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Un début de réponse sur l’identité des assassins de trois soldats Libanais à Arsal

31 mai 2013

Le risque d’une contagion de la crise syrienne au Liban est une réalité palpable depuis le début et on en a parlé sur ce blog. Les signes inquiétants  tendent en effet  à se multiplier, en relation avec les difficultés que traverse en ce moment l’opposition au régime baathiste, désunie politiquement et mise à mal militairement.

Parmi les signaux préoccupants, il y a eu les agressions sectaires à Tripoli contre la minorité alaouite de cette ville.

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Patrouille de l’armée libanaise à Tripoli. Sous l’oeil bienveillant du monarque Saoudien, militant démocrate bien connu

Et bien sûr, la mort de trois soldats de l’armée libanaise tués mardi 28 mai

près d’Arsal, dans un secteur par lequel les rebelles syriens font entrer armes et combattants en provenance du Liban. «Les soldats du point de contrôle ont fait face aux assaillants et une fusillade, qui s’est soldée par la mort de trois militaires, s’est ensuivie», a affirmé l’armée libanaise, dans un communiqué. Les hommes armés pourraient être passés en Syrie, a dit le ministre de la Défense, Fayez Ghosn.

Pour les milices hostiles au gouvernement syrien, Arsal est une agglomération stratégique  par laquelle transitent argent, hommes et matériels acheminés vers le territoire syrien, notamment vers la ville proche d’al Qussayr qui est en ce moment l’enjeu de rudes combats.

L’assassinat des trois soldats a été unanimement condamné au Liban, que ce soit par l’ancien premier ministre Saad Hariri ou par le mouvement Amal et le Hezbollah.

Se pose donc la question de savoir qui étaient les tueurs des trois soldats dont la presse nous qu’ils se sont enfuis en direction de la Syrie après avoir commis leur acte.

Ça tombe bien, L’Orient le Jour nous apprend justement que

Deux personnes soupçonnées d’être impliquées dans le meurtre de trois soldats près de Ersal, dans l’est du Liban, ont été arrêtées, affirme la chaîne de télévision LBC, sans donner plus de précisions.

Et les précisions que ce journal libanais francophone n’a pu obtenir,  le Daily Star, son homologue anglophone les a obtenues et on peut lire ce qui suit :

Des agents du renseignement militaire ont arrêté Mamdouh al-Wazir, le frère du suspect Mashoud al-Wazir dans la vallée de la Bekaa dans le courant de la nuit.

On pense que Mashhoud est impliqué avec deux autres personnes dans l’attaque de mardi contre un point de contrôle de l’armée libanaise à Wadi Hmeid, dans la périphérie d’Arsal qui a causé la mort de trois soldats, selon notre source.

Lejournal libanais As-Safir indique dans un article détaillé ce vendredi que deux suspects pour l’attaque d’Arsal ont été arrêtés.

Il s’agit d’une infirmière libanaise dont les initiales sont A. Sh et d’un Libanais qui ont loué et livré un Hummer à un troisième suspect, M. W., un Syrien qui habite à Chtaura et dont on pense qu’il a réalisé l’attaque.

Selon As-Safir, M.W.est entré au Liban par la région frontalière nord de Wadi Khaled après avoir été blessé à Homs, dans le nord de la Syrie. Le journal indique que M. W. combattait avec le Bataillon Yarmouk qui fait partie du jabhat al-Nosra.

Selon le journal, M. W. avait été transféré dans un hôpital d’Etat à Tripoli où il a subi une intervention chirurgicale et où il est resté pour trois mois de rééducation pendant lesquels il a fait la connaissance de l’infirmière A. S.

A la mi-mai, M. W. a passé plusieurs jours dans la ville côtière du nord (Tripoli) et a consulté des financeurs Syriens avant de se rendre dans un lieu inconnu.

Il y a une semaine, selon As-Safir, M. W. a contacté A. S  et lui a demandé de louer un véhicule tout terrain, quel que soit le tarif de la location. A. S., indique le journal, avait demandé à un de ses voisins, A.M. de visiter un certain nombre de commerces d’automobiles où il a trouvé un Hummer à louer.

M. W. a viré à A. M. une somme de 600 dollars pour trois journées de location.

Le journal écrit que M. W. a ensuite gardé le silence pendant un certain temps et n’a plus répondu à aucun appel. C’est pendant cette période que l’attaque contre l’armée a eu lieu, dit le journal qui ajoute qu’on soupçonne qu’un Hummer a été utilisé par les agresseurs.

 La mort des trois soldats Libanais est une fois de plus l’oeuvre de ceux qui s’opposent par les armes au régime syrien et qui sont prêts à noyer leur déroute dans le sang libanais puisque celui des Syriens leur sera peut-être bientôt interdit.

Quel avenir pour le Hezbollah sans le régime de Damas?

6 août 2012

As’ad AbuKhalil, alias Angry Arab, est un des meilleurs connaisseurs de la scène politique du Proche – Orient et notamment du Liban dont ce professeur de sciences politiques à l’université de Californie est originaire.

As’ad AbuKhalil

Il ne lui a pas échappé que certains guettent avec impatience la chute du régime baathiste en Syrie parce qu’ils pensent qu’elle signerait aussi la fin du Hezbollah, ce mouvement libanais qui a tenu la dragée haute à l’entité sioniste en 2006 (dans le respect d’une éthique du combat sans commune mesure avec la crapulerie des hordes sionistes).

