquidation qui avait déjà commencé pour éliminer les Juifs Européens qui avaient empêché le fascisme allemand d’accepter cette proposition d’alliance. Mais deux ans plus tard, l’Irgoun se lançait dans des attaques terroristes contre des institutions britanniques au Proche Orient, travaillant ainsi à l’affaiblissement de l’alliance contre Hitler dans son combat contre le fascisme allemand, un combat qui permettra aussi de secourir les Juifs Européens.

Conclusion

Chaque fois que la coopération entre les sionistes et les fascistes est révélée, les auteurs sionistes recourent à l’excuse toute prête selon laquelle les contacts avec les nazis n’avaient été noués que dans le seul but de sauver des Juifs. Alors même que certains faits mentionnés précédemment contredisent cette thèse, on peut poser les deux questions suivantes aux tenants de cette thèse : N’y avait-il vraiment aucun autre moyen de sauver les Juifs Européens ? Etait-ce le véritable motif des sionistes pour pactiser avec le diable ?

 On ne peut douter du fait que la seule possibilité pour empêcher le massacre de millions de Juifs (ainsi que d’éviter la seconde guerre mondiale qui a causé des millions de morts) consistait à renverser la dictature fasciste quand elle en était au tout début de sa phase de domination. Mais les dirigeants sionistes n’étaient pas intéressés par cette perspective – leur seul objectif étant d’augmenter le nombre de Juifs dans la population de la Palestine. Comme ils partageaient la vision anti-assimilationniste du nazisme concernant la race juive, ils ne considéraient pas la dictature fasciste comme une tragédie. Comme l’avait expliqué David Ben Gourion : «Ce que des années de propagande sioniste n’avaient pas pu faire, ce désastre l’avait réalisé en l’espace d’une nuit.»

Non seulement les chefs sionistes ne firent rien contre le fascisme, mais ils entreprirent des actions qui sabotèrent le front antifasciste (en empêchant un boycott économique avec leur accord Haavara).  En pratique, ils rejetèrent des tentatives pour sauver les Juifs Allemands dès lors qu’elles n’avaient pas pour but l’installation des Juifs en Palestine. L’exemple qui suit est celui de la conférence d’Evian : quand après 1933 la majorité des pays capitalistes refusa d’accueillir les réfugiés Juifs d’Allemagne, le président Américain Roosevelt appela à la réunion à Evian d’une conférence sur les réfugiés. Cette conférence se tint du 6 au 15 juin 1938 avec la participation de 32 pays capitalistes. La conférence échoua étant donné que les participants refusèrent d’accueillir les réfugiés Juifs. On aurait pu supposer que le mouvement sioniste, qui était aussi représenté à Evian, aurait essayé de faire pression sur les gouvernements pour qu’ils lèvent leurs restrictions. Mais les sionistes déposèrent au contraire une motion dès le début de la conférence pour demander l’admission d’1,2 million de Juifs en Palestine. Ils n’étaient pas intéressés par d’autres solutions et, comme l’écrira plus tard Christopher Sykes : «Ils avaient manifesté une indifférence hostile à l’égard de l’ensemble du processus dès le tout début… la vérité à ce propos est que la démarche tentée à Evian ne correspondait absolument pas à l’idée sioniste.»

Les dirigeants sionistes partagent donc la responsabilité de l’échec à secourir un plus grand nombre de Juifs Européens. On doit en toute justice se souvenir que les Juifs qui ont survécu à la monstrueuse domination du fascisme ont été sauvés par les soldats du bloc antihitlérien, et particulièrement à ceux de l’armée soviétique qui a consenti un terrible sacrifice pour vaincre la dictature fasciste.

Depuis Tel Aviv, Madonna la stupide provoque la stupeur à Paris

2 juin 2012

La chanteuse Madonna « provoque la stupeur » peut-on lire dans la presse. En effet, 

Une vidéo diffusée sur un écran géant lors d’un concert de Madonna, tournée le 31 mai à Tel Aviv (Israël) provoque la stupeur ce vendredi. Dans cet extrait (l’interlude de la chanson «Nobody Knows Me») du «MDNA World Tour», un montage photo dévoile des images de Marine Le Pen, une croix gammée dessinée sur le front. Suivent plusieurs autres photos de dirigeants politiques et religieux dont Hitler et le Pape Benoît XVI, et des extraits de combat. Des acrobates dansent sur des fils sur la scène, dont est absente la chanteuse américaine.

