Posts Tagged ‘Philippe Pétain’

La symbolique de Toulouse et sa signification politique

2 novembre 2012

François Hollande a rendu publiquement hommage aux victimes de la tuerie de Toulouse, et c’est une démarche tout à fait légitime.

Le problème est qu’il l’a fait en compagnie de Benjamin Netanyahou, le premier ministre violent d’un Etat voyou qui séquestre et spolie le peuple palestinien.

S’il pensait que cet hommage avait une finalité pédagogique, on peut dire que c’est raté.

Si le but était par contre de flatter les instances supposées représenter la communauté juive en France et donner un coup de pouce électoral à Benjamin Netanyahou, on peut dire que c’est réussi.

On retiendra l’image de François Hollande donnant l’accolade à Benjamin Netanyahou dans l’école toulousaine fréquentée par les victimes de Mohamed Merah.

Je suis satisfait de toi François.

N’imaginez pas que cette accolade est le fruit d’une montée d’émotion qui se serait emparée des deux dirigeants politiques, elle fait au contraire partie de détails qui ont été décidés par les responsables du protocole des deux pays parce que c’est un geste qui a du sens politique.

On retiendra que M. Hollande est allé très loin dans une proclamation de sympathie à l’égard d’un homme qui n’est rien d’autre qu’une version juive d’une extrême droite que les politiciens de gauche prétendent stigmatiser.

En tout cas cette camaraderie est en phase avec les évolutions que connaît, il suffit de penser à la rhétorique de Manuel Valls, et va connaître la gauche institutionnelle dans sa relation avec les populations issues de l’immigration musulmane. Elle est également cohérente avec les inflexions qu’a connues la politique étrangère de la France depuis sa réintégration dans l’OTAN et le bellicisme que nous avons pu constater avec les événements liés au prétendu printemps arabe. Et on aurait donc eu tort  d’être surpris devant l’hommage  rendu récemment par le président Français au fasciste Yitzhak Shamir à l’annonce du décès de ce dernier.

Nous sommes entrés définitivement dans l’après deuxième guerre mondiale. Non pas que nous nous trouvions devant des idéologies et des phénomènes politiques nouveaux, mais que la parenthèse introduite par la guerre froide et le gaullisme en ce qui concerne la France s’est refermée et que nous nous retrouvons dans la situation idéologique voisine de celle de l’entre deux guerres mondiales. Avec des forces qui correspondent peu ou prou aux forces sur lesquelles s’appuyait le maréchal Pétain et d’autres qui correspondent à celles qui lui avaient accordé les pleins pouvoirs. De fait, on a beaucoup parlé de juifs de France ces jours ci, et guère de Juifs Français ou de Français Juifs.

Comme si aucune leçon n’avait été retenue des méfaits du fascisme et du nazisme. De fait, aucune leçon n’a été tirée de cette période sombre de l’histoire. Pour la bonne raison, entre autres, que la pédagogie et le discours  politique portant sur cette époque sont à la fois trop éloignés de la réalité de ce que fut cette époque et se sont détournés des enseignements universalistes qui auraient dû en être tirés.

Benjamin Netanyahou sait parfaitement reconnaître ses amis politiques et il en a reconnu un en François Hollande dont il s’est déclaré «très satisfait» exactement comme il a su reconnaître son ami politique aux Etats unis.

Mitt Romney et Benjamin Netanyahou partagent donateurs et amitié

Par Sheera Frenkel, McClatchy Newspapers (USA) traduit de l’anglais par Djazaïri

Jérusalem : Le candidat républicain à la présidentielle Mitt Romney et le premier ministre Israélien Benjamin Netanyahou ont reconnu être amis depuis des dizaines d’années, mais les liens financiers qui les unissent sont devenus évidents quand le candidat républicain a révélé la liste de ceux qui contribuent financièrement à sa campagne.

Plus de la moitié de ceux qui ont donné de l’argent à Netanyahou pour sa campagne de réélection sont des Américains qui ont aussi contribué à la campagne de Romney ou au Parti Républicain aux Etats Unis.

La loi israélienne permet aux politiciens de faire campagne et de collecter de l’argent à l’étranger, quoique l’impact financier des campagnes électorales soit extrêmement différent ici puisque, comme le calendrier électoral se limitant habituellement à trois mois, les budgets de campagne sont maintenus au minimum et les politiciens recourent traditionnellement au financement public. Netanyahou est cependant allé chercher de l’argent à l’étranger même si la somme qu’il a réunie est minuscule comparativement aux standards américains : elle peut s’évaluer en dizaines de milliers de dollars.

