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Expulsée d’une mosquée londonienne, ou le mensonge d’une journaliste britannique

7 février 2015

Voilà ce qu’on pouvait lire dans « Courrier International » qui reprenait la presse britannique.

La journée « Visite ma mosquée » marquée par une bévue vis-à-vis d’une journaliste

Le Conseil musulman britannique organisait hier une journée « portes ouvertes » dans des mosquées du pays. Une opération globalement réussie, jugent les journaux, hormis un incident « sexiste » – une journaliste a été refoulée à l’entrée d’un établissement.
Des visiteurs à la mosquée de Finsbury, à Londres, le 1er février 2015 - AFP/Ben Stansall
Des visiteurs à la mosquée de Finsbury, à Londres, le 1er février 2015 – AFP/Ben Stansall

Portes ouvertes, thé et gâteaux pour les non-croyants : hier n’était pas une journée comme les autres dans une vingtaine de mosquées d’outre-Manche, puisque le Conseil musulman britannique organisait la journée #VisitMyMosque (« Visite ma mosquée »). Cet événement inédit « était organisé après que le Conseil musulman britannique se fut inquiété d’un sentiment anti-musulman, après le meurtre de 17 personnes à Paris le mois dernier », note The Independent.

Journée de tolérance

L’événement a connu un certain succès, note le quotidien, qui rapporte le témoignage de Britanniques non musulmans heureux de leur visite, notamment dans une mosquée de l’est de Londres, où une cinquantaine de visiteurs se sont rendus. Les uns y sont allés « pour rencontrer des musulmans qui ne sont pas à la télévision », les autres pour « dépasser leur crainte de finir par croire à la propagande ». Les non-croyants ont pu visiter la mosquée, assister à la prière des hommes, puis des femmes, avant de terminer par la visite d’une petite exposition sur l’histoire de l’établissement, construit en 1986.

Parmi les établissements qui ont ouvert leurs portes, la mosquée de Finsbury, « dont l’histoire récente a été marquée par [la présence] de membres extrémistes », rappelle de son côté The Guardian. L’établissement souffre toujours d’une mauvaise réputation, causée par le passage en ses murs de figures extrémistes notoires comme Abou Hamza, qui « a pris le contrôle de la mosquée à la fin des années 1990 et l’a transformée en l’un des plus importants centres de l’islam radical en Grande-Bretagne », avant d’être arrêté en 2003 et d’être condamné à la prison à perpétuité aux Etats-unis, explique le journal. Mais la plupart des visiteurs qui se sont rendus hier à la mosquée de Finsbury ont été séduits par la visite et par la rencontre avec les pratiquants, poursuitThe Guardian, qui salue cette « journée de tolérance ».

« Jetée à la rue »

Pourtant, un « couac » de taille a quelque peu entamé le succès du #VisitMyMosque Day : la journaliste de Channel 4 Cathy Newman a été refoulée à l’entrée de la mosquée de Streatham, à Londres, note The Independent. Sur Twitter, elle a expliqué « avoir été surprise de se retrouver mise à la porte ». « J’étais habillée comme il faut, la tête couverte et les pieds nus, mais un homme m’a mise à la porte. J’ai dit que j’étais là pour la journée ‘Visite ma mosquée’, mais cela n’a rien changé. » Immédiatement, des réactions ont fusé sur le réseau social, notamment celle de Louise Mensch, une responsable du parti conservateur, qui a parlé d’un « gigantesque raté misogyne », regrettant que Cathy Newman ait été « jetée à la rue ».

Le Conseil musulman s’est excusé pour cet « incident », expliquant que l’établissement en question ne participait pas à la journée portes ouvertes, et que Cathy Newman s’était rendue « dans la mauvaise mosquée ». « Ce n’est pas parce qu’elle est une femme [qu’elle s’est vu refuser l’entrée], mais parce que l’établissement ne faisait pas de ‘portes ouvertes’ ce jour-là », a expliqué l’organisation. La journaliste de Channel 4 a indiqué s’être rendue ensuite dans une autre mosquée, où elle a été « chaleureusement accueillie ».

