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Diana Johnstone revient sur la campagne contre Dieudonné pour le magazine américain Counter Punch

26 janvier 2014

Après son premier article très remarqué sur la campagne contre Dieudonné, Diana Johnstone récidive en complétant l’analyse du contexte idéologique et religieux dans lequel a pris place cette campagne.

Elle attire particulièrement notre attention sur le caractère quasi-religieux attribué à ce qu’on appelle la shoah ou l’holocauste. Je dirai simplement que cette religion n’est pas la nouvelle religion juive comme le pense Yeshayahu Leibowitz, mais la nouvelle religion pour les non Juifs avec le « peuple juif » comme divinité et une hiérarchie cléricale et doctrinaire dominée par des Juifs.

De fait, il n’y a pas eu de shoah ou d’holocauste. Ces deux termes n’ont pas été introduits par des historiens qui auraient jugé utile de qualifier ainsi les persécutions subies par les Juifs sous le nazisme, mais correspondent à des titres de productions « artistiques », à savoir le « documentaire » de Claude Lanzmann pour le mot « shoah » et un feuilleton télévisé américain pour le mot « holocauste ».

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Quand on parle d’enseigner la mémoire de l’holocauste ou de la shoah, on parle donc en réalité d’autre chose que d’histoire.

Je ne commenterai pas plus avant ce texte de Diana Johnstone, sauf pour dire qu’il invite à réfléchir sur la place du religieux dans la société. Le religieux correspond en effet à un besoin, non seulement des individus et des divers groupes qui constituent la société, mais c’est aussi un besoin de l’Etat lui-même.

Chassé par la porte, il revient par la fenêtre sous des formes parfois surprenantes à première vue mais qui correspondent toujours en réalité aux structures connues du fait religieux.

La Shoah comme religion d’Etat ?

 Blasphème dans la France laïque

par DIANA JOHNSTONE, Counter Punch (USA) 24 janvier 2014 traduit de l’anglais par Djazaïri

Paris – La campagne menée par le gouvernement français, les médias et des organisations influentes pour faire taire l’humoriste franco-camerounais Dieudonné M’Bala M’Bala continue à mettre en lumière une coupure radicale dans l’opinion publique française. La «mobilisation» officielle contre l’artiste comique, appelée d’abord par le ministre de l’Intérieur Manuel Valls lors d’un rassemblement du parti socialiste au pouvoir l’été dernier, dépeint l’artiste dépeint comme un dangereux agitateur antisémite, dont le geste de la « quenelle » * est interprété comme un  » salut nazi inversé « .

Pour ses fans et ses supporteurs, ces accusations sont fausses et absurdes.

 Le résultat le plus significatif du tapage autour der Dieudonné est sans doute pour l’instant le début d’une prise de conscience chez de plus en plus de gens, que la «Shoah», ou l’Holocauste, fonctionne comme la religion d’État semi-officielle de la France.

Sur RTL télévision le 10 janvier dernier, le commentateur non conformiste bien connu Eric Zemmour (qui se trouve être juif) observait qu’il était « ridicule et grotesque » d’associer Dieudonné au IIIème Reich. Zemmour décrivait Dieudonné comme un produit du multiculturalisme français de gauche. « C’est la gauche qui nous a appris depuis mai 68 qu’il est interdit d’interdire, c’est la gauche artistique qui nous a enseigné qu’il fallait choquer le bourgeois. C’est la gauche anti-raciste qui a fait de la Shoah la religion suprême de la République… »

Zemmour suggérait que Dieudonné provoquait « la bourgeoisie bien pensante de gauche » et qu’il « reproche aux Juifs de vouloir conserver le monopole de la souffrance et de voler aux descendants d’esclaves la primauté du malheur. »

L’enjeu est plus large. Les rappels de la Shoah servent indirectement à justifier une politique étrangère de la France au Moyen Orient de plus en plus pro-israélienne. Dieudonné était opposé à la guerre contre la Libye, au point de se rendre sur place pour montrer sa solidarité avec ce pays qui était bombardé par l’OTAN.

Dieudonné a commencé sa carrière comme militant antiraciste. Au lieu de s’excuser pour son sketch de 2003 où il moquait un « colon sioniste extrémiste », Dieudonné a répliqué en étendant le domaine de son humour pour inclure la Shoah. La campagne conte lui peut être vue comme une volonté de rétablir le caractère sacré de la Shoah par une action de répression d’une forme contemporaine de blasphème.

Confirmant cette impression, une convention « historique » a été conclue le 9 janvier entre le Parquet de Paris et le Mémorial de la Shoah pour permettre à tout adolescent reconnu coupable d’antisémitisme d’être condamné à suivre un cours de « sensibilisation à l’histoire de l’extermination des Juifs. » L’étude du génocide est supposée leur apprendre les « valeurs républicaines de tolérance et de respect d’autrui. »

C’est peut-être précisément ce dont ils n’ont pas besoin. Le Parquet n’a peut-être pas conscience de tous ces jeunes gens qui disent qu’ils ont reçu plutôt trop que pas assez d’éducation à la Shoah.

Un article atypique dans Le Monde du 8 janvier citait des opinions qu’on peut facilement entendre auprès de la jeunesse française mais qui sont habituellement ignorées. Après avoir interviewé des spectateurs de la classe moyenne et ayant des sympathies de gauche et qui réfutent out antisémitisme, Soren Seelow citait Nico, un étudiant en droit à la Sorbonne qui vote à gauche et adoré Dieudonné parce qu’il « libère le rire dans ce qu’il considère comme étant une société conformiste, compassée et « bien-pensante.» Quant à la Shoah, Nico se plaint que « On nous en parle depuis la primaire, soupire Nico. A 12 ans, j’ai vu un film où des tractopelles poussaient des cadavres dans des fosses. Nous subissons une morale culpabilisatrice dès le plus jeune âge. ». »

En plus des cours d’histoire, les enseignants organisent des commémorations de la Shoah et des voyages à Auschwitz. Les rappels de la Shoah dans les médias sont presque quotidiens. Cas unique dans l »histoire de France, la loi dite Gayssot dispose que toute déclaration niant ou minimisant la Shoah est passible de poursuites voire de prison.

