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L’Union Européenne refuse la marche vers la guerre contre l’Iran

5 janvier 2018

Encore un très bon article de Moon of Alabama sur la situation en Iran et surtout, sur la façon dont les lobbies militaristes, en premier lieu le lobby sioniste, cherchent à aggraver le régime de sanctions contre l’Iran avant une éventuelle intervention militaire.

Des actions qui sont non seulement contraires aux intérêts européens, comme l’ont fait comprendre plusieurs dirigeants dont le président français Emmanuel Macron et le chef de la diplomatie suédoise, mais également contraires aux intérêts américains.

L’intérêt des Etats Unis serait en effet d’entretenir des relations correctes avec l’Iran, ce qui est exactement ce que souhaitent les dirigeants iraniens.

La seule chose qui entrave ce rapprochement, beaucoup plus que la rivalité saoudo-iranienne que les Américains et leurs amis britanniques auraient vite fait d’apaiser, c’est le régime sioniste et ses différents lobbies dont le plus puissant exerce son influence à Washington.

Iran – L’Union Européenne rejette la marche des Etats Unis vers la guerre

Moon of Alabama (USA) 4 janvier 2018 traduit de l’anglais par Djazaïri

La réaction aux manifestations mineures en Iran a ouvert un autre fossé entre les Etats-Unis et l’Europe. Elle expose au grand jour l’agressivité du lobby sioniste et son influence dans la politique et les médias américains. La situation montre la divergence croissante entre les véritables intérêts américains et les intérêts d’Israël.

Certaines manifestations antigouvernementales et des attaques contre les institutions publiques persistent en Iran. Mais, comme le montre le graphique, ce genre de manifestations et d’émeutes continue de diminuer. La journée d’hier a vu se dérouler des événements dans seulement 15 endroits alors que, depuis le 28 décembre, un total de 75 villes et cités ont connu une forme de protestation ou d’incidents. En plus de ces derniers événements, plusieurs marches pro-gouvernementales ont eu lieu hier, chacune étant de loin plus importante que les manifestations antigouvernementales.

La courbe jaune représente des effectifs cumulés, les deux autres des effectifs pour chaque journée de manifestations/rassemblements

Source du graphique: Ali Kadivar

La violence contre les biens publics exercée certains jeunes émeutiers leur a aliéné les manifestants légitimes du début qui avaient suffisamment de raisons économiques pour rejeter les politiques néolibérales du gouvernement iranien actuel. L’instigation de la violence à partir de l’extérieur de l’Iran, probablement du fait des machinations de la CIA, les a privés de leur voix.

J’avais déjà posé la question :

Pourquoi les États-Unis font-ils ça ?

Le plan pourrait bien ne pas être de renverser immédiatement le gouvernement iranien, mais de provoquer une réaction brutale du gouvernement iranien contre les actions militantes dans son pays. … Cette réaction peut ensuite être utilisée pour appliquer des sanctions plus larges et plus strictes contre l’Iran, en particulier de la part de l’Europe. Ces sanctions s’inscriraient comme un autre élément constitutif d’un plan plus vaste visant à étrangler le pays et seraient une étape supplémentaire vers une escalade à plus grande échelle.

Et :

L’administration [américaine] vient d’appeler à une session d’urgence de l’ONU sur la situation. Une démarche risible…

Risible en effet. D’autres membres du Conseil de Sécurité et du Conseil de l’ONU pour les Droits Humains ont rejeté le plan américain. Ce n’est pas le rôle de l’ONU de s’immiscer dans les affaires intérieures de n’importe quel pays. Mais même pour ceux qui considèrent que l’ONU a un droit à intervenir, les manifestations en Iran, qui n’auraient jamais rassemblé plus de 15 000 personnes en même temps et peut-être 45 000 en effectifs cumulés, sont bien trop insignifiantes pour justifier une quelconque réaction onusienne.

L’Union européenne, principale cible des Etats-Unis qui veulent à nouveau imposer des sanctions contre l’Iran, a officiellement rejeté ces tentatives. Le ministre suédois des Affaires étrangères a déclaré que ces mesures sont « inacceptables » et que la situation ne peut être considérée comme justifiant une telle démarche [de réunion urgente de l’ONU]. Le président français Macron a averti que la rupture des relations avec l’Iran conduirait à la guerre. Il a été très explicite (traduction automatique) sur les acteurs derrière de telles démarches:

L’Union européenne, principale cible des Etats-Unis qui veulent à nouveau imposer des sanctions contre l’Iran, a officiellement rejeté ces tentatives. Le ministre suédois des Affaires étrangères a déclaré que ces mesures sont « inacceptables » et que la situation ne peut être qualifiée de telle sorte. Le président français Macron a averti (français) que la rupture des relations avec l’Iran conduirait à la guerre. Il était très explicite (traduction automatique) sur les acteurs derrière ces manœuvres :

La France a des relations fermes avec les autorités iraniennes mais veut conserver ce lien « parce que ce qui est train de se jouer sinon, c’est qu’on en train subrepticement de reconstruire un ‘axe du mal' », a déclaré le président français à des journalistes, en marge de ses voeux à la presse.

