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« Il n’y a pas de situation révolutionnaire en Algérie »

22 décembre 2019

L’élection d’Abdelmadjid Tebboune a été accueillie diversement, entre ceux qui estiment qu’il a été mal élu et ceux qui considèrent qu’il a été en réalité désigné par la hiérarchie militaire, l’élection étant truquée.tebboune

Qu’il ait été mal élu, c’est une évidence et il n’est pas le seul chef d’État dans ce cas. Qu’il ait été désigné par la hiérarchie militaire, c’est probable mais c’était sans doute le cas de ses rivaux malheureux. C’est avant l’élection que les militaires ont fait leur choix et il n’était donc pas nécessaire de truquer le scrutin. La faiblesse du taux de participation , un peu moins de 40 %, plaide plutôt en la faveur d’une élection non truquée; on aurait pu en effet s’attendre, en cas de manipulation du scrutin ou de bourrage des urnes à ce que les autorités fassent état d’un taux de participation avoisinant au moins 50 %.

Il n’est pas douteux que ni le président nouvellement élu, ni ceux qui l’ont coopté ne se font d’illusions sur une véritable adhésion populaire à sa personne.

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Par contre, cette adhésion pourrait se construire progressivement en fonction de ses premiers gestes une fois son gouvernement constitué. Il y a bien sûr sa promesse de rajeunissement des détenteurs de portefeuilles ministériels, une promesse dont la réalisation semble mal engagée si on en croit les deux premières nominations aux postes de Chef de cabinet et de Secrétaire Général qui confirment la tendance à la gérontocratie (on verra ce qu’il en sera des ministres). Surtout, la majorité de la population attend du nouveau président qu’il fasse libérer les détenus d’opinion, aussi bien les gens connus que les citoyens ordinaires.

Ce dernier geste est à coup sûr celui qui donnera de la crédibilité à la volonté affichée du nouveau président de faire évoluer le pays vers plus de démocratie.

Il reste que ce qu’on appelle le Hirak n’a pas été en capacité d’empêcher le scrutin présidentiel et toutes les protestations, manifestations criant à l’illégitimité du nouveau président n’y ont rien fait et n’y feront rien.

Hugh Roberts* propose une analyse dépassionnée qui permet de comprendre pourquoi, après des succès initiaux de grande portée, le Hirak s’est retrouvé dans une impasse, ne parvenant pas à provoquer un changement radical du système politique.

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Hugh Roberts

L’histoire n’est évidemment pas finie et tout peut encore basculer dans un sens ou dans l’autre, par exemple si des manifestants passaient à l’action violente, ou si une grève générale était effective, ou bien sûr si les autorités se lançaient dans une répression systématique et sanglante.

* Hugh Roberts est professeur d’histoire de l’Afrique du Nord et du Moyen Orient à l’université Tufts aux Etats Unis. il est notamment l’auteur d’un ouvrage sur la situation politique en Algérie entre 1988 et 2002.

Algérie: le Hirak et les ides de décembre

par Hugh Roberts, Jadaliyya 19 novembre 2019  traduit de l’anglais par Djazaïri

Depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois, la situation en Algérie a été souvent décrite  comme une impasse. Dans le même temps, l’habitude tout aussi répandue de qualifier le mouvement de protestation de révolutionnaire a incité à s’attendre à ce que l’impasse soit plus susceptible d’être résolue en faveur de la «révolution» qu’en faveur des pouvoirs en place. Je soutiens que ce ne sont pas là des lectures réalistes des événements ou de leur tendance.

Appeler révolution un mouvement de contestation, si impressionnant soit-il, n’en fait pas une révolution. Le «mouvement populaire» en Algérie, le Hirak , a été extrêmement impressionnant au début, lorsqu’il s’est opposé avec succès à la perspective d’un cinquième mandat pour le président Abdelaziz Bouteflika. La perspective subjective des manifestants a sans aucun doute été révolutionnaire à certains égards – surtout l’aspiration à en finir avec le régime actuel et à voir une «deuxième République» établie et le courage de descendre dans la rue à plusieurs reprises pour l’affirmer publiquement. Néanmoins, le mouvement n’a été objectivement révolutionnaire à aucun moment. Il n’y a pas de situation révolutionnaire en Algérie; il ne s’agit pas d’une situation de double pouvoir et il est peu probable qu’elle le devienne dans un avenir prévisible, qui est l’horizon temporel de la politique concrète.

L’armée est la source du pouvoir politique en Algérie depuis 1954 et n’a pas été détrônée. Le pouvoir exécutif de l’État, bien que largement contesté, reste cohérent en interne. Le commandement de l’armée en garde le contrôle, comme il vient de le démontrer en déployant avec succès la gendarmerie comme un élément décisif pour mettre au pas une justice algérienne mutine. Le Hirak lui-même, bien qu’impressionnant par sa combativité et sa détermination, n’a pas de fin réalisable au-delà d’empêcher, encore une fois, l’élection présidentielle (maintenant prévue pour le 12 décembre 2019). Et il est loin d’être certain qu’il atteindra cet objectif limité.

En l’absence d’une situation révolutionnaire, tout ce que le Hirak pouvait espérer de façon réaliste était une réforme importante – une avancée en quelque sorte vers une forme de gouvernement plus démocratique et la primauté du droit – qui ouvrirait de nouvelles perspectives politiques et établirait un précédent pour des réformes ultérieures. Mais une telle réforme stratégique nécessite l’accord du commandement militaire, qui ne peut être obtenu que sur la base d’un compromis historique entre l’armée et le mouvement populaire. Bien que cette idée ait été lancée ici et là, aucun compromis de ce genre ne s’est produit et la façon dont le Hirak a évolué depuis avril est en grande partie la raison.