As’ad AbuKhalil n’est pas de cet avis et il pense que non seulement l’avis de décès du Hezbollah est prématuré mais qu’une disparition du régime actuel en Syrie pourrait au contraire renforcer le poids et la liberté d’action du mouvement dirigé par le cheikh Nasrallah.

Et qu’à terme, c’est l’ordre imposé par les Etats Unis et l’Arabie Saoudite au Liban qui pourrait être remis en cause de fond en comble. 

Bon, mais le régime de Damas n’est pas encore tombé malgré bien des pronostics. On verra s’il est capable de se maintenir, ce qui dépendra en bonne partie, mais pas seulement car ses ennemis ont adopté  plusieurs scénarios, de l’issue de la confrontation à Alep.

Un texte ma foi fort intéressant, comme souvent avec Angry Arab

Le Hezbollah sans la Syrie

par As’ad AbuKhalil, al-Akhbar (Liban) 6 août 2012 traduit de l’anglais par Djazaïri

Au moment où nous parlons, les notices nécrologiques pour le Hezbollah sont en cours d’impression. Il est supposé que la chute «inévitable» du régime syrien mettra «inévitablement» fin à l’histoire du Hezbollah. Les ennemis du Hezbollah en Israël et chez ses clients dans la région débouchent déjà les bouteilles de Champagne. Mais cette nécrologie est prématurée. Ce n’est pas encore fait – tant s’en faut.

Il y a beaucoup d’hypothèses et de généralisations erronées au sujet du Hezbollah. Le Hezbollah a émergé et a étendu son influence pendant des années d’adversité avec le régime syrien. En 1982, année de naissance du Hezbollah, il n’était à la base qu’une scission) du mouvement Amal (dont il était la principale branche).

Amal était un client du régime syrien, et le Hezbollah et Amal islamique – le nom de l’organisation qui a fait scission d’Amal sous la direction de Hussain Moussaoui – était un client d’une aile radicale du régime iranien. Le régime soutien était très inamical à l’égard du Hezbollah et le parti ne pouvait opérer qu’à Beyrouth – Ouest parce que le régime syrien avait quitté la ville. C’est seulement en 1987 que le régime syrien revint dans la ville, inaugurant son retou tpar un massacre de combattants du Hezbollah dans le caserne Fathallah.

L’animosité entre les deux parties n’a jamais cessé même si Nasrallah et Bachar al-Assad ont amélioré les relations. Mais le régime syrien a toujours fait pression sur le Hezbollah pour qu’il s’abstienne de remporter une majorité absolue aux élections parlementaires et le Hezbollah s’en est toujours plaint.

Mais comme on peut le voir dans la chronique historique de ce mouvement, le Hezbollah a pu et a réussi à survivre sans le soutien du régime syrien. Si le régime syrien tombe – et il tombera certainement sauf que ce genre de prédiction est faire au moins une fois par semaine depuis plus d’un an – le Hezbollah survivra et pourrait même se développer pour devenir plus fort et encore plus dangereux.

Le Hezbollah aura perdu le soutien d’un important régime qui aura fait de son mieux pour renforcer sont organisation militaire, tout en favorisant –  politiquement parlant – le mouvement Amal. Mais le Hezbollah conserve une importante organisation qui – c’est du moins ce que disent ses ennemis – couvre le monde entier.

L’effondrement su régime syrien pourrait lever des restrictions et des interdits [posés par la Syrie] aux activités et au mouvement du Hezbollah et pourrait accroître sa marge de manœuvre. Sans le régime syrien, le Hezbollah n’aura plus à s’inquiéter de savoir s’il gêne ou déplaît au régime syrien.

A coup sûr,  le Hezbollah restera loyal au régime iranien, mais il jouira – c’est une certitude sous la direction de Nasrallah – d’une large indépendance dans sa prise de décision.

Sans le régime syrien, le Hezbollah pourrait être contraint de mettre l’accent sur sa branche militaire (la résistance) et peut-être de marginaliser sa branche politique. Mais les ennemis du Hezbollah oublient une pièce importante du puzzle : si le régime syrien tombe, il ne sera pas remplacé du jour au lendemain par un pouvoir central qui assurera tout simplement la continuité de l’Etat avec un contrôle sécuritaire fort. Loin de là car la disparition du régime aura pour résultat une fragmentation géographique et une décentralisation politique qui n’empêcheront pas les relations du Hezbollah avec certaines parties de la Syrie.

De plus, si le régime tombe, le Hezbollah et ses alliés ne se contenterons pas de regarder les évènements à la télévision. A ce stade, le conflit syrien va inévitablement – encore ce mot – se traduire par une importante reconfiguration politique au Liban, et pas nécessairement en faveur des amis des Etats Unis et de l’Arabie Saoudite. Si la Syrie tombe, l’ordre établi par les USA et l’Arabie Saoudite au Liban tombera avec également, mais pas immédiatement. Cet ordre disparaîtra après une longue période de conflit interne – on peut dire la même chose de la Syrie.

Le Hezbollah s’est préparé à l’éventualité d’un effondrement su régime syrien. Il dispose aujourd’hui d’une vaste organisation et de ses propres ressources et sources de financement. Les gens oublient que le régime syrien est connu pour être très près de ses sous. Il donne rarement de l’argent à ses alliés. Le Hezbollah survivra sans le régime syrien, mais ce sera une organisation différente. Et ce ne sera pas au goût d’Israël et de ses amis dans la région.


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