La journée Visite Ma Mosquée s’est donc globalement bien passée n’était cet incident avec Cathy Newman, la journaliste de la Chaîne de télévision Channel 4 qui a été refoulée d’un lieu de culte musulman londonien.
Cathy Newman de Channel 4

Cathy Newman de Channel 4

Cet incident dépasse la simple anecdote parce que non seulement les tweets de la journaliste ont servi d’argument à certains politiciens comme on peut le lire dans l’article ci-dessus mais aussi parce que la mosquée incriminée a ensuite reçu un flot d’insultes par internet et même des menaces de mort par téléphone.
Comme on peut le lire aussi, les responsables de la dite mosquée ont présenté leurs excuses à la présentatrice télé.
Ils l’ont fait à tout hasard car ils n’étaient pas vraiment informés de l’existence d’un incident.
Pour la simple raison que l’incident n’a pas eu lieu et que la journaliste a fait preuve de mauvaise foi dans cette affaire.
Cette mauvaise foi a été démontrée par la diffusion auprès du public d’un enregistrement de la caméra de surveillance de la mosquée qui montre que si, en effet, Mme Newman s’est bien présentée dans une mosquée où elle a ôté ses chaussures après être entrée dans le vestibule, elle n’en a nullement été refoulée mais en est sortie sans contrainte après avoir eu une brève conversation avec un homme.
De son côté l’homme croyait que cette femme était à la recherche d’une église et lui indiquait donc où se trouvait l’église du quartier, tandis que pour sa part,  la journaliste  s’était trompée de mosquée.
Mme Newman était de fait attendue dans une autre mosquée assez proche où elle devait rejoindre son équipe de tournage déjà sur place.
Cathy Newma a reconnu avoir été bien accueillie à la mosquée Hyderi où elle af inalement rejoint son équipe de tournage

Cathy Newman a reconnu avoir été bien accueillie à la mosquée Hyderi où elle af inalement rejoint son équipe de tournage

Par ailleurs la mosquée où elle s’était présentée ne participait pas à l’opération de la journée Visite Ma Mosquée.
Mme Newman a présenté ses excuses pour ce qu’elle qualifie de malentendu.
A mon avis, elle ne s’était surtout pas rendu compte de l’impact que peuvent avoir les tweets d’une personnalité publique dont les messages sont suivis par plus de 70 000 abonnés. Des tweets qui de plus sont d’autant plus crédibles qu’ils entrent en résonance avec les représentations prédominantes sur la vision des femmes en Islam.Ce qui est étonnant de la part de quelqu’un qui travaille pour un grand média audiovisuel comme Channel 4.
La presse britannique rapporte généralement en détail ces éléments correctifs avec photos et vidéo à l’appui.

Malheureusement, le mal a été fait car, comme le dit Esmat Eraj, une des responsables de de l’Hyderi islamic Centre qui a si bien accueilli la journaliste,  les allégations de Mlle Newman ‘alimentent l’islamophobie.’
 

Un journaliste anglais dénonce la lâcheté de son gouvernement devant le lobby sioniste

18 décembre 2012

En lisant ce texte, je me suis demandé si Peter Oborne n’avait pas tout simplement peur d’un déferlement de juifs en Grande Bretagne suite à la disparition possible du fameux Etat juif dont pratiquement personne ne veut dans une région où il s’est imposé par la force.

Quoi qu’il en soit, Peter Oborne dénonce avec force le poids du lobby sioniste dans son pays, spécialement auprès du parti Conservateur dont il semble être proche.

Peter Oborne: "Plus british que moi, impossible."

Peter Oborne: « Je n’entends plus Big Ben. »

On le rassurera sur le fait que les travaillistes ne sont pas en reste de ce côté-là.