Les nombreux messages que j’ai reçus de la part de citoyens français en réaction à mon précédent article (Counter Punch, 1er janvier 2014) ainsi que des conversations privées ont rendu clair pour moi que les rappels à la Shoah sont très souvent vécus par des personnes nées des dizaines d’années après la défaite du nazisme comme des invitations à ressentir de la culpabilité ou au moins mal à l’aise pour des crimes qu’ils n’ont pas commis. Comme beaucoup d’événements qui exigent de la solennité, la Shoah peur être ressentie comme un sujet qui impose un silence gêné. Le rire est alors vécu comme une libération.

 Mais pour d’autres, ce genre de rire ne peut être qu’abomination.

Dieudonné a été condamné à 8 000 euros d’amende pour sa chanson « Shoananas » et d’autres condamnations semblables pointent à l’horizon. Ces poursuites devant les tribunaux, à l’instigation surtout de la LICRA (Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme) ont aussi pour but de le ruiner financièrement.

 “Haine”

Un des refrains du choeur anti-Dieudonné affirme qu’il « n’est plus un comédien » mais a transformé ses spectacles en « réunions politiques antisémites » qui répandent la « haine ». Même le lointain magazine New Yorker a accusé l’humoriste de faire carrière en propageant la « haine ». Ce qui évoque des images de choses terribles qui sont très éloignées de ce qu’est un spectacle de Dieudonné ou de ses conséquences.

Il n’y avait pas d’atmosphère de haine chez les milliers de fans qui n’avaient pas pu assister le 9 janvier au spectacle de Dieudonné à Nantes, interdit à la dernière minute par le Conseil d’Etat, la plus haute juridiction administrative. Personne ne se plaignait d’avoir été privé d’un « rassemblement nazi ». Personne ne songeait à faire du mal à qui que ce soit. Tous disaient être venus pour profiter du spectacle. Ils représentaient un échantillon normal de jeunes Français de la classe moyenne avec souvent un bon niveau d’éducation. Le spectacle avait été interdit sur la base « de trouble public éventuel ». La foule déçue s’est dispersée pacifiquement. Les spectacles de Dieudonné n’ont jamais donné lieu à un quelconque trouble à l’ordre public.

Mais on ne se trompera pas en parlant d’une haine virulente contre Dieudonné

 Philippe Tesson, un commentateur écouté, a annoncé lors d’une récente interview radio, qu’il se « réjouirait profondément » de voir Dieudonné exécuté par un peloton d’exécution. «C’est, pour moi, une bête immonde. Donc qu’on le supprime ! » s’était-il exclamé.

Rav Haim Dynovisz, le rabbin qui professe sur internet, a admis dans un de ses cours de théologie que la théorie darwinienne de l’évolution qu’il rejette avait été prouvée par Dieudonné comme vérifiée pour « certaines » personnes qui doivent descendre du gorille.

Deux adolescents âgés de 17 ans ont été renvoyés définitivement de leur lycée pour avoir fait le geste de le quenelle considérée comme [apologie de] « crimes contre l’humanité ». Le webzine franco-israélien JSSNews a activement enquêté sur les identités des personnes qui ont fait le geste de la quenelle pour qu’elles soient licenciées de leurs emplois, se vantant qu’il allait « faire monter le chômage en France. »

Les propriétaires du petit théâtre parisien de « La main d’Or », loué par Dieudonné avec un bail qui expire en 2019 ; sont récemment rentrés précipitamment d’Israël en exprimant leur intention de trouver un point de droit permettant de rompre le bail et de lui faire quitter les lieux.

Pour ce que j’en sais, la pire chose jamais dite par Dieudonné pendant ses spectacles était une insulte personnelle contre le présentateur radio Patrick Cohen. Cohen avait plaidé avec insistance pour que des personnes qu’il qualifie de « cerveaux malades » comme Dieudonné ou Tariq Ramadan soient exclus des studios de télévision. En décembre dernier, la télévision française (qui le reste du temps tient Dieudonné à l’écart de ses émissions) avait filmé Dieudonné disant « quand j’entends parler Patrick Cohen, je me dis, vous savez, les chambres à gaz… Dommage… »

Avec l’offensive anti-Dieudonné déjà en bonne voie, on s’était emparé de ces propos insultants comme s’ils étaient caractéristiques des spectacles de Dieudonné. C’était une réaction excessivement brutale de Dieudonné face à des attaques très virulentes contre sa personne.

Que ça plaise ou pas, l’irrévérence est un ingrédient du comique. Et les références de Dieudonné à l’Holocauste ou à la Shoah sont toutes à ranger dans la catégorie de l’irrévérence.

Sur des sujets autres que la Shoah, ce n’est pas l’irrévérence qui manque en France.

Les religions traditionnelles, ainsi que des personnalités importantes, sont régulièrement caricaturées d’une manière caricaturale que la quenelle apparaît prude. En octobre 2011 , la police parisienne était intervenue contre des Catholiques traditionalistes qui essayaient d’interrompre une pièce de théâtre dans laquelle on mettait (apparemment) des excréments sur le visage de Jésus. La classe politico-médiatique avait défendu avec vigueur la pièce, sans se préoccuper du fait que certaines personnes la percevaient comme « insultante ».

La France a récemment fait très bon accueil à une organisation ukrainienne qui se fait appeler « Femen », des jeunes femmes qui semblent avoir étudié les doctrines de provocation de Gene Sharp et se servent de leurs poitrines dénudées en guise d’affirmations (ambiguës). Ces femmes ont obtenu rapidement des titres de séjour(si difficiles à obtenir pour nombre de travailleurs immigrés) et ont eu la permission de s’installer au cœur du principal quartier musulman de Paris où elles ont immédiatement essayé (sans succès) de provoquer les habitants incrédules. La leader blonde des Femen a même été choisie pour incarner le symbole de la république, Marianne, sur les timbres poste français alors qu’elle ne parle pas français.