« On voit bien le discours officiel qui est porté par les Etats-Unis, Israël, l’Arabie saoudite, qui sont nos alliés à de nombreux égards, c’est quasiment un discours qui va nous conduire à la guerre en Iran », a-t-il ajouté, en soulignant sans davantage de précisions qu’il s’agissait d’une « stratégie délibérée de certains ».

Le ministre russe des Affaires étrangères a mis en garde les Etats-Unis contre toute ingérence dans les affaires intérieures de l’Iran.

Pendant ce temps, un grand journal saoudien, Al Arabiya , fait concurrence à The Onion [équivalent américain du Gorafi]  en affirmant que l’Iran a appelé le Hezbollah, des unités irakiennes et des mercenaires afghans pour l’aider à réprimer les manifestations.

Dans une tribune libre publiée par le Washington Post, le vice-président Pence dénonce le manque de réaction selon lui de l’administration Obama face aux manifestations en Iran [en 2009], mais n’annonce aucune réaction de la part de l’administration Trump. La rédaction du Washington Post y a ajouté plusieurs tribunes de lobbyistes pro-sionistes qui dénigrent l’Iran et reprochent à l’Europe de ne pas suivre la ligne de Trump.

L’anti-iranienne Foundation for Defense of Democracies (FDD) qui est financée par un spéculateur sioniste extrémiste, se voit accorder beaucoup d’espace rédactionnel dans les journaux américains :

Adam H. Johnson @adamjohnsonNYC – 4:04 AM – 3 Jan 2018

ces 72 dernières heures, la FDD a publié des tribunes libres sur l’Iran dans le New York Times, le Washington Post, le New York Post, Politico et le Wall Street Journal, répétant à chaque fois les le même argumentaire usé pro-intervention.

Adam H. Johnson @adamjohnsonNYC – 6:14 PM – 3 Jan 2018

ayant consommé leurs espaces réservés pour cette semaine dans les respectables WSJ , WaPo, Politico, et NYTimes, la FDD doit se rabattre sur le Washington Times aujourd’hui. Comme c’est triste!

Le blog Lawfare soi-disant «centriste» a publié un appel en faveur de la livraison de mines improvisées avec des «charges à fragmentation» [« Explosive Formed Penetrators »] aux manifestants iraniens. (Lors de l’invasion américaine en Irak, la résistance locale a fabriqué et utilisé de tels EFP contre les occupants américains.) L’US Army avait mensongèrement prétendu que les EFP venaient d’Iran.) Le rédacteur en chef de Lawfare , le célèbre Benjamin Wittes, semble être d’accord avec ce texte . Lui, l’éditeur du blog, écrit qu’il ne modifie jamais rien de ce qui est publié sur son site. Son seul reproche à propos de l’article est que l’appel à armer les émeutiers en Iran manque d’un raisonnement juridique explicite. (On se demande comment ceux qui écrivent dans Lawfare réagiront lorsque la Chine livrera des armes antichar lors de la prochaine manifestation du type Occupy Wall Street .)

C’est une grande campagne [politico-médiatique] qui accompagne aux Etats Unis des événements assez peu importants en Iran. La campagne est conçue pour créer une atmosphère de guerre contre ce pays. Les médias lui donnent beaucoup d’espace. Mais les États-Unis sont très isolés dans cette démarche. L’Arabie Saoudite est un tigre de papier qui ne compte pas et Israël ne peut pas agir [militairement] contre l’Iran. L’axe de la résistance est prêt pour une guerre de grande ampleur, a dit le dirigeant du Hezbollah Nasrallah . Il explique qu’une telle guerre serait menée au plus profond d’Israël.

Stephen Kinzer [kinzer est professeur de relations internationales à la Brown University ans le Rhode Island] souligne que l’animosité américaine contre l’Iran et son gouvernement ne résulte d’aucun raisonnement stratégique :

L’histoire veut que tout gouvernement iranien doive être fortement nationaliste et un défenseur vigilant des musulmans chiites partout dans le monde, de sorte que l’idée qu’un «changement de régime» produirait un Iran plus pro-américain est un fantasme. La sécurité des États-Unis ne sera pas sérieusement affectée par le cours de la politique intérieure de l’Iran.

[…]

En 1980, le président Carter avait proclamé que toute contestation de la domination américaine dans le golfe Persique serait considérée comme «une atteinte aux intérêts vitaux des États-Unis d’Amérique». Il était animé par les impératifs mondiaux de son époque. Une grande partie du pétrole américain traversait le golfe Persique, et l’Occident ne pouvait pas risquer de le perdre face au pouvoir soviétique.

Aujourd’hui, il n’y a pas d’Union Soviétique et nous ne comptons plus sur le pétrole du Moyen-Orient. Pourtant, même si ce qui fondait notre politique s’est évaporé, la politique elle-même demeure inchangée, une relique d’un autre âge.

Kinzer a raison sur l’absence d’argument stratégique. Mais il néglige l’influence du lobby sioniste et son intérêt à maintenir les Etats-Unis impliqués dans la destruction de tout adversaire potentiel à son entreprise coloniale. L’intérêt véritable du peuple des États-Unis n’est pas ce qui motive la politique américaine et ce, depuis un certain temps (si jamais ce fut le cas).