Tout ce que dit Peter Oborne peut s’appliquer mutatis mutandis à la France.

 A l’heure où j’écris, l’article de Peter Oborne a suscité 2176 commentaires de lecteurs, 559 tweets, 2 000 partages sur Facebook.

La lâcheté au cœur de notre relation avec Israël

La réticence honteuse des conservateurs à critiquer Tel Aviv met en péril tout espoir de paix

par Peter Oborne, The Daily Telegraph (UK) 12 décembre 2012 traduit de l’anglais par Djazaïri

Il est impossible de comprendre le parti Conservateur moderne sans bien appréhender l’échelle et la profondeur de sa relation avec l’Etat d’Israël. Cette relation remonte au moins aussi loin qu’à la rencontre historique entre le grand dirigeant sioniste Chaim Weizmann et le premier ministre conservateur AJ Balfour en 1905, quand Weizmann avait convaincu Balfour sur la question de l’Etat national juif.

Cette relation chaleureuse initiée il y a 107 ans est aujourd’hui entretenue par les Conservative Friends of Israel (CFI, les amis Conservateurs d’Israël). Quelque 80 % de tous les parlementaires tories [conservateurs] en sont membres, dont la plupart des ministres. Aucune autre organisation de lobbying – et certainement aucune de celles qui oeuvrent dans l’intérêt d’un pays étranger – n’a autant d’influence à Westminster. Chaque année, CFI emmène un certain nombre de parlementaires en Israël. Dans le même temps, les sponsors des CFI jouent un rôle important pour financer le parti Conservateur au niveau national et ses députés au niveau local.

Il est hors de doute que les CFI ont exercé une influence puissante sur la politique britannique. L’historien et politicien conservateur Robert Rhodes, écrivant dans le Jerusalem Post en 1995, qualifiait CFI de «plus grande organisation en Europe occidentale consacrée à la cause du peuple d’Israël.» Sa puissance ne s’est pas démentie depuis. Ce mardi, CFI a accueilli environ 100 députés conservateurs, dont six membres du gouvernement, ainsi que 40 pairs du royaume pour un dîner au centre ville de Londres. L’orateur était David Cameron, qui s’est présenté lui-même comme un «ami passionné » d’Israël, précisant (ainsi qu’il l’a fait par le passé) que rien ne pouvait briser cette amitié.

On peut considérer ce discours comme s’insérant dans tout un ensemble. Les CFI peuvent appeler presque à volonté le premier ministre, le Chancelier de l’Echiquier ou le ministre des affaires étrangères. Les palestiniens ne jouissent pas de telles entrées. Ils s’estimeraient chanceux d’avoir un seul député conservateur pendant les manifestations qu’ils organisent, et peut-être un pair moribond pour prononcer un discours.

Il n’existe aucune organisation comme les Amis Conservateurs de la Palestine (Conservative Friends of Palestinians).

Ce manque d’impartialité se reflète dans la politique britannique. Quand William Hague avait dénoncé l’offensive d’Israël contre le Liban en 2006 comme «disproportionnée,» les CFI (ainsi que je l’avais révélé dans un documentaire sur le lobby pro-israélien pour l’émission Dispatches sur Channel 4) avait protesté auprès de David Cameron en personne. Ils avaient obtenu la promesse que ce mot ne serait plus utilisé à nouveau – la promesse a été tenue quand Israël a bombardé Gaza le mois dernier, alors même que le nombre de tués du côté palestinien était beaucoup plus important que du côté israélien.