Le 20 décembre dernier, ces « nouvelles féministes » ont pénétré dans l’église de la Madeleine près du palais de l’Elysée à Paris, mimé « l’avortement de Jésus » avant d’uriner devant l’autel. Il n’y a eu aucune expression d’indignation de la part du gouvernement français. L’Eglise Catholique a protesté, mais ce genre de protestations n’a qu’un faible écho aujourd’hui en France.

 Pourquoi la Shoah doit être sacrée

Quand Dieudonné chante la Shoah avec légèreté, il est considéré par certains comme quelqu’un qui nie l’Holocauste et appelle à sa répétition (une proposition contradictoire si on y réfléchit). Le caractère sacré de la Shoah est défendu avec l’argument selon lequel maintenir vivant le souvenir de l’Holocauste est essentiel pour empêcher qu’il « se produise une nouvelle fois. » En évoquant la possibilité d’une répétition, on entretient la peur.

Cette thèse est le plus souvent acceptée comme une loi de la nature. Nous devons continuer à commémorer le génocide pour empêcher qu’il se reproduise. Mais existe-t-il quelque preuve pour étayer cette thèse ?

.Rien ne prouve que des rappels répétés d’un événement historique très important qui s’est produit dans le passé puissent l’empêcher de survenir à nouveau. Ce n’est pas ainsi que marche l’histoire. Dans le cas de la Shoah, des chambres à gaz et tout le reste, il est assez absurde d’imaginer que cela puisse se reproduire si on considère tous les facteurs qui ont permis que ça se produise une première fois. Hitler avait le projet d’asseoir le rôle des Allemands en tant que race « aryenne » dominante en Europe et il haïssait les Juifs en tant que dangereuse élite rivale. Qui aujourd’hui entretient un tel projet ? Certainement pas un humoriste franco-africain ! Hitler n’est pas de retour, pas plus que Napoléon Bonaparte ou le Hun Attila.

Le rappel constant de la Shoah dans des articles, des films, l’actualité ainsi qu’à l’école, loin de prévenir quoi que ce soit, peut créer une fascination morbide pour les « identités ». Il induit la « concurrence victimaire. » Cette fascination peut amener à des résultats inattendus. Quelques 300 écoles parisiennes arborent des plaques en mémoire d’enfants juifs déportés dans les camps de concentration nazis. Comment les enfants juifs réagissent-ils à ça aujourd’hui ? Trouvent-ils que c’est rassurant ?

C’est peut-être utile à l’Etat d’Israël qui a lancé un programme triennal pour encourager plus de Juifs parmi les 600 000 que compte la France à quitter ce pays pour aller en Israël. En 2013, le nombre d’aliyah [prétendu retour à Sion] a augmenté pour atteindre plus de 3 000, une tendance attribuée par l’European Jewish Press « à une mentalité sioniste de plus en plus présente dans la communauté juive française, particulièrement chez les jeunes et aux actions de l’Agence Juive, du gouvernement israélien et d’autres organisations non gouvernementales pour cultiver l’identité juive en France. »

« Si nous avons vu cette année l’aliyah en provenance de France passer de moins de 2 000 à plus de 3 000, je vois ce chiffre passer dans un proche avenir à 6 000 et plus parce que nous connectons toujours plus de jeunes gens à la vie juive et à Israël, » déclarait Nathan Sharansky, président de l’Agence Juive pour Israël. Il est vrai qu’une des manières d’encourager l’aliyah est d’effrayer les Juifs avec la menace de l’antisémitisme, et prétendre que des nombreux fans de Dieudonné sont des nazis déguisés est une bonne manière d’y parvenir.

Mais pour les Juifs qui veulent rester vivre en France, est-il vraiment sain de continuer à rappeler aux enfants juifs que, s’ils ne se tiennent pas sur leurs gardes, leurs compatriotes pourraient un jour vouloir les entasser dans des wagons de marchandises et les expédier à Auschwitz ? J’ai entendu des gens dire en privé que ce rappel permanent s’apparentait à de la maltraitance d’enfants.

Une personne qui voit les choses ainsi est Jonathan Moadab, un journaliste indépendant àgé de 25 ans qui a été interviewé par Soren Seelow. Moadab est à la fois juif pratiquant et antisioniste. Enfant, on l’a emmené visiter Auschwitz . Il a expliqué à Seelow que vivre avec dette « endoctrination victimaire » a engendré une sorte de « syndrome de stress pré-traumatique. »

 « Les plaisanteries de Dieudonné sue la Shoah, comme sa chanson Shoananans, ne visent pas la Shoah en tant que telle, » dit-il, « mais l’exploitation de l’Holocauste décrite par le sociologue américain Norman Finkelstein »

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Le 22 janvier, Jonathan Moadab a appelé ouvertement sur son site web Agence Info Libre à « séparer l’Etat de la religion de l’Holocauste ». Moadab cite le professeur Yeshayahu Leibowitz comme étant le premier à relever les nombreux aspects par lesquels l’Holocauste est devenue la nouvelle religion juive. Si tel est le cas, tout le monde a le droit de pratiquer la religion de la Shoah. Mais doit-elle être la religion officielle de la France ?

Les politiciens français ne cessent de vanter la “laïcité”, la sécularité, de la république française. Le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, qui proclame sa dévotion personnelle pour Israël a récemment qualifié la Shoah de « sanctuaire qu’on ne peut pas profaner ». Moadab conclut que si la Shoah est un sanctuaire, alors l’Holocauste est une religion et la République n’est pas laïque.

Des changements se font dans l’attitude des jeunes gens en France. Ce changement n’est pas dû à Dieudonné. Il est dû au temps qui passe. L’Holocauste est devenu la religion de l’Occident à une époque où la génération de l’après seconde guerre mondiale était encline à blâmer ses parents. Aujourd’hui, ce sont les petits enfants ou arrières petits enfants de ceux qui ont traversé cette période et ils veulent regarder devant eux. Aucune loi ne peut l’empêcher.