C’est quand même méchant de faire ça à une présidente du Font National qui fait tout ce qu’elle peut pour se rapprocher des sionistes! Marine Le Pen succède donc à son père dans le repoussoir selon Madonna, puisque la chanteuse américaine avait associé dans un clip de 2006 Jean-Marie Le Pen à Saddam Hussein et Oussama ben Laden.

Je pense que Madonna aurait été mieux inspirée et sans doute plus courageuse en associant Benjamin Netanyahou au nazisme, ou encore ce rabbin Shteinman adepte de la supériorité raciale qu’écoute attentivement l’ambassadeur de France à Tel Aviv.. Elle aurait pu en fait prendre n’importe quel sioniste pour remplacer avantageusement la dirigeante du Front National.

Parce que même si les idées de Mme Le Pen doivent être fermement combattues (et on remarquera que M. Sarkozy a exprimé des idées assez semblables avant et pendant la campagne présidentielle), elle n’a pas de sang sur les mains, n’a participé de près ou de loin à l’occupation d’aucun territoire.et n’est pour rien dans le blocus de Gaza.

Elie Wiesel et les victimes non juives de Toulouse et Montauban

25 mars 2012

Je vous disais qu’Elie Wiesel avait pondu un texte sur les crimes commis dans le sud-ouest de la France dans lequel il ne s’intéresse qu’aux victimes juives du tueur.

En effet, si M. Wiesel observe justement que Juifs et non juifs sont unis dans le chagrin consécutif à l’assassinat du rabbin et des trois écoliers devant l’école privée juive de Toulouse, les victimes non juives n’ont-elles droit à rien du tout dans son article.

Les autres victimes n’ont tout simplement jamais existé.

 Et elles ne peuvent effectivement pas exister dans le récit que fait M. Wiesel pour qui la tuerie de Toulouse n’est qu’une répétition des agissements de Hitler qui lui-même répétait les agissements de Pharaon. Appréciez l’érudition de M. Wiesel qui nous apprend que Pharaon allait massacrer les enfants Juifs dans leurs écoles !

Il s’agit donc d’une vieille histoire, avec des Juifs en victimes et non juifs en bourreaux, appelée à se répéter après des phases de répit toujours provisoire car, comme le dit Elie Wiesel lui-même, la sympathie des non juifs à l’égard des Juifs est seulement temporaire, jamais acquise définitivement.

On peut se poser alors la question : pourquoi ? Comment Elie Wiesel explique-t-il ce qui est un fait selon lui ?

 «La tragédie de Toulouse»

Par Elie Wiesel, The Houston Chronicle (USA) 21 mars 2012 traduit de l’anglais par Djazaïri

La haine des Juifs finira-t-elle par disparaître ? Les enfants Juifs seront-ils toujours en danger ?

Cette fois, un meurtrier a tué quatre Juifs: un enseignant et trois jeunes enfants.

Quand un assoiffé de sang qui déteste les juifs [Jew-hater] veut tuer des juifs, il va d’abord dans les écoles juives. Les enfants Juifs sont sa cible principale.

Il en a toujours été ainsi. C’est ce que fit Pharaon, le roi d’Egypte, c’est ce que fit Hitler. Et c’est ce qui vient de se passer maintenant.

Tel est le contexte de la tragédie qui s’est produite dans la ville française de Toulouse.

J’ai visité cette ville maintes fois. La communauté juive y est ancienne et bien établie – elle remonte au Moyen Age  –  mais elle est dynamique.

Dans les rues, on peut voir des juifs qui portent la kippa. Personne ne pense à l’antisémitisme. C’est une des communautés juives de France les plus riches spirituellement.

A l’évidence, cette agression meurtrière a provoqué larmes et colère chez les Juifs comme chez les non juifs. Le président, ses ministres et d’autres personnalités politiques en France, ainsi sue tous les journaux, ont exigé que les meurtriers soient trouvés et punis.

 Ca se passe souvent ainsi. Du sang juif est versé et, temporairement, la sympathie pour les Juifs augmente ; le monde leur ouvre les bras.

Mais la douleur ne disparaît pas, pas plus que la colère. Nous pensons aux martyrs : le rabbin Yochanan Sandler, ses enfants Aryeh et Gavriel, et Miriam Monsonego. Nous disons, comme la tradition juive : « Puisse Di.u venger leur sang. » Ce sera la réponse du Très Haut.

Notre propre réponse doit être concrète et précise. Quand nous sommes persécutés, notre réponse doit être : nous resterons Juifs – et ferons tout pour être encore plus Juifs.


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