En qualité de ministre des affaires étrangères, Hague a répété sans sourciller les affirmations discutables d’Israël selon lesquelles le Hamas avait déclenché les hostilités (il y a eu des provocations des deux côtés, mais ce qui m’a frappé, c’est que le moment crucial de l’escalade a été l’exécution extrajudiciaire d’Ahmed Jabari, le commandant du Hamas). La Grande Bretagne a par la suite cédé aux pressions israéliennes et refusé de soutenir la candidature de la Palestine à une plus grande reconnaissance par les Nations Unies. Récemment, nous avons convoqué l’ambassadeur israélien pour une engueulade amplement méritée pour le programme de colonisation, mais cela s’inscrivait dans le cadre d’une action concertée avec un grand nombre d’autres pays européens et n’a pas fait l’objet d’un suivi.

Pour être juste envers ce gouvernement, Tony Blair était pire, semblant parfois considérer les intérêts d’Israël et de la Grande Bretagne comme identiques, et refusant même d’appeler à un cessez-le-feu pendant un certain temps après le début de l’effroyable guerre du Liban (en 2006). William Hague et David Cameron ont essayé d’être plus fermes.  Ils ont malheureusement largement échoué. Il est difficile de savoir avec certitude à quel point cette réticence à critiquer Israël est due à l’influence du lobby israélien en Grande Bretagne ou à la crainte de mécontenter les Etats Unis qui sont le patron d’Israël dans le monde.

La position officielle du gouvernement est excellente. La Grande Bretagne soutient la solution à deux Etats qui a été à la base de toutes les discussions sérieuses de paix depuis les accords d’Oslo il y a 20 ans. Le problème est que les ministres refusent toutes les démarches concrètes pour parvenir à cette solution. Par exemple, ils condamnent les colonies, mais ne le font qu’avec hésitation (le premier ministre a consacré 64 mots à cette question mardi dernier contre près de 300 pour la menace iranienne).

C’est de la lâcheté. Il y a des moments dans la vie personnelle comme dans la vie politique où l’amitié implique bien autre chose que le genre de géniales tapes dans le dos par lesquelles le premier ministre a traité le lobby israélien mardi. La vérité brutale est que Benjamin Netanyahou conduit son pays sur le chemin de l’autodestruction. Si on le laisse faire avec ses derniers programmes de construction de colonies, tous les espoirs de paix au Moyen orient disparaîtront et mourront.

Mark Simmonds, un ministre délégué auprès du ministre des affaires étrangères, l’a reconnu officiellement dans débat au parlement très révélateur mais non répercuté par la presse, déclarant, quelques heurs à peine après le dîner de mardi avec les CFI : «Je pense que la porte commence à se refermer sur la possibilité réelle d’une solution à deux Etats . « William Hague croit maintenant que la construction de colonies la rendra totalement impossible dans deux ans au plus».

Nous nous retrouverions alors avec un Grand Israël s’étirant du fleuve Jourdain à la mer Méditerranée. Certes, c’est une entité géographique plus homogène que la situation confuse que produirait une tentative de ramener Israël à ses frontières de 1967. Mais les palestiniens se retrouveraient soudain majoritaires. Israël serait alors devant l’alternative de choisir de préserver sa démocratie, mais en cessant d’être un Etat juif, ou d’adopter une forme d’apartheid dans lequel les palestiniens se verraient refuser des droits élémentaires.

A en juger par la rhétorique de M. Netanyahou et des alliés de sa peu ragoûtante coalition, c’est probablement le choix qui a lé préférence des actuels dirigeants israéliens.

Lundi soir, un ancien ambassadeur de Grande Bretagne en Israël, l’hébraïsant Sir Sherard Cowper-Coles, a prononcé un discours éloquent dont un passage est important à relever : «Je crois passionnément que le chemin qu’emprunte en ce moment Israël l’embarque sur la voie su suicide assisté. Un suicide assisté par le Congrès des Etats Unis. L’idée que le problème puisse être réglé  en enfermant les palestiniens dans un équivalent moyen-oriental des Bantoustans comme l’avait fait le gouvernement sud-africain à partir des années 1940, n’est pas seulement choquant du point de vue moral mais est en profonde contradiction avec tout ce que nous savons de l’histoire de l’humanité. Et toute personne qui a une véritable afection pour le peuple juif voudra l’aider à éviter ce désastre prévisible.»