« Comme je l’ai dit dans mon article précédent, la « quenelle » est un geste vulgaire signifiant à peu près « dans ton c.., » avec une main placée en haut de l’autre bras en extension vers le bas pour préciser sa longueur. Reprenant le nom d’un mets français, Dieudonné avait commencé à utiliser ce geste dans un contexte complètement différent il y a des années de ça, pour exprimer la méfiance, le scepticisme ou l’indifférence.

La campagne contre Dieudonné vue par Diana Johnstone pour le magazine américain Counter Punch

2 janvier 2014

Un bon article très remarqué de Diana Johnstone sur les développements autour du geste de la quenelle popularisé par l’humoriste Dieudonné.

Diana Johnstone

Diana Johnstone

L’article est publié par Counter Punch, un magazine américain de gauche, c’est-à-dire extrémiste dans la terminologie politique en vigueur aux Etats Unis, pays où dominent traditionnellement un centre gauche et un centre droit.

Je en ferai pas de commentaires même si ce n’est pas l’envie de le faire qui manque.

La tentative de museler Dieudonné M’Bala M’Bala

la Bête Noire [en français dans le texte, NdT] de l’establishment français

par DIANA JOHNSTONE à Paris, Counter Punch (USA) 1er janvier 2014 traduit de l’anglais par Djazaïri

Les médias traditionnels et les politiques commencent la nouvelle année avec une résolution partagée pour 2014 : museler définitivement un comédien franco-africain qui devient trop populaire auprès des jeunes gens.

Entre Noël et la Saint-Sylvestre, ce n’est personne d’autre que le Président de la République, François Hollande qui, lors d’une visite en Arabie Saoudite pour de (très grosses) affaires commerciales, a déclaré que son gouvernement devait trouver un moyen d’interdire des spectacles de l’humoriste Dieudonné M’Bala M ‘ Bala, ainsi qu’a appelé à le faire le ministre français de l’Intérieur, Manuel Valls.

Le leader du parti conservateur d’opposition, l’UMP Jean-François Copé, a fait immédiatement chorus en apportant un «soutien total» à la réduction au silence de l’incontrôlable comédien.

Au milieu de ce choeur médiatique unanime, l’hebdomadaire Le Nouvel Observateur a écrit en éditorial que Dieudonné est «déjà mort,» lessivé, fini. La rédaction débattait ouvertement de la meilleure tactique entre essayer de le faire emprisonner pour «incitation à la haine raciale», l’annulation de ses spectacles sur la base de potentielles «menaces de trouble à l’ordre public,» ou l’exercice de pressions en menaçant les communes de diminuer le montant des subventions pour la culture si elles l’autorisent à se produire.

 L’objectif de Manuel Valls, le patron de la police nationale, est clair, mais le pouvoir tâtonne quant à la méthode.

La quenelle a un effet dévastateur sur Manuel Valls

Le cliché méprisant qui est constamment répété est que «Dieudonné ne fait plus rire personne.»

En réalité, c’est le contraire qui est vrai. Et c’est là le problème. Dans sa récente tournée dans les villes françaises, des vidéos montrent de grandes salles archi combles pliées de rire devant leur humoriste préféré. Il a popularisé un geste simple qu’il appelle la «quenelle.» Ce geste est imité par des jeunes gens dans toute la France. Elle veut dire tout simplement et à l’évidence : on en a marre.

 Pour inventer un prétexte pour détruire Dieudonné, la principale organisation juive, le CRIF (Conseil Représentatif des Institutions Juives de France, équivalent français de l’AIPAC) et la LICRA (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme), qui jouit de privilèges particuliers dans le droit français (la journaliste parle du droit de se porter partie civile, NdT) ont sorti une histoire extravagante pour qualifier Dieudonné et ceux qui le suivent de «nazis.» La quenelle n’est selon toute évidence qu’un geste grossier signifiant à peu près «dans ton cul» avec une main placée en haut de l’autre bras pointé vers le bas pour préciser la longueur de la quenelle.

Mais pour le CRIF et la LICRA, la quenelle est «un salut nazi à l’envers». (On n’est jamais assez «vigilant» quand on cherche un Hitler caché)

Comme quelqu’un l’a remarqué, un «salut nazi à l’envers» peut tout aussi bien être considéré anti-nazi. Si encore le geste a quelque chose à voir avec Heil Hitler. Ce qui n’est manifestement pas le cas.

 Mais le monde des médias reprend cette affirmation, en signalant tout du moins que «certains considèrent la quenelle comme un salut nazi à l’envers. » Peu importe si ceux qui pratiquent ce geste n’ont aucun doute sur ce qu’il veut dire : N…e le système !

 Mais jusqu’à quel point le CRIF et la LICRA sont-ils «le système» ?

La France a un grand besoin de rire 

L’industrie française est en train de disparaître, avec des usines qui ferment les une s après les autres. L’imposition des citoyens à faibles revenus est à la hausse, pour sauver les banques et l’euro. La désillusion vis-à-vis de l’Union européenne est de plus en plus forte. Les règles de l’UE empêchent toute action sérieuse pour améliorer l’état de l’économie française. Pendant ce temps, les politiciens de gauche et de droite continuent leurs discours creux, émaillés de clichés sur les «droits de l’homme» – en grande partie comme prétexte pour aller à la guerre au Moyen-Orient ou pour des diatribes contre la Chine et la Russie. Le pourcentage d’opinions positives sur le président Hollande a dégringolé à 15%. Pourtant les gens votent, avec pour résultat les mêmes politiques, décidées par l’UE.

Pourquoi alors la classe dirigeante concentre-t-elle sa vindicte sur «l’humoriste le plus talentueux de sa génération » (ainsi que le reconnaissent ses confrères, même quand ils le dénoncent)?