Pratiquement tous les commentaires dans les médias considèrent le  Hirak  comme essentiellement inchangé depuis son début spectaculaire le 22 février 2019. Mais, en fait, son contenu politique a changé à bien des égards. Initialement, le Hirak  présentait les principales caractéristiques suivantes:

Il était incroyablement pacifique et autonome;

Il se centrait sur un point extrêmement précis  – pas de cinquième mandat pour Bouteflika (et par conséquent en corollaire: pas de quatrième mandat prolongé non plus);

il a communiqué cette exigence non pas comme l’expression véhémente d’un sentiment subjectif mais comme une annonce faisant autorité résultant d’une décision collective:  makansh khamsa!   («Pas de cinquième mandat!»);

il fondait cette décision en défense de la constitution (car une personne inapte occupant le poste de président était manifestement inconstitutionnel);

il signifiait clairement qu’il n’avait aucune querelle avec la police: sha’b, shorta: khawa, khawa («le peuple, la police: frères, frères») ou l’armée: jaish, sha’b: khawa, khawa («armée, peuple: frères, frères »).

Depuis le départ des Bouteflika, en avril dernier, le Hirak est, c’est à son crédit, resté d’un pacifisme impressionnant. Mais à tous autres égards, ses positions politiques se sont transformées  pratiquement à l’opposé de ce qu’elles étaient à l’origine.

Beaucoup de ses slogans les plus importants – «système dégage», « yetnahaw ga’a », etc. – expriment des demandes et des sentiments (en réalité, des anathèmes) plutôt que des décisions et manquent donc d’autorité ainsi que de détermination; ils sont à à l’opposé de slogans précisément ciblés. Que pourraient-ils signifier d’un point de vue pratiques? Personne ne le sait.

Quant au seul élément ciblé de la position du Hirak , son opposition à la tenue du scrutin présidentiel, il ne se fonde pas sur la défense de la constitution mais sur un rejet explicite de la constitution.

La prémisse de ce refus de l’élection présidentielle est la proposition (ou exigence) concurrente d’une transition vers «une seconde République». Il est tenu pour acquis que cette «deuxième République» postulée s’avérera de beaucoup supérieure à la «République» actuelle. Mais pourquoi devrait-il en être ainsi, alors que ses contours institutionnels et son caractère spécifiques restent entièrement indéfinis. À aucun moment, aucun partisan de cette vision n’a dit quoi que ce soit sur les principes constitutifs de la seconde République

La «transition» évoquée est également indéfinie quant à ses modalités ainsi qu’à sa finalité, sauf dans la version qui exige, comme élément central, une assemblée constituante. Qui, en l’absence d’un chef d’État faisant autorité, convoquera cette assemblée, qui déterminera sa composition, son ordre du jour et son règlement intérieur sont des questions que personne préconisant cette «feuille de route» n’a abordées à aucun moment. La façon dont une véritable assemblée constituante peut être réunie, sans parler de parvenir à un consensus national authentique sur une constitution radicalement nouvelle (et améliorée), face à l’opposition du commandement de l’armée est floue.

Ce rejet de la constitution et de l’élection présidentielle que la constitution autorise non seulement mais impose en fait a conduit le Hirak à un conflit ouvert avec l’armée, exprimé par des attaques véhémentes contre le chef d’état-major (et vice-ministre de la défense), Le lieutenant-général Ahmed Gaïd Salah. Le vieux maître mot du Hirak,  Jaish, Sha’b: Khawa, Khawa, est lettre morte depuis plusieurs mois.

C’est là, selon moi, un changement très regrettable. Il est difficile de voir comment le but tout à fait admirable du Hirak d’obtenir une meilleure forme de gouvernement pour l’Algérie peut raisonnablement espérer bénéficier de cette tournure des événements et il y a lieu de craindre qu’il ait condamné le hirak à la défaite à court terme

Si nous acceptons de nous résoudre à rejeter l’option douce qui consiste à traiter ce drame comme un conte de fée avec des bons héros et des méchants, en mettant tout au compte du méchant État profond et en dégageant nos préférés de toute responsabilité, il devient possible d’estimer que le Hirak a commis une erreur stratégique majeure erreur au printemps dernier et qu’il l’a payée. Cette erreur a été de situer sa réticence à accepter une élection présidentielle sur la base d’un rejet radical de la constitution. Ce faisant, il a abandonné la stature morale élevée qu’il avait provisoirement acquise le 22 février et a permis au commandent de l’armée d’occuper ce statut et de le conserver par la suite.

Le tragique est que le Hirak n’avait pas besoin de faire ça. Il était en principe parfaitement loisible au  Hirak  de convenir avec les chefs de l’armée que la constitution (en particulier les articles 102 et 104) exigeait la tenue d’une élection présidentielle, mais de souligner en même temps que la constitution stipulait également que «le peuple est la source de toute autorité »(article 7) et que« Le peuple choisit librement ses représentants »(article 8). En bref, la constitution donnait au  Hirak les munitions dont il avait besoin non pas pour défier le commandement militaire mais  pour traiter avec lui sur la base même de la constitution en vigueur et ainsi (i) l’empêcher de s’emparer de la position morale du Hirak (ii) et le persuader d’accepter un accord qui aurait permis à l’élection présidentielle de se dérouler dans des conditions qui représentaient un gain pour le Hirak et une réforme stratégique pour l’État.

Une question centrale pour l’historien est de savoir pourquoi le Hirak n’a pas choisi cette option. On ne peut pas supposer qu’il l’ignorait tout simplement. Divers membres de l’aile civile de l’élite nationale ont tenté de le persuader de penser en termes de compromis historique progressiste avec les chefs de l’armée. Abderrahmane Hadj Nacer, ancien gouverneur de la banque centrale et figure de proue du groupe des réformateurs au cours de la période 1989-1991, a présenté en juin dernier une proposition très réfléchie et impressionnante dans ce sens. [1]  Un certain nombre d’autres personnalités civiles ont avancé des visions similaires. En particulier, le secrétaire général par intérim de l’association des anciens combattants ( Organisation Nationale des Moudjahidine , ONM), Mohand Ouamar Benelhadj, [2] a fait un commentaire très pointu sur la situation le 19 juin, alors que les options étaient encore ouvertes, critiquant les chefs de l’armée pour avoir invoqué exclusivement l’article 102 de la constitution et attiré l’attention sur l’importance des articles 7 et 8 et suggérant que le  Hirak  en tire  le meilleur parti. [3]  Et le plus réfléchi des dirigeants islamistes algériens, Abdallah Djaballah, a attiré à plusieurs reprises l’attention sur l’importance stratégique de l’article 7

Le Hirak n’a intégré que par intermittence des références aux articles 7 et 8 dans son discours sans leur accorder une importance particulière, sans même parler de reconnaître leur importance stratégique et d’en développer les implications possibles. Il n’a pas compris qu’une occasion de faire pression pour une réforme majeure était là suite départ des Bouteflika et il a laissé passer cette opportunité.