Selon des documents publiés par le contrôleur des finances d’Israël, Netanyahou a reçu des dons financiers provenant de 47 personnes. Une seule d’entre elles est israélienne et 42 sont américaines En recoupant les registres officiels aux Etats Unis avec la liste de Netanyahou, McClatchy a constaté que 28 des Américains qui avaient donné de l’argent pour Netanyahou avaient aussi donné pour Romney, le Parti Républicain ou les deux. Deux seulement ont donné de l’argent au Parti Démocrate, dont l’un pour le président Obama.

A la question de savoir s’ils sont gênés de voir que plus de 90 % de l’argent de Netanyahou vient des Etats Unis, la plupart des Israéliens ont un haussement

 «Alors ils prennent de l’argent aux Etats Unis ? Pourquoi devrions-nous en être surpris ? C’est ce qu’il y a de moins surprenant à un moment où tous les autres politiciens israéliens vont en prison pour fraude et corruption,» affirme Shlomit Beniyahu, 48 ans, qui dit qu’elle votera pour Netanyahou aux prochaines élections. «C’est peut-être une bonne chose si Netanyahou obtient de l’argent auprès des mêmes personnes que Romney ; ça montre qu’il est assez malin pour connaître des riches qui ont de l’argent.»

Une famille qui semble avoir particulièrement mis la main à la poche pour Netanyahou et Romney est la famille Falic de Miami. Les Falics, qui possèdent la chaîne de boutiques hors taxes Duty Free Americas, ont fait leur fortune en tant qu’anciens propriétaires de la maison de haute couture Christian Lacroix. Par divers membres de la famille, les Falics ont apporté près de la moitié des contributions à la campagne de Netanyahou, soit environ 42 000 dollars.

Les registres officiels aux Etats Unis montrent que la famille falic contrbue financièrement de longue date en faveur du Parti Républicain, avec plus de 100 000 dollars pour les candidats républicains cette année, dont 20 000 dollars pour la campagne de Romney. La famille Falic a aussi donné de l’argent à des organisations pour la colonisation, dont certaines qui organisent pour les Américains des visites des colonies juives en Cisjordanie

Un membre de la famille Falic que nous avons pu joindre à Miami a refusé de s’exprimer, tout comme la campagne de Romney.

Un porte parole de Netanyahou a refusé de parler des sources de financement su premier ministre, mais un ancien collaborateur de netanyahou, qui s’est exprimé pour McClatchy sous condition d’anonymat parce qu’il est toujours impliqué dans la vie politique, explique que le premier ministre considère que les Etats unis sont «un lieu naturel pour récolter des fonds.»

«Netanyahou a toujours été accueilli à bras ouvert aux Etats Unis. Les gens, les donateurs là bas ne pouvaient jamais lui donner assez,» explique cet ancien collaborateur.

Dans le cours de campagne présidentielle aux Etats Unis, Netanyahou a été critiqué pour avoir  semblé préférer Romney à Obama. Si les responsables de la campagne Romney ont dit clairement n’avoir pas cherché à obtenir le soutien du premier ministre, des organisations pro-israéliennes ont diffusé des spots dans des swing states comme la Floride pour affirmer que Romney à la Maison Blanche serait mieux pour l’Etat d’Israël.

 «C’est un message clair de notre part à nous ici en Israël que Romney est mieux pour l’Etat d’Israël et que sa relation avec Netanyahou serait certainement une amitié plus naturelle,» déclare Kory Bardash du groupe Israël des Républicains à l’Etranger

Dans des interviews, des représentants de Netanyahou ont relevé qu’il n’était pas intéressé à s’immiscer dans la politique partisane aux Etats Unis. Sa liste de donateurs ne comporte cependant que deux familles qui ont donné de l’argent à la fois au Parti Démocrate et à Netanyahou.

 «Il semble un peu étrange de voir que ses contributeurs soient surtout dans un camp,» observe Beniyahu qui a parlé à McClatchy pendant sa pause repas avec trois de ses collègues de travail à Tel Aviv.

 « J’imagine que ça montre quelque chose comme une préférence pour un parti sur un autre, » déclare Michael Cohen, un des collègues de Beniyahu. «Certaines personnes seront peut-être gênées parce que maintenant c’est comme s’il devait quelque chose aux Républicains… Mais la plupart des gens s’en fichent»

David Lightman a contribué à ce article depuis Washington.

Des lois de Nuremberg à la jurisprudence de Tel Aviv (la boucle est bouclée)

8 octobre 2011

J’étais parti pour faire une petite introduction à un article de Reuters (que vous trouverez après ce développement) sur la victoire juridique de l’écrivain Yoram Kaniuk qui a obtenu un jugement en sa faveur dans un tribunal de Tel Aviv.