La réponse en bref est probablement que la popularité montante de Dieudonné auprès de la jeunesse illustre un accroissement de l’écart entre générations. Dieudonné fait rire aux dépends de l’ensemble de l’establishment politique. Ce qui a eu pour conséquences un torrent d’injures et de démarches pour interdire ses spectacles, le ruiner financièrement et même le faire aller en prison. Les attaques verbales fournissent le contexte propice à des agressions physiques contre lui. Il y a quelques jours, son assistant Jacky Sigaux a été agressé physiquement en pleine journée par plusieurs hommes masqués devant la mairie du 19ème arrondissement – juste en face du parc des Buttes Chaumont. Il a déposé plainte.

Mais quelle protection peut-on espérer de la part d’un gouvernement dont le ministre de l’intérieur, Manuel Valls – en charge de la police – a promis de trouver les moyens de faire taire Dieudonné ?

Cette affaire est importante mais il est pratiquement certain qu’elle ne sera pas traitée correctement dans les médias hors de France – exactement comme elle n’est pas traitée correctement dans la presse française qui est la source de presque tout ce qui est rapporté à l’étranger. Les problèmes liés à la traduction, une part de malentendus et de contrevérités ajoutent à la confusion.

 Pourquoi le haïssent-ils ?

Dieudonné M’Bala M’Bala est né dans la banlieue parisienne il y a 48 ans Sa mère était une blanche originaire de Bretagne, son père était un Africain originaire du Cameroun. Ce qui devrait faire de lui l’enfant-modèle du «multiculturalisme» que l’idéologie dominante de la gauche affirme promouvoir. Et durant la première partie de sa carrière, en duo avec son ami juif Elie Semoun, il était exactement ça : il faisait campagne contre le racisme, concentrant ses attaques sur le Front National allant même jusqu’à se présenter aux élections municipales contre une candidate du Front National à Dreux, une cité dortoir à environ 90 kilomètres à l’ouest de Paris où il réside. Comme les meilleurs humoristes, Dieudonné a toujours ciblé les événements de l’actualité, avec un engagement et une dignité peu courants dans la profession. Sa carrière était florissante, il jouait dans des films, était invité à la télévision et travaillait désormais en solo. Très bon observateur, il excelle dans des imitations assez subtiles de divers types de personnalités et groupes ethniques, des Africains aux Chinois.

Il y a dix ans, le 1er décembre 2003, en tant qu’invité dans une émission de télévision traitant d’actualité intitulée «On ne peut pas plaire à tout le monde,» un nom tout à fait approprié, Dieudonné était arrivé sur le plateau sommairement déguisé en «converti au sionisme extrémiste», suggérant aux autres de «rejoindre l’axe du bien israélo-américain. ». Cette mise en cause relativement modérée de « l’axe du mal » de George W. Bush semblait complètement dans l’air du temps. Ce sketch se terminait par un bref salut «Isra-heil». On était loin du Dieudonné des débuts mais l’humoriste populaire avait été néanmoins salué avec enthousiasme par les autres comédiens tandis que le public présent sur le plateau lui avait fait une standing ovation.

C’était dans la première année de l’attaque américaine contre l’Irak à laquelle la France avait refusé de s’associer, ce qui avait amené Washington à rebaptiser ce qu’on appelle là-bas « french fries » (belges en réalité) en «freedom fries» .

Puis les protestations ont commencé à arriver, concernant particulièrement le geste final vu comme posant une équivalence entre Israël et l’Allemagne nazie.

« Antisémitisme ! » criait-on même si la cible du sketch était Israël (et les Etats Unis et leurs alliés au Moyen Orient). Les appels se multipliaient pour interdire ses spectacles, le poursuivre en justice, détruire sa carrière. Dieudonné a essayé d’expliquer que son sketch ne visait pas les Juifs en tant que tels mais, à la différence d’autres avant lui, il n’a pas présenté d’excuses pour une offense qu’il considère ne pas avoir commise.Pourquoi n’y-a-t-il pas eu de protestations de la part des Africains dont il s’est moqué ? Ou des Musulmans, Ou des Chinois ? Pourquoi une seule communauté a-t-elle réagi avec autant de rage ?

A commencé alors une décennie d’escalade. La LICRA entama une longue série d’actions en justice contre lui (« incitation à la haine raciale »), les perdant au début mais ne relâchant pas la pression. Au lieu de céder, après chaque attaque Dieudonné a poussé plus avant sa critique du « sionisme », Dans le même temps, Dieudonné était graduellement exclu des studios de télévision et traité comme un paria par les médias grand public. C’est seulement la profusion récente sur internet d’images montrant de jeunes gens en train de faire le geste de la quenelle qui a poussé l’establishment à conclure qu’une attaque frontale serait plus efficace que d’essayer de l’ignorer.

L’arrière-plan idéologique

 Pour essayer de comprendre la signification de l’affaire Dieudonné, il est nécessaire d’appréhender le contexte idéologique. Pour des raisons trop complexes pour qu’on les présente ici, la gauche française – la gauche dont la préoccupation principale était autrefois le bien-être des travailleurs, l’égalité sociale, l’opposition aux guerres d’agression, la liberté d’expression – n’existe pratiquement plus. La droite a gagné la bataille décisive de l’économie avec le triomphe de politiques qui favorisent la stabilité monétaire et les intérêts du capital dfinancier international (le « néolibéralisme »). Comme prix de consolation, la gauche jouit d’une certaine prééminence idéologique basée sur l’anti-racisme, l’anti-nationalisme et l’engagement en faveur de l’Union Européenne – et même de l’hypothétique « Europe sociale » qui s’éloigne à grands pas pour rejoindre le cimetière des rêves disparus. En fait, cette idéologie coïncide parfaitement avec une mondialisation fondée sur les exigences du capitalisme financier international.