Il a ainsi permis au régime de se présenter finalement comme un agent tout aussi plausible – sinon plus plausible – du processus de réforme nécessaire. Sur les cinq candidats à la présidentielle, deux, Ali Benflis et Abdelmadjid Tebboune, tous deux anciens premiers ministres, ont maintenant publié leurs manifestes électoraux et ceux-ci indiquent leur intention, s’ils sont élus, de résoudre au moins certains des principaux problèmes et griefs qui sous-tendent l’agitation populaire. Contrairement au Hirak , le régime a eu une stratégie et, dans la dernière phase du drame, il s’agit de retirer le plus possible d’espace au Hirak , afin de le rendre superflu.

L’État algérien est un caméléon et sa capacité de cooptation ne doit pas être sous-estimée. Sans leader et, par conséquent, tendant à apparaître pas mal embrouillé au niveau politique, le Hirak puise dans des sentiments et des convictions profondément ancrés qui sont sans aucun doute ceux du peuple algérien dans son ensemble, ce qui lui a donné sa force de résistance. Et, comme l’Algérie est pleine de surprises, un quelconque événement violent ou autre pourrait fausser cette analyse  et imposer un ensemble de perspectives différentes quant à la situation dans un mois.

Mais pour l’heure, le  Hirak  n’est pas près de réaliser une percée politique révolutionnaire de sitôt, s’il la réalise jamais. Je pense que son rôle historique a été d’ouvrir la voie à la réaffirmation – après des années d’incompétence arrogante – de l’opinion publique en tant qu’acteur collectif incontournable du gouvernement algérien. Et si, au cours des semaines et des mois qui suivront le 13 décembre, il s’avère avoir réussi à orienter les élites dirigeantes du pays vers de meilleurs comportements, ce ne sera pas un mince progrès mais, au contraire, une réussite historique et immensément bienvenue.

[1] Abderrahmane Hadj Nacer, “Le Hirak pour surmonter l’impasse,” Tout Sur l’Algérie, 24 Juin 2019;  voir aussi Fayçal Metaoui, “Sortie de crise: les propositions de Hadj Nacer,” El Watan, 23 June 2019; Hacen Ouali, “Abderrahmane Hadj Nacer, ancien gouverneur de la banque d’Algérie: « En finir avec le système qui se repose sur l’armée»,” El Watan, 24 Juin 2019; and “Les principaux messages de Hadj Nacer à l’armée,” Editorial, Tout Sur l’Algérie, 24 Juin 2019.

[2] Benelhadj est devenu Secretaire Général suite au décès de Said Abadou le 12 Juin 2019, en attendant la tenue d’une élection au prochain congrès de l’ONM qui a été reporté pour la durée de la crise politique nationale.

[3] Madjid Makedhi, “L’Organisation nationale des moudjahidine (ONM) propose son initiative: L’application de l’article 102 est un échec total,” El Watan, 19 June 2019; see also Fayçal Metaoui, “Entretien avec le secrétaire général par intérim de l’ONM,” Tout Sur l’Algérie, 19 June 2019.

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Une solution négociée en Syrie signerait l’échec stratégique d’Erdogan

27 décembre 2012

L’actuelle mission de Lakhdar Brahimi à Damas, avant un déplacement à Moscou, où il rejoindra peut-être le vice ministre syrien des affaires étrangères syrien serait un signe fort, selon le journaliste turc Semih Idiz, qu’une solution négociée à la crise syrienne serait en vue.

Semih Idiz

Semih Idiz

Selon Semih Idiz, les gouvernements russe et américain seraient tombés d’accord sur une formule de transition sous la direction de l’actuel chef de l’Etat dans le cadre d’un gouvernement d’union nationale.

Tous les obstacles ne sont cependant pas levés, que ce soient ceux que représentent les irrédentistes qui ne rêvent que de prendre le pouvoir par la force et de pendre haut et court Bachar al Assad ou celui que représente le positionnement de la Turquie.

Semih Idiz exhorte donc son gouvernement à abandonner sa vision idéologique pour adopter une position pragmatique en phase avec les choix des grandes puissances puisque son pays n’est plus au cœur du jeu diplomatique et n’est pas loin de devenir un partenaire encombrant pour les Etats Unis.

Si le scénario envisagé par Semih Idiz se concrétise, ce serait un grave échec pour la diplomatie de la Turquie qui pourrait être le dindon de la farce.

En effet, après avoir incité et aidé à ravager la Syrie, la Turquie se retrouverait avec un voisin devenu hostile (et il n’y a aucune raison de penser qu’une bonne partie de l’opposition actuelle au régime syrien ne restera pas ou ne deviendra pas hostile à une Turquie qui aura montré son impuissance) après s’être brouillée avec ses voisins irakien et iranien.

Au passage, les Américains ont manœuvré subtilement pour que le gouvernement turc implore la mise en place de batteries antimissiles Patriot qui, sil elles auraient été d’un intérêt limité en cas de conflit ouvert avec la Syrie, seront par contre un atout important pour tout conflit armé d’ampleur qui opposerait les Etats Unis et/ou le régime sioniste à l’Iran.

La Turquie d’Erdogan rêvait de jouer dans la cour des grands, le dénouement de la crise syrienne lui rappellera peut-être son statut de simple pion pour Washington.