Tous les dirigeants du parti Conservateur se situent comme dignes successeurs d’A J Balfour qui, (en qualité de ministre des affaires étrangères en 1917) signa la déclaration qui reconnaissait aux juifs le droit à leur propre patrie (homeland). J’ai la conviction que cet héritage fait que M. Cameron a une relation particulière avec israël – et une responsabilité particulière. Ce qui signifie qu’il est dans ses prérogatives de dire clairement aux actuels dirigeants israéliens qu’ils agissent tristement  de manière lamentable et futile. Compte tenu de l’inertie d’un président Obama sous intimidation, il est très important que le premier ministre britannique aille de l’avant.

Je ne peux pas parler au nom de la communauté juive britannique, mais j’ai la nette impression que beaucoup de ses membres seraient ravis si M. Cameron s’exprimait avec plus de fermeté qu’il ne l’a fait jusqu’à présent. En fait, il est essentiel qu’il le fasse. M. Cameron ne veut pas rester dans l’histoire comme étant celui qui a regardé disparaître tous les espoirs d’une solution à deux Etats, et avec elle l’espoir d’un avenir de sécurité et de paix pour le pays qu’un premier ministre conservateur a contribué à faire exister.

Journalistes envoyés à la mort en Syrie (ou de l’art consommé de la propagande)

8 juin 2012

En Syrie, la propagande occidentale bat son plein sur le mode qui lui est caractéristique et que nous avons vu à l’œuvre tout récemment en Libye et, il y a quelques années de cela, en Yougoslavie. Les massacres sont effectués avec un timing d’une rigueur impressionnante, de sorte à coïncider avec des échéances diplomatiques sensées prendre en charge l’indignation de l’opinion.

 Une indignation à laquelle n’ont pas droit, ça va de soi ,les Pakistanais ou les Afghans écrasés sous les bombes des bienfaiteurs US. Pas plus que les Palestiniens de Gaza en 2008-2009 où les Libanais en 2006. Pourtant vous ne trouverez pas un seul pays occidental qui ne se dit pas ami du Liban…

Dans la guerre de propagande, la mort de journalistes peut-être une bonne affaire et les opposants armés au gouvernement syrien l’ont bien compris qui n’hésitent pas à conduire des journalistes européens vers ce qui aurait dû être leur mort assurée.

C’est la mésaventure qui est effectivement arrivée à Alex Thomson, un journaliste de la chaîne de télévision anglaise Channel 4 et qu’il relate dans son blog.

Envoyés à la mort dans un no man’s land syrien ?

Par Alex Thomson, Channel 4 (UK) 8 juin 2012 traduit de l’anglais par Djazaïri

Debout devant l’hôtel Safir à Homs pendant que les 4X4 blancs de l’ONU attendaient,  l’officier Irlandais  responsable est arrivé et nous adit : « Les règles habituelles Ales, OK ? Nous ne sommes pas responsables de bous, les gars. Si vous êtes dans les problèmes, on vous laissera, OK ? Vous êtes autonomes.»

 «Ouais – pas de problème Mark. C’est compris.»

Je dis toujours ça, façon de croire qu’on ne se trouvera jamais devant une telle éventualité.

Seulement deux véhicules de l’ONU plus la voiture blanche de la police locale marquée « Protocole » comme escorte, nous allons vers le sud à travers des quartiers paisibles de Homs non touchés par la guerre.

Dix minutes à peine après avoir quitté la ville par le sud, et on dit adieu au protocole. Le dernier point de contrôle de l’armée syrienne est tout droit sur l’autoroute du sud vers Damas.

Nous allons vers l’est – il n’y a qu’à suivre la direction vers laquelle pointe la tourelle du blindé à côté duquel est garée la voiture du protocole pour se faire une idée.