En l’absence de toute véritable gauche sociale et économique, la France a sombré dans une sorte de «politique de l’identité » qui fait à la fois l’éloge du multiculturalisme et réagit avec véhémence contre le «communautarisme », c’est-à-dire l’affirmation de n’importe quel particularisme jugé indésirable. Mais certains particularismes ethniques sont encore moins les bienvenus que d’autres. Le voile islamique a été d’abord interdit dans les écoles, et les demandes pour le faire interdire dans l’espace public se font de plus en plus pressantes. Le niqab et la burqa, quoique rares, ont été interdits par une loi. Des controverses éclatent sur la nourriture halal dans les cantines, les prières sur la voie publique, tandis que des caricatures raillent régulièrement l’Islam. Quoi qu’on puisse penser de tout ça, la lutte contre le communautarisme peut être vue par certains comme dirigée contre une communauté en particulier. Dans le même temps, les dirigeants politiques français ont pris la tête de ceux qui appellent à la guerre dans des pays musulmans comme la Libye et la Syrie tout en affichant leur dévotion pour Israël.

En même temps, une autre communauté fait l’objet d’une sollicitude de tous les instants. Ces vingt dernières années, alors que la pratique religieuse et l’engagement politique ont considérablement décliné, l’holocauste, appelé Shoah en France, est devenu progressivement une sorte de religion d’Etat. Les écoles commémorent la Shoah chaque année, elle domine de plus en plus dans une conscience historique en recul sous les autres aspects tout comme nombre d’approches en sciences humaines. En particulier, de tous les événements de la longue histoire de France, le seul protégé par une loi est la Shoah.. La loi dite Gayssot prohibe tout questionnement sur l’histoire de la Shoah, une interférence absolument sans précédent avec la liberté d’expression. En outre, certaines associations comme la LICRA, se sont vues accorder le privilège de pouvoir poursuivre des individus en justice sur la base de « l’incitation à la haine raciale » (interprétée de manière très large et inégale) avec la possibilité d’encaisser des dommages et intérêts au nom de la « communauté insultée ». En pratique, ces lois servent surtout à poursuivre «l’antisémitisme» présumé et le «révisionnisme» par rapport à la Shoah. Même si elles sont souvent rejetées par les tribunaux, de telles actions en justice participent du harcèlement et de l’intimidation. La France est un des rares pays où le mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) contre la colonisation israélienne peut aussi être attaqué devant les tribunaux pour «incitation à la haine raciale.»

Organisation violente, la Ligue de Défense Juive (LDJ), illégale aux Etats Unis et même en Israël, est connue pour avoir saccagé des librairies ou frappé des individus isolés, parfois âgés. Quand les agresseurs sont identifiés, la fuite en Israël est une bonne porte de sortie. Les victimes de la LDJ n’inspirent jamais dans l’opinion publique quoi que ce soit de comparable à l’indignation publique massive quand un citoyen juif est victime d’une agression gratuite. Par ailleurs, les politiciens se rendent au dîner annuel du CRIF avec le même zèle que ceux des Etats Unis pour aller au dîner de l’AIPAC -pas pour financer leurs campagnes électorales mais pour prouver la bienveillance de leurs sentiments.

La France possède la plus importante communauté juive d’Europe occidentale, une population qui a en grande majorité échappé à la déportation pendant l’occupation allemande au cours de laquelle les immigrés juifs avaient été expulsés vers les camps de concentration. En plus d’une communauté juive établie depuis très longtemps, il y a beaucoup de nouveaux venus originaires d’Afrique du Nord. Tout cela contribue à une population aux succès très dynamiques, très présente dans les professions les plus visibles et les plus populaires (le journalisme, le show business ainsi que la science et la médecine entre autres)

De tous les partis politiques français, le Parti Socialiste (en particulier via le Parti Travailliste de Shimon Peres qui est membre de l’Internationale Socialiste) est celui qui a les liens historiques les plus étroits avec Israël. Dans les années 1950, quand la France combattait le mouvement de libération nationale algérien, le gouvernement français (via Peres) avait contribué au projet israélien de production d’armes atomiques. Aujourd’hui, ce n’est pas le Parti Travailliste qui gouverne Israël mais l’extrême droite. La récente visite amicale faite par Hollande à Benjamin Netanyahou a montré que la dérive droitière de la vie politique en Israël n’a absolument pas tendu les relations – qui semblent plus étroites que jamais.

Il n’empêche que la communauté juive est très petite en comparaison du grand nombre d’immigrés arabes venus d’Afrique du Nord ou des immigrés noirs originaires des anciennes colonies françaises en Afrique. Il y a quelques années, Pascal Boniface, un intellectuel de renom membre du PS, avait prudemment averti les dirigeants du parti que leur biais en faveur de la communauté juive pourrait finir par causer des problèmes électoraux. Cet avertissement qui figurait dans un document d’analyse politique avait provoqué un tollé qui lui avait presque coûté sa carrière.

Mais le fait demeure : il n’est guère difficile pour les français d’origine arabe ou africaine d’avoir le sentiment que le «communautarisme » qui a vraiment de l’influence est le communautarisme juif.

Les usages politiques de l’holocauste

Norman Finkelstein a montré il y a quelques temps que l’holocauste peut être exploité à des fins pour le moins dénuées de noblesse : comme extorquer des fonds à des banques suisses. La situation en France est cependant très différente. Il ne fait guère de doute que les rappels constants de la Shoah fonctionnent comme une sorte de protection pour Israël contre l’hostilité que génère le traitement infligé aux palestiniens. Mais la religion de l’holocauste a un autre impact politique plus profond qui n’a pas de relation directe avec le destin des Juifs.