La Turquie ne doit pas devenir une force obstructive en Syrie

Par Semih Idiz, Hürriyet (Turquie) 27 décembre 2012 traduit de l’anglais par Djazaïri

Quand on examine les dernières tentatives pour une solution à la crise syrienne, il est évident que la mission actuellement effectuée par Lakhdar Brahimi, l’émissaire conjoint de l’ONU et de la Ligue Arabe pour la Syrie, ne peut, de par sa nature même, être du goût d’Ankara. En fait, des sources au ministère des affaires étrangères en on fait savoir assez par des fuites dans la presse pour corroborer cette idée.

Lakhdar Brahimi et le vice ministre syrien des affaires étrangères Faisal Mekdad le 24 décembre à Damas

Lakhdar Brahimi et le vice ministre syrien des affaires étrangères Faisal Mekdad le 24 décembre à Damas

Comme je l’avais observé précédemment dans cette rubrique, Ankara en est venu progressivement, quoique avec réticence, à accepter que des éléments du régime actuel soient incorporés dans tout gouvernement de transition post-Assad. L’idée que Assad lui-même devrait faire partie de toute formule de règlement reste cependant exclue [par Ankara].

D’un autre côté, les informations dans la presse indiquent que la mission actuelle de Brahimi consiste à convaincre les parties syriennes à accepter un plan négocié par les russes et les américains qui prévoit un maintien au pouvoir d’Assad jusque en 2014, à la tête d’un gouvernement  de transition sur une base élargie, même si son mandat ne sera pas renouvelé après cette date.

Le principal aspect ici, n’est pas que ce plan envisage le maintien au pouvoir d’Assad jusqu’en 2014, ce qui est quelque chose d’évidemment difficile à avaler pour les tenants d’une ligne dure dans l’opposition syrienne, ceux qui ont transformé la crise en Syrie en guerre sectaire.

L’aspect principal est que Washington et Moscou se sont mis suffisamment d’accord entre eux pour être en mesure de proposer un plan de règlement commun.

J’ai soutenu en maintes occasions ici que tout règlement de la crise syrienne nécessitera forcément la coopération de ces deux membres permanents du Conseil de Sécurité. La rencontre de Dublin début décembre entre le ministre des affaires étrangères Lavrov et  la Secrétaire d’Etat Clinton avait semblé à l‘époque n’avoir débouché que sur un minimum d’accord sur la Syrie. La mission actuelle de Brahimi indique toutefois qu’on ne savait pas toute l’histoire.

Même si la Russie et les Etats Unis ont des intérêts stratégiques concurrents au Moyen Orient, un fait qui a été visible même pendant la crise syrienne, il existe des inquiétudes communes qui ont contraint finalement ces deux puissances à coopérer. La Russie avait fait valoir dès le début que la Syrie allait devenir un défouloir pour des djihadistes étrangers de toutes appartenances et avait en parie justifié ainsi son appui au régime Assad.

Washington, pour sa part, avait démarré avec une position voisine de celle de la Turquie, en entretenant un discours proche de celui d’Ankara, et avait donc considéré l’opposition syrienne comme une force unie résistant à un dictateur impitoyable et luttant pour la démocratie et les droits de l’homme.

Même si c’est sans aucun doute vrai pour certains éléments de l’opposition, le profil d’une partie des combattants anti-Assad indique clairement que leur objectif final ne peut pas être la démocratie ou les droits de l’homme mais d’une manière ou d’une autre, un régime théocratique sunnite et dictatorial sous la direction des Frères Musulmans.

C’est à l’évidence la raison pour laquelle Washington est intervenu pour élargi la base de l’opposition syrienne, avec l’idée d’isoler les éléments djihadistes, que ces derniers soient basés en Syrie ou ailleurs. Le soutien qu’apporte la Turquie à l’opposition dirigée majoritairement par des sunnites concerne cependant des éléments qui pourraient être considérés comme douteux aussi bien par Moscou que par Washington.

Plus encore, cependant, la mission de Brahimi montre une dois de plus que la Turquie n’est plus au centre des démarches diplomatiques visant à résoudre la crise en Syrie. Au contraire, elle se situe de telle sorte qu’elle pourrait à un moment être considérée comme une force d’obstruction essayant d’empêcher un accord qui ne correspond pas à la façon dont le gouvernement Erdogan voit l’avenir de la Syrie.

Le premier ministre Erdogan et le ministre des affaires étrangères Davutoğlu doivent cependant comprendre que l’avenir de la Syrie ne sera probablement pas modelé selon la vision idéologique qu’ils partagent, mais qu’il sera plus certainement basé sur des facteurs objectifs qui sont le résultat de la coopération entre les puissances incontournables du Conseil de Sécurité.

Washington et Moscou l’ont apparemment compris. Il serait temps qu’Ankara en fasse de même.

De la démocratie turque aux prisons turques…

11 septembre 2012

… il n’y a qu’un pas.

Selon la presse française, ce sont en effet 44 journalistes dont le procès s’est ouvert lundi à Istanbul, la capitale économique de la Turquie. 36 d’entre eux sont d’ailleurs en détention préventive.

On leur reproche

d’appartenir à l’Union des communautés du Kurdistan (KCK), qui serait selon les autorités la branche urbaine du PKK. S’ils sont reconnus coupables, ils sont passibles de peines allant de sept à vingt ans de prison. Quarante-six autres journalistes attendent leur procès dans des prisons turques pour d’autres affaires, selon le groupe «Plate-forme de solidarité avec les journalistes arrêtés».

44 journalistes jugés simultanément, c’est un record me semble-t-il, d’autant que 46 autres attendent en prison de passer à leur tour en jugement. Des chiffres qui sont révélateurs d’un gros problème avec ce que certains ont qualifié un peu hâtivement de démocratie turque ( la presse espagnole parle de son côté de 67 journalistes concernés par la procédure en cours).