Mais comme souvent avec le sionisme, quand on commence à dérouler la pelote, on arrive au nazisme et aux doctrines racistes, l’inverse étant également vrai au moins en partie.

Et mon sentiment est que la victoire de Kaniuk au tribunal qui lui a reconnu le droit de ne plus être considéré par l’Etat comme appartenant au judaïsme, est en réalité une victoire en trompe l’œil. Et voici pourquoi :

On le sait, la France de Vichy opérait un classement des citoyens Français, d’une manière assez simple : les Juifs et puis les autres. Les droits des citoyens variaient en fonction de la façon dont ils étaient classés. Ainsi, un certain nombre de professions étaient expressément interdites aux Français de confession juive  tandis que l’accès à d’autres avait d’abord fait l’objet d’un numerus clausus qui évolua aussi vers de nouvelles interdictions. Par ailleurs,  certains Juifs qui étaient Français par naturalisation, s’étaient vu déchoir de la nationalité française, du fait entre autres de l’abrogation du décret Crémieux qui avait accordé la nationalité française aux indigènes Juifs d’Algérie.

Bien sûr, le gouvernement de Vichy avait établi une définition permettant de ranger les gens dans telle ou telle catégorie et cette définition s’en remettait à la filiation biologique comme si les Juifs constituaient une race ou une ethnie particulière dans le corps de la nation.

On dit parfois que le statut des Juifs adopté par le régime de Philippe Pétain était plus draconien que celui en vigueur dans l’Allemagne nazie.  On peut lire par exemple que :

Pour les Allemands, le Juif est défini par son appartenance à une religion, pour Vichy par son appartenance à une race.

Il faut vraiment haïr la France pour écrire ce genre de choses parce que si on se reporte aux lois de Nuremberg qui ont scellé le sort des Juifs en Allemagne, force est de constater que les grands absents sont les mots « religion » ou « confession. »

Et en effet, «la notion de « Juif » n’est pas définie par rapport à la religion dans les lois de Nuremberg, mais par rapport à la parenté. Ainsi des non-juifs se sont retrouvés persécutés »

Sur le fond, les lois de Vichy sont habitées du même esprit que la règlementation nazie correspondante, mais si elles sont également iniques, elles ne sont cependant   pas aussi draconiennes comme on a pu le prétendre. Ainsi, le régime de Vichy faisait un clair distinguo entre les Juifs Français, à l’exception notable de ceux à qui il a retiré cette nationalité, et les Juifs étrangers, ces derniers n’ayant aucun droit et étant voués généralement à être livrés au gouvernement allemand. A la différence toutefois de la loi nazie, les statuts adoptés par Vichy n’interdisent pas les mariages interconfessionnels et n’annulent pas les mariages conclus entre Juifs et non Juifs.

Le trait saillant de ces deux législations est la définition des Juifs comme «race» ou «ethnie», l’appartenance à cette « race » ou « ethnie » pouvant être repérée non par la croyance ou la pratique religieuse mais par la filiation.

A la différence des autorités nazies, le gouvernement de Vichy semble avoir quand même oscillé entre définition raciale et définition religieuse. Ainsi, alors que le premier statut des Juifs ne parle pas de religion mais seulement de race, on peut lire dans le deuxième, adopté en 1941 qu’est considéré juif ::

2º Celui ou celle qui appartient à la religion juive, ou y appartenait le 25 juin 1940, et qui est issu de deux grands-parents de race juive. La non-appartenance à la religion juive est établie par la preuve de l’adhésion à l’une des autres confessions reconnues par l’État avant la loi du 9 décembre 1905.

A la différence des lois nazies, le statut vichyssois prend en compte à la fois l’appartenance «raciale» et l’appartenance « confessionnelle ». Etrangement, ce statut, différence énorme par rapport à la règlementation nazie, considère la possibilité de sortir de la «race» juive par l’adhésion à une autre confession parmi celles reconnues par l’Etat avant la loi de 1905 portant séparation des églises et de l’Etat.

Cette ambivalence du texte vichyssois renvoie à deux choses.

La première est le caractère incongru pour un esprit français, même d’extrême droite, que représente la mise sur un même plan d’une appartenance nationale ou « raciale » et d’une appartenance confessionnelle. Le deuxième statut essaye de se dépatouiller avec cette contradiction.