Plus que toute autre chose, Auschwitz a été interprété en tant que symbole de ce à quoi mène le nationalisme. La référence à Auschwitz a servi à donner mauvaise conscience à l’Europe, et notamment aux Français si on tient compte du fait que leur rôle relativement marginal dans cette affaire [Auschwitz] avait été une conséquence de la défaite militaire et de l’occupation du pays par l’Allemagne nazie. Bernard-Henri Lévy, l’écrivain dont l’influence s’est accrue dans des proportions grotesques ces dernières années (il a poussé la président Sarkozy à la guerre contre la Libye), avait commencé sa carrière en soutenant que le «fascisme» est l’authentique «idéologie française». Culpabilité, culpabilité, culpabilité. En faisant d’Auschwitz l’événement le plus significatif de l’histoire contemporaine, un certain nombre d’écrivains et de personnages publics justifient par défaut le pouvoir croissant de l’Union Européenne en tant que remplacement indispensable des nations européennes intrinsèquement «mauvaises.» Plus jamais Auschwitz ! Dissoudre les Etats nations dans une bureaucratie technocratique libérée de l’influence émotionnelle de citoyens qui pourraient ne pas voter correctement. Vous vous sentez français ? Ou allemand ? Vous devirez en éprouver de la culpabilité – à cause d’Auschwitz.

Les Européens sont de moins en moins enthousiastes devant l’UE car elle ruine leurs économies et leur retire tout contrôle démocratique sur elles. Ils peuvent voter pour le mariage gay, mais pas pour la moindre mesure keynésienne et encore moins socialiste. La culpabilité pour le passé est néanmoins supposée maintenir leur fidélité à l’égard du rêve européen.

Les fans de Dieudonné, si on en juge par les photos, semblent être en majorité des hommes jeunes, âgés entre 20 et 30 ans. Ils sont nés deux bonnes générations après la seconde guerre mondiale. Ils ont passé leurs vies à entendre parler de la Shoah. Plus de 300 écoles parisiennes arborent une plaque commémorant le sort funeste d’enfants juifs déportés dans les camps de concentration nazis. Quel peut bien être l’effet de tout ça ? Pour beaucoup de ceux qui sont nés longtemps après ces terribles événements, il semble que tout le monde est supposé se sentir coupable – si ce n’est pas pour ce qu’ils n’ont pas fait, alors c’est pour ce qu’ils auraient été supposés avoir fait s’ils en avaient eu la possibilité [s’ils avaient vécu à l’époque, NdT].

Quand Dieudonné a transformé Chaud Cacao, une vielle chanson «tropicale» un peu raciste, en Shoah Ananas, le refrain a été repris en masse par les fans de Dieudonné. J’ose croire qu’ils ne se moquent pas de la véritable Shoah mais plutôt de ceux qui leur rappellent tout le temps des événements qui sont supposés les faire se sentir coupables, insignifiants et impuissants. Une bonne partie de cette génération en a assez d’entendre parler de la période 1939 – 1945 alors que son propre avenir est sombre.

 Personne ne sait quand s’arrêter 

Dimanche dernier, Nicolas Anelka, un footballeur très connu d’origine afro-belge [la famille d’Anelka est en fait originaire des Antilles, NdT] qui évolue en Angleterre a fait une quenelle après avoir marqué un but – en signe de solidarité avec son ami Dieudonné M’Bala M’Bala. Suite à ce geste simple et à la base insignifiant, le tumulte a atteint de nouveaux sommets.

A l’Assemblée Nationale française, Meyer Habib représente les «Français de l’étranger» – dont 4 000 Israéliens d’origine française [plus de 78 000 inscrits sur les registres électoraux en réalité, NdT]. Lundi dernier, il a twitté «La quenelle d’Anelka est intolérable ! Je vais déposer une proposition de loi pour punir ce nouveau salut nazi pratiqué par les antisémites.»

Meyer Habib

Meyer Habib

La France a adopté des lois pour « punir l’antisémitisme » [aucune de ces lois ne concerne exclusivement l’antisémitisme, NdT]. Le résultat est à l’opposé. De telles dispositions tendent simplement à confirmer la vieille idée selon laquelle «les juifs dirigent le pays» et participent à la montée de l’antisémitisme. Quand de jeunes français voient un Franco-israélien essayer de transformer en délit un simple geste, quand la communauté juive se mobilise pour interdire leur humoriste préféré, cela ne peut que faire monter l’antisémitisme et même encore plus rapidement.

Il reste que dans cette escalade le rapport de forces est très inégal. Un humoriste n’a pour armes que des mots et des fans qui pourraient bien se disperser quand la situation va se corser. De l’autre côté se trouvent l’idéologie dominante et le pouvoir de l’Etat.

Dans ce genre de conflit, la paix civile dépend de la sagesse et de la capacité de ceux qui ont le plus de pouvoir à faire montre de retenue. S’ils n’agissent pas en ce sens, alors cela pourrait être un jeu sans vainqueurs.

L’islamophobie, bien commun de la « république » (sur la levée de l’immunité parlementaire de Marine Le Pen)

2 juillet 2013

Dans une vie politique française qui est marquée par une relative indifférenciation des idées chez les partis « institutionnels » de droite comme de gauche, il semble impossible d’engager un véritable débat.

Là où on aurait pu imaginer qu’un débat devait avoir lieu comme dans le projet de loi sur le mariage des homosexuels, cela a été impossible puisque ceux qui étaient opposés à ce mariage ont été ravalés au rang d’obscurantistes.

Pour satisfaire aux aspirations d’une coterie ultra minoritaire mais présente aux bons niveaux dans la société et dans l’appareil d’Etat.

De fait, il n’y a pas grand chose à débattre en dehors de la meilleure manière de casser du sucre sur les musulmans.

Parce que ce qu’on appelle islamophobie fait maintenant partie du bien commun de la société française. Et si le Front national est très en verve en matière de discours islamophobe, l’UMP lui dispute quand même le maillot jaune sur ce point tandis que les socialistes font appel à leur vieux fonds anti-islam.

Plus modérés apparemment dans leur propos, ils n’ont cependant jamais renâclé quand il s’agissait de « casser du fell »en Algérie, de l’Egyptien comme en 1956 et ils se sont inscrits dans le droit fil des positions de l’UMP sur la Libye et la Syrie.