Parmi ces «certains,» on compte bien sûr M. Ahmet Davutoglu, le chef de la diplomatie turque et le premier ministre Recep Teyyip Erdogan qui ont proposé ouvertement l’imitation de leur modèle par des pays comme l’Egypte ou la Syrie. Dans ce dernier pays, le gouvernement turc a d’ailleurs joint l’acte à la parole en encourageant des bandes terroristes supposées lutter pour la démocratie.

J’ai compris Laurent,  la démocratie, c’est comme la cravate, il faut serrer.

Alors, vive la démocratie turque !

Hillary Clinton et le leadership du Maroc, Alger et son rêve futile d’un axe algéro-américain

27 février 2012

Mme Clinton était tout récemment en Algérie et sa visite a inspiré au quotidien algérois L’Expression ce titre suggestif :

 L’axe algéro-américain se précise

J’ignore comment on peut parler d’axe formé par deux Etats aussi dissemblables, l’un étant un  pays de plus de 313 millions d’habitants, avec une économie qui, même si elle semble sur le déclin, reste au 1er rang mondial et doté d’une puissance militaire inégalée, tandis que l’autre est un pays de 37 millions d’habitants, encore sous-développé et dont la puissance militaire tient peut-être plus de l’inventaire de matériels que de réelles capacités combatives.

Rien dans le discours de Mme Clinton ne peut suggérer l’existence d’un tel axe même si elle a exprimé son

 «plaisir personnel et profond d’être en Algérie et d’avoir l’occasion de représenter le Président Barack Obama et le gouvernement des Etats-Unis en Algérie».

(Ouf, pas de révolution du nar-nar en vue en Algérie)

et indiqué que sa visite en Algérie avait pour objet

«d’évoquer des questions communes, de  discuter du renforcement de la coopération bilatérale  et d’échanger les idées sur les événements qui se déroulent actuellement dans la région».

De là à parler d’un «axe», il y a un pas que je me garderais bien de franchir.

Il faut quand même relever que Mme Clinton, si elle a parlé d’Algérie, a fait référence à un «peuple maghrébin ».

Vous me direz que ce peuple maghrébin existe et je suis d’accord. L’existence d’un peuple maghrébin ancré dans un territoire et cimenté par une histoire et une culture communes est une réalité qui n’a pas encore de traduction politique.

Mais cette traduction politique est l’affaire des intéressés, pas de Mme Clinton. Or, son emploi de l’expression «peuple maghrébin» est tout sauf innocent et nous donne sans doute une indication sur les desseins de Washington pour la région maghrébine : une intégration politique sous la houlette et dans l’intérêt des Etats Unis qui passera par la réactivation opportune d’une Union du Maghreb Arabe maintenant dominée par les véritables amis de Washongton, à savoir le Maroc, la Tunisie et la Libye « révolutionnaire ».

Ecoutons Henry S. Ensher, ambassadeur des États-Unis à Alger, interviewé par Hadjer Guenanfa pour Tout sur l’Algérie :

Q- On parle de plus en plus de l’ouverture des frontières entre l’Algérie et le Maroc. Vous avez même proposé, dans une déclaration à la presse, une médiation américaine…
R- Jamais ! Il n’y aura pas de médiation. Les Algériens sont nos amis et les Marocains aussi. La décision relève des prérogatives des deux gouvernements. Cela dit, on pense que la consolidation des relations entre ces deux pays sera bénéfique pour eux mais aussi pour les États-Unis
Q- L’ouverture des frontières permettra de relancer l’Union du Maghreb arabe. Comment voyez‑vous cette relance ?
R- L’Union du Maghreb arabe (UMA) aura un rôle significatif en matière de sécurité, de développement économique et d’intégration régionale. Le rôle de l’UMA sera bénéfique.

De fait, Mme Clinton est arrivée à Alger en provenance de Tunis avant de conclure son périple à Rabat.

Rabat où Hillary Clinton a consacré le leadership marocain selon le journal L’Economiste.

Mais leadership de quoi au juste ? Du fameux axe ?

Pas vraiment puisque selon Mme Clinton,

«Le Maroc est aujourd’hui en pôle position pour jouer le rôle de leadership afin de mettre fin à ce qui se passe en Syrie»

Le leadership marocain n’a donc rien à voir avec le fameux «axe» et assez peu de choses à voir avec le « peuple maghrébin » mais bien plutôt avec la volonté hégémonique des Etats Unis dans le monde arabe.

Donc leadership signifie ici, le plus fidèle des serviteurs des intérêts des américains dans l’Occident et l’Orient arabes.

On pourrait ajouter que ce leadership concerne aussi la démocratisation puisque :

L’Administration américaine, a-t-elle ajouté, oeuvre avec les gouvernements de la région arabe dans le but d’enclencher une dynamique de réformes

Et à ce propos, le journal L’Economiste nous précise que

L’exemple marocain en matière de réformes et de démocratie a d’ailleurs été salué par la secrétaire d’Etat américaine. Dans la foulée, elle a rendu hommage à la jeunesse marocaine et au Roi qui a su répondre très tôt à ses attentes.

Le roi Mohamed VI explique sa vision de la démocratie à Hillary Clinton

Mme Clinton n’a pas dit ce qu’elle comptait faire pour la démocratisation du royaume de Jordanie sans parler de celui d’Arabie Saoudite…

En attendant, la rencontre qu’elle devait avoir avec des représentants de la société civile marocaine a été annulée sans qu’on en connaisse la raison.

Elle n’a pas évoqué, comme de juste, le sort des deux jeunes condamnés pour atteinte au caractère sacré de la personne du monarque.

Une majorité silencieuse pour Assad en Syrie?

20 novembre 2011

Quand je  réfléchis à ce qui se passe en Syrie, j’ai beau faire tous les efforts possibles et imaginables, je n’arrive pas à me figurer les monarchies du Golfe en train de faire souffler un vent de démocratie sur la Syrie, pas plus que sur l’Egypte, la Tunisie ou la Libye.

Non pas que je pense  par  principe qu’une expression politique s’inspirant même très fortement de l’Islam soit incompatible avec telle ou telle forme de démocratie, mais plus simplement que les courants favorisés par les pétromonarchies ne peuvent être que rétrogrades et sectaires.