La deuxième est la définition par le judaïsme lui-même de l’appartenance à cette confession, une appartenance définie d’abord par la filiation puisque pour être considéré juif par le rabbinat, il faut être né de mère juive. Cette condition de filiation est stricte et elle est nécessaire et suffisante pour être juif. Elle n’est atténuée que très marginalement par les procédures de conversion, le judaïsme gérant ainsi d’une certaine manière sa propre contradiction un peu comme l’a vécue le régime de Vichy.

Cette importance de la filiation biologique pour le judaïsme est incontestable et elle se retrouve aussi dans la réglementation qui encadre le prétendu «droit au retour» des Juifs dans l’entité sioniste et, elle est amplemendocumentée y compris par les débats sur les dons d’ovules et l’appartenance ou non au judaïsme d’un enfant conçu à partir d’un ovule cédé par une femme non juive.

Vous me direz que tout ça commence à puer et vous aurez raison. Mais ce qui m’amène à naviguer dans ces remugles est une question d’actualité que j’ai évoquée en passant tout récemment, la victoire juridique de l’écrivain Yoram Kaniuk à qui un tribunal de Tel Aviv vient de reconnaître le droit d’être rangé dans la catégorie juive de la population sans que le judaïsme soit considéré comme sa religion.

C’est ce qu’on appelle dans l’entité sioniste une victoire du sécularisme ou de la laïcité (quoique ces mots ne soient en réalité pas interchangeables), à savoir de considérer qu’être juif est une donnée ethnique ou même raciale. Cette victoire juridique de Kaniuk n’est en réalité qu’un retour par le tribunal aux sources du sionisme politique, volontiers athée et qui considérait les Juifs comme étant une nationalité distincte des autres nationalités au milieu desquelles vivaient les Juifs, britannique, française, allemande etc.

Sur ce point, les nazis étaient absolument d’accord avec Théodore Herzl, le fondateur du sionisme politique, et ils ne définissaient donc pas les Juifs selon un critère religieux mais national et racial. Ce sionisme politique originel de Herzl n’a pu l’emporter qu’en faisant jonction avec les rabbins qui revendiquent maintenant de plus en plus ouvertement la prééminence dans le mouvement sioniste et sont appuyés en ce sens par les riches fanatiques Américains qui dominent la vie communautaire juive aux Etats unis et tendent à dicter leurs vues aux gouvernements qui se succèdent à Tel Aviv, neutralisant tous les politiciens qui auraient une réelle intention de négocier avec les Palestiniens..

En ce sens, le tribunal de Tel Aviv a rendu une décision qui, loin de renvoyer à une quelconque modernité, s’inscrit dans le droit fil des lois raciales de Nuremberg et, de ce point de vue, est bien plus draconienne que les règlements édictés par le régime de Vichy.

De fait, si la décision Kaniuk fait jurisprudence, il ne sera même plus possible pour un Juif d’invoquer la liberté de conscience et on comprend mieux ce qui arrive à Mordechai Vanunu qui demande à ce qu’on lui fiche la paix avec le retour à Sion alors qu’il n’est plus de confession juive mais anglicane et que son souhait est de partir pour l’Australie.

Mais comme sous les lois raciales de Nuremberg, Vanunu ne peut se détacher de sa judéité qui se trouve quelque part dans ses gènes maternels. Au moins, sous Pétain, son adhésion à une religion « reconnue par l’Etat » lui aurait évité ces désagréments.

Et si vous prenez la loi du prétendu retour à Sion, sa parenté avec les statuts édictés sous Vichy est tout à fait évidente :

 L’article 4B de la loi définit un Juif comme étant « une personne née d’une mère juive ou convertie au judaïsme et qui n’est pas membre d’une autre religion ».

En effet, le deuxième statut de Vichy que j’ai évoqué un peu plus haut nous dit à peu près la même chose dans son article 1er,

Un Israélien oblige l’Etat à changer la classification “juif”

par Maayan Lubel, Reuters, le 7 octobre 2011traduit de l’anglais par Djazaïri

Jérusalem – Dans ses difficiles discussions de paix avec les Palestiniens, Israël a exigé d’être reconnue en tant qu’Etat juif, mais l’opinion intérieure est très divisée sur ce que cela signifie.

Yoram Kaniuk, un écrivain jovial de 81 ans, a été salué cette semaine par les Israéliens non religieux [secularists] pour sa victoire devant un tribunal qui a contraint l’Etat de ne plus répertorier le judaïsme comme étant sa « religion » tout en maintenant « juif » comme étant son « ethnicité ». Il est le premier Israélien juif à l’avoir fait.

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Yoram Kaniuk

Israël se définit lui-même comme Etat “juif et démocratique”. Le triomphe juridique de Kaniuk intervient à un moment où la société est de plus en plus polarisée entre ceux qui disent que la caractère juif de l’Etat doit être renforcé et les opposants qui disent que ce renforcement se fait au détriment des libertés et des droits civiques.