Il y a toujours cette petite boule dans l’estomac quand on circule dans les no man’s lands désertés, mais c’est la rase campagne, sans signes de combats.

Maintenant, les premières motocyclettes nous approchent et nous arrivons au premier checkpoint de l’Armée Syrienne Libre.

Après une longue demi-heure de pistes à travers des oliveraies, nous arrivons à al Qusayr et la prévisible scène de foule.

L’ONU s’installe pour une longue réunion aves les chefs civils et militaires locaux. A mes yeux, ça ressemble beaucoup à une «chouhra» afghane. Tout le monde est sur des coussins autour de la salle, les jambes croisées, sauf qu’on sert du café turc au lieu du thé.

Nous nous mettons en place pour filmer à l’extérieur. Il fait chaud, des femmes et des garçons nous apportent des oranges et des chaises. Des fragments d’obus nous sont montrés pour que nous les filmions. Ils nous expliquent que les bombardements reprendront dès notre départ – une affirmation qui par nature restera non vérifiée, quoiqu’il y ait certainement d’importants dégâts causés par des obus dans certaines parties de la ville.

Nous passons donc le temps, en attendant que l’ONU se déplace – ils sont bien sûr notre seul moyen de franchir les lignes avec un minimum de sécurité.

Mais le temps se traîne. Le délai qui nous est imparti tire à sa fin. Et il y a ce type vraiment casse pieds qui prétend être des « services de renseignements rebelles » et qui n’arrive pas à accepter que nous ayons un visa du gouvernement.

Dans son esprit, les journalistes étrangers sont des gens passés clandestinement et illégalement par le Liban et point final. On ne correspond pas à son profil.

Lui est ses camarades rendent aussi les choses difficiles à notre chauffeur et à notre traducteur – leurs pièces d’identité établies à Damas et notre camionnette immatriculée à Damas n’arrangent pas nos affaires.

C’est nouveau [pour nous]. Hostile. Ce n’est pas comme à Homs ou à Houla et pourtant la réunion avec l’ONU se traîne dans la chaleur de l’après-midi.

Nous décidons de demander une escorte pour prendre le chemin sûr par lequel nous sommes venus. Les deux camps, les deux checkpoints se souviendront de notre véhicule.

Envoyés à la mort ?

Soudain, quatre hommes dans une voiture noire nous invitent à les suivre. Nous partons derrière eux.

On nous emmène par une autre route. Emmenés en fait dans une zone où on tire à vue. Invités par l’Armée Syrienne Libre à suivre une route qui est bloquée au milieu d’un no man’s land.

A ce moment, il a eu le sifflement d’un projectile et un des plus lents demi-tours que j’ai jamais connus pour foncer vers l’accotement le plus proche pour nous couvrir.

Une autre impasse

Il n’y avait pas d’autre choix que de rebrousser chemin sur le champ de tir et de le traverser pour reprendre la route par laquelle on nous avait emmenés.

Comme on s’y attendait, la voiture noire qui nous avait conduits dans le piège était là. Ils ont démarré dès que nous sommes réapparus.

Je dis tout net que les rebelles ont fait en sorte que nous soyons tués par l’armée syrienne. La mort de journalistes est mauvaise pour Damas.

Ma conviction n’a fait que se renforcer une demi-heure plus tard quand nos quatre amis dans la même voiture cabossée ont fait soudain irruption depuis une rue latérale pour nous empêcher de rejoindre les véhicules de l’ONU à l’avant.

Les observateurs de l’ONU sont revenus vers nous pour constater que nous étions entourés de miliciens hurlant et ils ont quitté la ville.

Nous avons finalement pu partir aussi et sur la bonne route pour le retour à Damas.

Dans une guerre où ils égorgent des bébés jusqu’à l’os, qu’est-ce que ça peut bien faire d’envoyer une minibus plein de journaliste dans une zone où on tue ?

Ca n’avait rien de personnel.


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