Et si j’ai cité dans un même souffle plusieurs pays arabes, cela ne signifie pas non plus que les choses se passent ou vont se passer à l’identique dans ces pays.

Il est en effet inconcevable que la Tunisie évolue de la même manière que la Libye. Pour la bonne raison tout d’abord que ce sont deux pays très différents, l’un (la Libye) ayant encore une forte structuration tribale et l’autre (la Tunisie) étant largement détribalisé. Ce qui a nécessairement des incidences sur la formation du cadre d’expression politique. Et que les élites Tunisiennes sont plus abondantes et, surtout, qu’elles ont un véritable public.

Ensuite, même si  le parti tunisien En Nahda jouit du soutien incontestable  de certaines monarchies, sa base et sa direction sont informés par l’histoire même de leur pays et elles savent ce qu’un peuple qui les a approuvées aux dernières élections ne serait pas prêt à accepter. Les forces politiques en Tunisie sont de plus parvenues à un compromis qui écarte sans doute durablement l’hypothèque d’un extrémisme inspiré et subventionné par le wahhabisme.

Et aucune intervention militaire étrangère n’est venue porter telle(s) ou telle(s) fraction(s) politique(s) au commandement.

Les choses se passent autrement en Syrie  qui, de plus et à la différence de la Tunisie, n’est pas un pays homogène religieusement et, ne l’oublions pas, se trouve quand même aux premières loges devant les régimes sionistes et wahhabite. Ce qui change quand même pas mal de choses.

La Syrie vit en fait une situation qui s’apparente à celle qu’avait connue l’Algérie suite à l’annulation des élections législatives et au coup d’Etat militaire qui avait déposé  (démissionné) le président Chadli Bendjedid

Le Front Islamique du Salut algérien avait la particularité de réunir dans une même organisation des éléments hostiles à tout jeu démocratique et d’autres reconnaissant l’intérêt du pluralisme. Si le premier tour des élections avait donné raison aux seconds, l’annulation du scrutin avait confirmé les premiers dans le refus d’une évolution politique pacifique.

D’où un basculement dans la lutte armée qui dégénérera ensuite dans une longue série de massacres qu’on aurait cependant tort d’attribuer majoritairement ou exclusivement aux «islamistes ».

La Syrie connaît un processus semblable sauf qu’il précède tout processus électoral et que la main de l’étranger y est évidente.

Nous avons eu en effet en Syrie un début de contestation populaire authentique et pacifique (réprimé brutalement par les services de sécurité gouvernementaux) qui voit cependant rapidement l’implication d’éléments armés et bien entraînés qui attaquent policiers et militaires.

Cette présence très précoce d’activistes armés et très efficaces avait été signalée sur ce blog il y a un certain temps.

Ces activistes viennent pour partie de l’étranger et ils sont armés et financés par l’étranger, c’est-à-dire les monarchies du Proche Orient pour l’essentiel.

Leurs intentions ne sont pas et ne peuvent pas être démocratiques car, je me répète, il est impossible que les monarchies du Qatar, d’Arabie Saoudite ou de Jordanie puissent, même en rêve, favoriser quoi que ce soit qui s’apparente à de la démocratie.

Bien sûr, il existe des groupements d’opposants que certains pays comme la Turquie se donnent du mal à organiser. Mais ces groupements sont en fait incohérents et ceux qu’on a mis à leur tête n’ont aucune emprise sur ceux qui jouent la stratégie de la lutte armée avec, si possible, intervention militaire étrangère, ne serait-ce que pour sanctuariser une partie du territoire syrien à partir duquel ils porteraient des coups au pouvoir de Damas.

Si le régime syrien a sans doute fait son temps, je considère personnellement qu’on ne peut rien attendre de bon de gens qui manœuvrent de la sorte. Car s’ils procèdent ainsi, c’est que comme en Libye, ils savent ne pas avoir un soutien suffisant auprès de la population.

L’article que je vous propose vaut ce qu’il vaut (je ne crois pas trop à la liberté de parole des soldats, ni en Syrie ni ailleurs), mais il montre surtout qu’on ne peut à tout le moins exclure l’hypothèse que le gouvernement syrien a, pour des raisons  dont on peut concéder qu’elles ne sont pas forcément bonnes, l’appui d’une majorité silencieuse dans le pays.


La ‘majorité silencieuse’ syrienne craint l’extrémisme de l’opposition

Par Angeles Espinosa (envoyée spéciale à Damas)

El Pais (Espagne) 19 novembre 2011 traduit de l’espagnol par Djazaïri

 «Au début, j’ai eu de la sympathie pour la contestation, mais quand j’ai découvert sa nature violente, j’ai changé d’avis,» confie un fonctionnaire Syrien. « Ce régime a commis beaucoup d’erreurs. Mais quel choix nous proposent ceux qui le combattent ? Le chaos ? Les islamistes ? Non merci, je préfère le régime avec tous ses défauts.» C’est une opinion commune dans la ‘majorité silencieuse’, qui comprend certains détracteurs de la dictature de Bachar el-Assad. Cette attitude semble indiquer que la militarisation de l’opposition jour en sa défaveur, mais qu’elle profite aussi à un régime de plus en plus isolé internationalement.

 «Bien sûr que nous avons besoin d’un changement politique. Nous avons besoin de la liberté de la presse, du multipartisme et, par-dessus tout, de transparence pour en finir avec la corruption,» déclare un politologue qui appartient à la minorité druze. Ce dernier craint cependant qu’un « changement radical sans une transition organisée » n’emporte au passage les droits individuels dont ils bénéficient dans une Syrie nominalement laïque (quoique sa législation fasse des concessions à la charia).