«J’étais malade et fatigué de voir l’extrême droite religieuse prendre le contrôle de nos vies. Nous sommes une majorité de laïques [secular] et nous avons tout simplement cédé. J’espère que la décision du tribunal changera les choses, » a-t-il expliqué à Reuters.

 “Je ressens un grand soulagement,” a déclaré Kaniuk, un des écrivains Israéliens les plus connus.

L’épouse de Kaniuk est Chrétienne et comme le droit rabbinique orthodoxe considère comme Juifs seulement ceyx sont la mère est juive, les filles du couple sont classées comme « sans religion. » C’est le fait de voir que son petit fils a été aussi classé dans les sans religion qui l’a incité à se lancer dans une contestation de l’influence de l’establishment religieux.

 «Je n’ai jamais été un Juif pratiquant et je ne crois pas en Dieu, » dit-il. Quand les Juifs ont été dispersés dans le monde, la religion a été un lien entre nous, mais nous n’en avons plus besoin.»

En Terre Sainte, les tensions sont fortes sur les questions de citoyenneté, d’ethnicité et de religion. Ces trois catégories sont utilisées dans le recensement pour classer les Israéliens qui sont majoritairement rangés dans la catégorie « Juif » aussi bien en termes de religion que d’ethnicité.

Kaniuk et ses partisans de la majorité juive laïque demandent une claire séparation entre la religion et l’Etat, et disent souffrir de la coercition religieuse.

Les transports en commun le jour du sabbat juif sont au mieux rares, les rabbins ont des pouvoirs en matière d’affaires familiales et l’Etat ne reconnaît que les mariages célébrés par des rabbins pour les Juifs qui se marient à l’intérieur de ses frontières. Ceux qui veulent se marier civilement doivent le faire à l’étranger.

PROTESTATION SYMBOLIQUE

Yael Katz-Mastbaum, l’avocate qui a plaidé l’affaire kaniuk, observe que depuis la décision du tribunal de Tel Aviv, elle croule sous des dizaines de requêtes d’Israéliens qui lui demandent son aide pour suivre les traces de Kaniuk.

 «Ce ne sont pas des jeunes gens qui agissent sur un coup de tête, mais des gens plus mûrs qui y ont réfléchi après s’être sentis étouffés  pendant des années par l’establishment religieux, » explique Katz-Mastbaum.

Selon elle, cette décision signifie que des des couples Juifs qui auraient obtenu un classement dans la catégorie non religieux pourraient se marier civilement.

Amos Amir, 76 ans, général de l’armée de l’air en retraite, a fait appel à Katz-Malstbaum après avoir appris la victoire de Kaniuk.

“Ce qui était à une époque un judaïsme modéré, sain et digne a été envahi âr un judaïsme extrémiste, et même raciste, u, judaïsme qui fait du tort à une religion toute entière et s’empare de l’Etat, » dit-il.

Mickey Gitzin, directeur du mouvement Be Free Israel qui revendique l’émancipation vis-à-vis de la religion, affirma avoir été lui aussi contacté par des dizaines d’Israéliens qui veulent modifier leur statut pour passer à celui de « sans religion » à la suite de l’affaire Kaniuk.

“C’est surtout symbolique. Les conséquences pratiques sont faibles mais c’est néanmoins un pas significatif.” Dit-il.

Environ 75 % des 7,7 millions d’habitants d’Israël sont repertories comme Juifs, près de 17 % sont Musulmans, environ 2 % Chrétiens, un peu moins sont classes comme Druzes et environ 4 % sont classes comme étant “sans religion.”

Les palestiniens affirment que l’exigence par Israël d’être reconnue en tant qu’Etat juif lèserait la minorité arabe et serait un abandon de fait du droit au retour des réfugiés Palestiniens qui on fui ou ont été expulsés de chez eux pendant les guerres israélo-arabes.

La bataille juridique de Kaniuk n’a rien à voir avec les empoignades diplomatiques qui visent à mettre fin à un conflit vieux de plusieurs dizaines d’années, mais elle a mis le doigt sur ce que beaucoup d’Israéliens voient comme une montée du zèle religieux au cœur de l’Etat.

“Ce n’était qu’un cas isolé, mais peut-être ai-je ouvert la voie à beaucoup d’autres personnes qui en ont assez de l’establishment religieux. Peut-être un jour, aurons-nous une vraie séparation de la religion et de l’Etat avec une société pluraliste, » déclare Kaniuk.


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