En matière de politique intérieure française, la une des journaux en ce moment porte sur la levée de l’immunité de Marine Le Pen par le parlement européen pour ses propos sur les prières de rue qu’elle avait comparées à une « occupation. »

Cette levée a été votée à la demande du parquet de Lyon qui

« veut l’entendre dans le cadre d’une enquête pour incitation à la haine raciale ».

La présidente du Front national, députée européenne, est visée par une plainte du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP) relative à ses propos du 10 décembre 2010 établissant un parallèle entre les prières des musulmans dans la rue en France et l’Occupation.

Ce jour-là, Marine Le Pen avait évoqué en ces termes certaines prières musulmanes en public :

« Je suis désolée, mais pour ceux qui aiment beaucoup parler de la seconde guerre mondiale, s’il s’agit de parler d’occupation, on pourrait en parler pour le coup. C’est une occupation de pans de territoire. Certes, il n’y a pas de blindés, il n’y a pas de soldats, mais elle pèse sur les habitants. »

Mme Le Pen est donc visée par une plainte du Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples (MRAP).

Mme Le Pen comprend cette procédure comme une tentative de l’abattre à tout prix.

Je ne suis pas loin de souscrire à ce point de vue pour la simple raison que ses prises de position n’ont en rien été en décalage de ce qu’on a pu observer au moment des faits et depuis lors dans le comportement d’éminents cadres politiques au pouvoir ou dans l’opposition.

On se rappellera par exemple que Benoït Hamon, à l’époque porte-parole du Parti Socialiste avait de son côté appelé à « libérer » l’espace public.

Benoît Hamon n’a fait l’objet d’aucune plainte, pas plus que M jean-François Copé avec sa scabreuse histoire de pains au chocolat confisqués aux petits Goyim par leurs camarades musulmans en période de jeûne de Ramadan.

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Et que dire de la LICRA qui dans sa déclaration de condamnation (!) des propos de Mme Le Pen constatait que

il est vrai que certains de nos concitoyens musulmans annexent la voie publique

Bien sûr il y a le contexte de ce segment de phrase, (comme dans les propos initiaux de Marine Le Pen) mais le verbe annexer est bel et bien employé.

Les musulmans annexent la voie publique comme l’entité sioniste annexe le plateau du Golan ou Jérusalem?

Quoi qu’il en soit, Mme Le Pen se voit donner une occasion en or de passer pour l’irréductible gauloise confrontée aux assauts d’une classe politique qui n’a rien d’autre à proposer qu’une adaptation du double carcan confectionné à Bruxelles et à Washington.

Pour finir, on rappellera que l’église catholique organise de nombreuses processions sur la voie publique un peu partout à l’occasion de diverses fêtes religieuses.

Une des processions les plus imposantes est celle de la fête dite des Lumières le 8 décembre à Lyon qui mobilise des dizaines voire des centaines de milliers de marcheurs  [de toutes confessions même si les chrétiens sont bien entendu l’immense majorité] pour une montée aux flambeaux vers la basilique de Fourvière.

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Lyon, le 8 décembre 2011: une des cinq processions était celle des intégristes de la fraternité Saint Pie X

On m’objectera que cette fête n’a plus de caractère religieux.

Je répondrai: posez la question au Diocèse de Lyon et aux nombreux chrétiens pratiquants de la capitale des Gaules.

On m’objectera aussi que la France est un pays de tradition catholique.

Je répondrai: certes, mais la république est laïque et c’est paraît-il au nom de cette laïcité que Jean-François Copé défend les pains au chocolat contre l’islamisation rampante et que Marine Le Pen prétend libérer les rues de Paris.

Quand François Hollande reprend une des cinquante propositions de la LICRA

11 mars 2012

Le débat présidentiel français est parfois intéressant, parfois nauséabond et parfois superficiel.

Il est intéressant, quoique de manière somme toute épisodique, quand un candidat, François Hollande pour ne pas le nommer, avance des propositions relatives à la fiscalité.

Il est nauséabond quand certains autres candidats, Marine Le Pen ou l’équipe de Nicolas Sarkozy mettent au coeur du débat la question de la viande halal.

Sur ce sujet, j’ai bien l’impression que le consistoire juif a sifflé la fin de la partie dès lors que la polémique sur la halal a glissé, comme c’était inévitable, vers le casher: ce sont deux ministres contrits, le premier ministre et celui de l’intérieur qui ont dû recevoir les responsables du consistoire central et présenter leurs excuses. Un exemple comme un autre de la puissance d’une communauté religieuse dans le France laïque. Les représentants du culte musulman ont été reçus aussi, mais après les représentants juifs, alors que la polémique tournait d’abord autour de la viande halal!

Le débat est superficiel quand, ainsi que François Hollande vient de le faire, on annonce qu’on supprimera le mot « race » de la constitution.

Fort bien. Mais pourquoi cette proposition maintenant? François Hollande et ses amis du PS qui ont gouverné pendant quand même quelques années n’avaient jamais trouvé le temps de prendre cette mesure qui a l’avantage de ne pas coûter un centime au contribuable?

En fait, la réponse est des plus simples, puisque François Hollande s’est contenté de piocher dans les 50 propositions de la LICRA (Ligue Internationale Contre le Racisme et l’Antisémitisme) pour une France plus fraternelle.

Une France plus fraternelle mais où on devrait continuer à distinguer le racisme de l’antisémitisme.

Pour que vous puissiez mieux comprendre la différence entre racisme et antisémitisme, vous pouvez toujours aller sur cet article posté sur le site de la LICRA.

Eh oui, pas un mot sur les milliers de Palestiniens (dont des enfants) détenus dans les geôles sionistes!

La LICRA, tout en étant distincte du CRIF (Conseil Représentatif des Institutions Juives de France) est sur la même ligne politique quand on en vient à l’entité sioniste. Les objectifs fondamentaux de ces deux officines sont identiques et leurs personnels sont en partie communs et interchangeables. Ils se retrouvent également dans d’autre organisations intéressées par les mêmes buts fondamentaux.