 «Sous ce régime, nous pouvons prendre une bière à une terrasse, avoir une petite amie ou afficher notre athéisme sans que personne ne puisse sous faire quoi que ce soit, » affirme-t-il, persuadé que les islamistes, qui s’avèrent être le cœur du Conseil National Syrien (CNS), vont détruire ces avancées. « Je ne me fie pas à leurs promesses et ce qui se passe en Tunisie et en Egypte n’est pas encourageant non plus,»  souligne-t-il. « Après quarante années de dictature, nous n’avons pas de culture politique. Nous avons besoin de créer des institutions avant de faire le changement, » ajoute-t-il.

«Ce que je crains le plus, ce sont les barbus, » insiste le fonctionnaire qui refuse de nous dire son affiliation religieuse « c’est sans importance, je ne suis pas pratiquant »). Les barbus sont les islamistes et ce père de famille est convaincu que ce sont eux qui sont derrière les révoltes et qui les financent. « Ce qui est honteux, c’est que les manifestants sortent des mosquées et que ce soient des imams qui encouragent les gens, » explique-t-il.

La même inquiétude est exprimée par Mayed Nyazi, présidente du mouvement syrien La Patrie qui veut jeter des ponts entre «opposants et loyalistes.»  «Le parti unique est inacceptable, mais l’extrémisme islamique ne cous convient pas, » explique-t-il. Cette femme, qui se présente comme artiste plasticienne et militante sociale » et a été membre du Conseil Provincial de Damas de 2006 à 2007, insiste sur son indépendance à l’égard du pouvoir. « Nous attendons toujours l’agrément officiel, » dit-elle dans le bureau financé par les 50 fondateurs de l’organisation.

L’avocat et militant des droits de l’homme Anwar al Bounny considère que la crainte des islamistes est exagérée. « Je suis Chrétien, et je n’en ai pas peur, » assure-t-il. «Quelque 40 % des Syriens appartiennent à des minorités et 60 % d’entre eux sont Arabes sunnites dont la moitié ne se préoccupe pas de religion. Alors même si tous ceux de l’autre moitié étaient des islamistes et votaient en bloc, ils se pourraient pas nous imposer leur système, » explique-t-il. Il signale qu’en plus, « tous les partis islamistes ont changé de discours et parlent maintenant de société civile et de démocratie parce qu’ils savent que les discours radicaux ne leur rapporteront pas de soutien.»

Cependant, à Homs, baptisée capitale de la révolution, on a commencé à voir des signes inquiétants de vengeances sectaires la chaîne télévisée Dunia a rapporté la mort de 11 travailleurs dans une attaque nocturne contre la camionnette dans laquelle ils circulaient. Un militant des droits de l’homme a confirmé l’incident à Reuters et a fait part de ses soupçons selon lesquels les victimes avaient été choisies pour leur appartenance à la confession alaouite (la secte de la famille au pouvoir).

Mais même sans le facteur islamiste, il existe une crainte du désordre que pourrait générer un soulèvement généralisé. « Ce régime nous a protégés, il nous permet de célébrer nos fêtes et de vivre tranquillement. J’ai peur de ce qui peut arriver, » affirme M., une Chrétienne mariée à un étranger. « Nous avons perdu la sécurité, » affirme de son côté un policier. « Si ce pays va bien, c’est parce que son leader est bien, » déclare le père d’un soldat blessé.

 « Je les comprends. 95 % de ceux qui ont moins de 65 ans n’ont pas connu la liberté. Ils en ont seulement entendu parler et on a toujours peur de l’inconnu, » explique Al Bounni. « Quand le changement se produira, je suis convaincu qu’ils le soutiendront, » dit-il. Selon lui, ce n’est qu’une question de temps. Nyazi pense toutefois qu’il est encore possible d’éviter un basculement dans l’extrémisme  qu’elle perçoit comme imposé du dehors «ce qui compte pour l’occident, ce ne sont pas nos droits mais ses intérêts »). « Il n’est jamais trop tard, » conclut-elle.

Lutter pour le régime
Des bandes armées, des bandits, des éléments étrangers… La version officielle de ce qui se passe en Syrie dresse un panorama aux antipodes de ce que dénonce l’opposition. Dans l’impossibilité d’accéder aux zones de conflit, il est risqué de se hasarder à une évaluation mais le directeur de l’hôpital militaire Techrin de Damas, le général Fayçal Hassan, assure que les insurgés ont blessé 4 168 membres des forces de sécurité et tué 600 (bilan au 31 octobre). Voici les histoires de trois des 36 agents admis dans cet établissement.
Muhiddin Hanwa, officier des forces de l’ordre, 35 ans. Blessé par balles à la poitrine et aux deux bras le 8 novembre à Abou Kamal (province de Deir ezZohr, à la frontière avec l’Irak. J’avais pour mission de contrôler une voie de circulation pour détecter des charges explosives. Je m’étais rendu sur place avec ma motocyclette quand ils m’ont tiré dessus dans une rue d’Abou Kamal. Quelqu’un me surveillait apparemment, » se souvient Hanwa qui était seul et s’était retrouvé étendu à terre sans que personne ne vienne à son aide. « J’ai appelé avec mon téléphone portable et une ambulance de l’armée est venue. »
 
Rashad Said al Dgesh, sergent de réserve de l’armé, 23 ans. Blessé par balle aux deux jambes le 25 octobre à Kherbet al Joss (province d’Ibleb) à la frontière avec la Turquie. J’ai failli perdre la jambe droite. « Je circulais dans un camion militaire avec mon unité et nous transportions de la nourriture pour nos autres compagnons quand nous avons été surpris par un groupe armé qui nous a attaqués avec des fusils, des lance grenades et des bombes aux cris de Allah ou Akbar. Ils étaient une vingtaine. Ils sont partis, nous laissant pour morts, » se souvient-il. Qui vous a attaqués ? Des gens qui parlaient arabe mais qui n’ont ni religion, ni morale. Ils étaient masqués. » Deux de ses camarades sont morts et, comme lui, cinq autres ont été blessés.
 
Raed Munzer Salum, sous lieutenant des forces de l’ordre, 27 ans, originaire de Homs. Blessé à la jambe gauche par un franc tireur à Harasta. «J’avais été dépêché là-bas avec mon unité  après que quelques habitants aient dénoncé la présence d’hommes armés dans les rues. Nous nous y étions rendus pour les arrêter et ils nous ont tendu une embuscade. Ils m’ont atteint avec une arme si sophistiquée que nous n’en avons même pas pour les forces de police. Comme c’était une zone résidentielle, nous ne pouvions pas riposter sans risquer de blesser des civils, » assure-t-il. « L’occident devrait se souvenir que si en Syrie nous jouissons d’une sécurité que beaucoup de pays nous envient, c’est précisément grâce au peuple et à son président, » dit-il.

Après s’être agenouillé à l’ONU, Obama insulte la communauté noire des Etats Unis

30 septembre 2011
Si on en croit le journal Le Figaro, le président Barack Obama tente de récupérer l’électorat juif, ce qui expliquerait son alignement complet sur les thèses de Benyamin Netanyahou lors de ses dernières génuflexions oratoires à la tribune de l’ONU.
Ce même Figaro nous apprend que le discours d’Obama n’a pas forcément emporté la conviction d’un électorat juif traditionnellement enclin à voter démocrate. Ainsi, à la dernière présidentielle, 3/4 des électeurs Juifs du 9ème district  de New York avaient choisi de voter pour l’actuel président des Etats Unis et les voix de l’électorat juif vont le plus souvent aux candidats du parti Démocrate.
 
Mais quand on voit le poids numérique de cet électorat aux Etats Unis, 2 % de la population de ce pays, on a du mal à comprendre pourquoi Obama se préoccupe tant de cette masse insignifiante même si, écrit le Figaro, les électeurs Juifs peuvent jouer un rôle décisif dans certains Etats clefs.
Certes, mais ce rôle est-il plus décisif que celui d’autres groupes humains, noirs ou latinos par exemple?

Permettez moi d’en douter.

D’ailleurs, Barack Obama qui s’aplatit devant les prétendus dirigeants de la communauté juive retrouve toute sa superbe devant les cadres de la communauté noire des Etats Unis et ne se gêne pas pour les insulter ainsi que le relève Craig Crawford:

Barack Obama accuse les leaders noirs de porter des « pantoufles » au lieu de « chaussures de marche » et les exhorte à arrêter de se plaindre, de cesser de râler, d’arrêter de pleurer. » Peu importe si certaines des personnes présentes avaient en fait marché dans les années 1960 [dans le cadre de la lutte pour les droits civiques] alors qu’Obama n’était qu’un enfant.’

Perdre l’électorat noir? Même pas peur, nous dit l’audacieux Velran Barack Obama.
En fait, la clef du goût pour l’électorat juif que manifeste Obama, comme tous les autres candidats putatifs à la présidentielle, ne réside pas du tout dans le poids électoral des Juifs et cette clef nous est livrée vers la fin de l’article du Figaro:

Surtout, la Maison-Blanche redoute les défections des puissants donateurs juifs, qui avaient tant fait financièrement pour sa première campagne. «Beaucoup de Juifs qui avaient donné des tonnes d’argent sont très peu enthousiastes pour le refaire», a confié sans ambages un leveur de fonds d’Obama au journal New York.

Notez bien le « surtout » qui nous fait comprendre que c’est l’aspect financier qui aurait dû faire le titre du Figaro et pas une prétendue défection de l’électorat juif. car ce qui compte pour Obama comme pour les autres, ce ne sont pas les électeurs Juifs lambda, épiciers, techniciens ou professeurs, mais les grands électeurs que sont les financiers et les fameux « leveurs de fonds » (fundraisers), souvent spécialistes de l’évasion fiscale, légale ou non, et du blanchiment d’argent.

En fait, et sans qu »il fut nécessaire d’amender la constitution américaine, ce pays a adopté une méthode de suffrage censitaire qui soumet au choix des citoyens des candidats préalablement sélectionnés sur les critères qui importent à de grands électeurs.
La démocratie représentative est préservée dans sa forme, mais guère plus.

Le problème toutefois est qu’Obama a été élu par des gens qui pensaient qu’il allait régler les problèmes dont souffre leur pays et dont ils pâtissent, l’accès à l’emploi ou à la santé par exemple. Ce dernier point était d’ailleurs un de ses thèmes principaux de campagne d’Obama (comme de Bill Clinton avant lui).
Or, Barack Obama n’a tenu aucun de ses engagements, pas même celui de fermer Guantanamo, et a continué à diriger la pays d’une manière fort peu différente de celle de son prédécesseur républicain, s’engageant aussi dans de nouveaux conflits militaires.

Il est donc logique que sa popularité dans l’électorat général s’effondre:

La popularité d’Obama dégringole. Les Américains en ont assez que la Maison Blanche fasse copain-copain avec les banquiers de Wall Street.

Parce que les banquiers, en nombre d’électeurs, ça ne pèse pas non plus très lourd…

Or les banquiers et l’électorat « juif » [c’est-à-dire en réalité les donateurs dont il est question plus haut] sont les deux principales préoccupations de M. Obama ainsi qu’il est apparu dans un lapsus au cours d’un discours récent.La gaffe est rapportée entre autres par le Daily Mail:

‘Si demander à un millionnaire de payer le même niveau d’impôt qu’un Juif, un concierge, fait de moi un guerrier en faveur des travailleurs, je le considère comme une marque d’honneur. Je n’ai pas de problème avec ça. Il est juste temps,’ a-t-il dit.

Le Daily Mail indique que Rush Limbaugh, un commentateur politique de droite très connu aux Etats Unis a moqué un président Obama qui semble considérer que les Juifs payent trop d’impôts tout comme les concierges.

Une gaffe qui a peut-être contribué à amenuiser l’attrait d’une candidature Obama pour « l’électorat » juif. Un électorat qui de toute façon n’aura que l’embarras du choix puisque presque tous les candidats à la candidature semblent privilégier le bien être du soldat sioniste à celui du chômeur de l’Alabama ou du sans domicile de Californie.



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